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Suspension de la pêche dans le Golfe de Gascogne pour protéger les dauphins : quel bilan ?

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C’est l’heure de filets. Après un mois d’arrêt, la pêche au cha­lut et au filet a repris dans la nuit de mar­di à mer­cre­di dans le Golfe de Gascogne. Les béné­fices de cette pause pour la bio­di­ver­sité et les pêcheries restent flous.

Depuis le 22 jan­vi­er, les navires de plus de huit mètres équipés de cha­luts ou de filets sont restés à quai du Fin­istère aux côtes landais­es. Cette inter­dic­tion découle de la sai­sine du Con­seil d’É­tat par les asso­ci­a­tions de défense de l’environnement Sea Sher­perd, Défense des milieux aqua­tiques et France Nature Envi­ron­nement (FNE) au nom de la préser­va­tion des dauphins et des mar­souins.

En mars dernier, le Con­seil d’État avait ordon­né au gou­verne­ment de fer­mer dans les six mois les espaces de pêch­es pen­dant les péri­odes de nour­ris­sage des petits cétacés. Puis, en octo­bre, l’État avait annon­cé la mise en place de cette pre­mière pause d’un mois. Elle s’appliquera égale­ment en 2025 et 2026.

«On félicite le monde de la pêche pour son effort con­séquent pour la préser­va­tion de la bio­di­ver­sité», souligne Jérôme Graefe, juriste à la FNE, auprès de Vert. 450 bateaux sont restés à quai pen­dant ce mois jugé très lucratif pour le secteur. Soles, bars, sar­dines… Nom­breux sont les pois­sons qui passent au large des côtes français­es en cette péri­ode.

Ce mer­cre­di, l’heure est donc à la reprise, mais pas au bilan. «Il est encore trop tôt pour avoir un recul sur l’efficacité de cette mesure sur les pop­u­la­tions de dauphins et de mar­souins, mais égale­ment sur les impacts socio-économiques», pour­suit Jérôme Graefe.

Des signes encourageants

Depuis l’hiver 2023, l’observatoire Pelagis a compt­abil­isé 1380 échouages de petits cétacés sur les côtes atlan­tiques, dont 92% de dauphins. Entre 3 000 et 11 000 d’en­tre eux sont cap­turés chaque année, un nom­bre jugé suff­isant pour présen­ter un risque pour la péren­nité de l’espèce pro­tégée, selon le cen­tre de recherche Ifre­mer.

Hélène Pelti­er, ingénieure de recherche à Pelagis, met en avant les aspects posi­tifs de la pause : «Sur la cen­taine d’échouages de petits cétacés de ce mois passé, une infime minorité présen­tait des traces de cap­tures. Or, sur une péri­ode d’une durée sim­i­laire et avec des con­di­tions com­pa­ra­bles, ils représen­tent près de trois quarts des échouages».

Selon le Cen­tre inter­na­tion­al pour l’exploration de la mer (CIEM), il est essen­tiel d’attendre la fin de l’hiver pour estimer la mor­tal­ité des petits cétacés. Le scé­nario le plus ambitieux du CIEM prévoit une fer­me­ture de trois mois en hiv­er et un mois en été.

40 000 euros de pertes

Pêcheur à Audierne (Fin­istère), Math­ieu Claquin estime qu’il a per­du 40 000 euros env­i­ron de chiffre d’af­faires. «On sera atten­tifs à ce que le gou­verne­ment assume ses respon­s­abil­ités, car il ne peut y avoir d’effort sans accom­pa­g­ne­ment», insiste Jérôme Graefe, juriste à la FNE. Le 1er févri­er, le min­istre Christophe Béchu avait réitéré sa promesse d’une indem­ni­sa­tion dès le début du mois de mars à hau­teur de 80% à 85% du chiffre d’affaires.

Pour France Nature Envi­ron­nement, cette pause est aus­si une invi­ta­tion à réfléchir à des mod­èles de pêche plus durables. «Les pêcheurs doivent recon­naître l’océan comme un bien com­mun, dont ils sont les gar­di­ens», prévient Jérôme Graefe.