Viser l’allume. Le plus puissant des réacteurs nucléaires français va être raccordé au réseau électrique ce vendredi 20 décembre, selon EDF. Le lancement du réacteur nouvelle génération (EPR) de Flamanville, dans la Manche, est un symbole de la relance du nucléaire en France.
Le voilà, avec douze ans de retard ! À partir de ce vendredi, et sauf nouvel incident technique, le nouveau réacteur nucléaire de Flamanville va déverser son électricité dans des usines, des lampadaires, des maisons… À terme, le plus puissant des réacteurs français (1650 mégawatts) devrait alimenter deux millions de foyers dans le pays.
La mise en route de cet EPR (pour «réacteur à eau pressurisée», une nouvelle génération de réacteurs nucléaires) «sera marquée par différents paliers de puissance, jusqu’à l’été 2025, qui solderont la phase d’essais, précise le leader français de l’électricité. À l’issue de cette période, il est prévu que le réacteur fonctionne à 100% de puissance jusqu’au premier arrêt programmé pour maintenance et rechargement du combustible.»
Un chantier maudit
Vingt ans après le lancement du projet, la première réaction nucléaire en chaîne au sein de l’EPR de Flamanville avait eu lieu le 3 septembre (notre article). Le raccordement du réacteur au réseau, initialement prévu cet été, avait alors été décalé à «la fin de l’automne» par EDF.
Au total, le chantier de l’EPR a pris douze ans de retard sur son calendrier initial, la faute à des déboires techniques à répétition. Dernier en date : une anomalie de fabrication dans le couvercle du réacteur, qui devra être changé dès la fin de son premier cycle de fonctionnement, soit au bout de 15 à 18 mois environ. En mai 2023, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait autorisé EDF à utiliser temporairement ce couvercle défectueux, car son remplacement «avant la mise en service du réacteur conduirait à reporter celle-ci d’environ un an».
Résultat de ces péripéties en cascade : la facture du projet a explosé, atteignant désormais les 13,2 milliards d’euros, selon EDF. C’est quatre fois plus que le devis initial, qui estimait le coût à 3,3 milliards d’euros. En 2020, la Cour des comptes avait même évalué le montant total à 19 milliards d’euros, en incluant les «surcoûts de financement».
Relancer le nucléaire, l’ambition d’Emmanuel Macron
Cela faisait un quart de siècle que la France n’avait pas lancé un nouveau réacteur nucléaire. La dernière fois, c’était en 1999 avec le réacteur nucléaire 2 de Civaux, dans la Vienne. L’EPR de Flamanville est le 57ème réacteur du parc nucléaire français, et le 4ème de ce type installé dans le monde (deux autres en Chine et un en Finlande).
En 2022, Emmanuel Macron a décidé de relancer le nucléaire français en commandant à EDF six réacteurs EPR2 (une deuxième génération améliorée de réacteurs), et huit supplémentaires en option. La mise en service de l’EPR de Flamanville revêt donc une dimension symbolique.
Malgré des alertes d’expert·es sur la perte de compétence du pays en matière de nucléaire, la France s’est fixé un calendrier ambitieux. Le premier béton doit être coulé à Penly (Seine-Maritime) en 2028, après quoi six réacteurs devront entrer en service tous les 18 mois à partir de 2035. La saga des nouveaux réacteurs nucléaires ne fait que commencer.