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Le RN met «l’écologie punitive» à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale

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À la demande du groupe Rassemblement national (RN), l’Assemblée nationale a débattu de «l’impact de l’écologie punitive sur l’inflation et le pouvoir d’achat» mardi 4 avril. Parmi les sujets inflammables discutés par les député·es, les Zones à faibles émissions (ZFE).

Alors que le dérèglement climatique s’intensifie et que la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation frappe durement au portefeuille une large part de la population, le RN a choisi de mettre de l’huile sur le feu en lançant un débat parlementaire sur le thème largement controversé de «l’écologie punitive». Devant un hémicycle largement clairsemé ce mardi soir, le député RN Pierre Meurin a d’emblée donné le ton en fustigeant «une idéologie qui consiste à punir les Français les plus modestes qui vivent la plupart du temps en zone rurale, une idéologie qui écarte toute idée de progrès, une idéologie qui condamne notre pays à la décroissance, qui renonce à l’innovation et qui entretient la peur qui peut figer une société et l’habituer au fatalisme du déclin».

«Notre planète brûle. Et que fait le Rassemblement national ? Il accuse les pompiers» s’est étranglée la députée écologiste Marie Pochon. L’élue de la Drôme a assumé une «écologie punitive» pour les «responsables politiques endormis par les lobbys», les «dictatures qui profitent de notre dépendance choisie à leurs hydrocarbures pour mettre à mal la démocratie, la paix et les droits humains» et «les multinationales qui exploitent la planète».

Les Républicains, par la voix de la députée de la Haute-Loire Isabelle Valentin, ont plaidé pour une écologie «positive» contre une «bienpensance écologiste» qui se traduit par «plus de taxes, plus de normes excessives sur l’agriculture, sur l’industrie, qui pénalisent les forces vives». Le député socialiste de Martinique Johnny Hajjar a rétorqué : «c’est un terme noble que représente le mot écologie. Elle est pourtant associée au mot “punitive” qui renvoie à une faute, une culpabilité, une condamnation. Quel paradoxe ! […] La véritable punition, ce serait l’inaction face à la destruction des milieux naturels où nous vivons».

Principe du «pollueur-payeur», interdiction des jets privés, taxation des superprofits, soutien à la filière nucléaire, bouclier tarifaire… Les député·es ont passé en revue une foule de sujets polémiques en compagnie du ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. Bien que très divisées sur la manière de faire face de manière juste au changement climatique, les oppositions se sont néanmoins retrouvées pour porter le fer contre le gouvernement sur le sujet brûlant des Zones à faibles émissions (ZFE), ces zones urbaines réservées aux véhicules les moins polluants.

Les ZFE, symbole de la «punition»

Afin de limiter le taux de particules fines dans certaines agglomérations, des millions de Français·es vont devoir se débarrasser rapidement de leur véhicule et racheter une voiture thermique plus récente ou électrique. Le député de Haute-Garonne François Piquemal (LFI) a néanmoins que souligné les aides financières destinées à aider les plus modestes étaient trop faibles. Pour preuve, ce dernier a tenu à lire la lettre écrite par une habitante de sa circonscription, commerçante du quartier du Mirail à Toulouse et propriétaire d’un véhicule Crit’air 4 désormais interdit de circulation dans la métropole : «Je n’ai rien contre l’écologie, mais comment fait-on ? Pour acheter une voiture électrique, j’ai vu qu’avec mes revenus et malgré les aides, il fallait que j’avance 6 000 euros. Je ne les ai pas. Il va falloir que je fasse un crédit à la consommation, mais j’en ai déjà un en cours ».

Sa collègue écologiste Marie Pochon a regretté l’absence d’alternatives à la voiture individuelle, en raison de la suppression des petites lignes de TER. Dans le Loiret, des projets ferroviaires pourtant nécessaires tombent à l’eau, a embrayé la députée RN Mathilde Paris, affirmant que sa circonscription était de ce point de vue «un cas d’école». «Alors que la réouverture d’une ancienne ligne ferroviaire reliant Orléans à la commune de Châteauneuf-sur-Loire devait voir le jour, elle a été enterrée en 2017 par le maire de la métropole. Il voyait d’un mauvais œil la création d’une voie supplémentaire en gare d’Orléans qui aurait supprimé des places de parking», s’est-elle insurgée.

Loin d’être décontenancé par les critiques, le ministre de l’écologie Christophe Béchu a vanté les mérites des différentes aides mises en place par le gouvernement. Parmi elles : l’augmentation du bonus pour l’achat d’un véhicule électrique et de la prime à la reconversion écologique, l’expérimentation d’un prêt à taux zéro pour l’achat d’un véhicule «propre» ou encore le leasing à 100 euros par mois pour un véhicule électrique.

Le ministre a également défendu la construction future des RER métropolitains, annoncée par Emmanuel Macron en novembre dernier. Sur les ZFE, Christophe Béchu a souligné que seules les métropoles ayant atteint des seuils de pollution préoccupants seraient contraintes de mettre en place des restrictions. Par ailleurs, les élu·es pourront établir un calendrier progressif des interdictions, a-t-il rappelé, avec «d’abord les véhicules de plus de 25 ans».

Pour le gouvernement, la voiture n’est pas le «véritable ennemi»

La députée Horizon Anne-Cécile Violland a pour sa part insisté sur le fait que la fin des véhicules thermiques était inéluctable : «Plus de six millions de personnes meurent chaque année dans le monde à cause de la pollution atmosphérique. Deux fois plus que les morts cumulés des suites du sida, de la tuberculose et du paludisme».

Pour éviter de pénaliser les foyers les plus modestes et dans une optique de «croissance verte», le député Jean-Louis Bricout (LIOT) a proposé des aides circonstanciées pour louer un véhicule électrique sur le modèle des aides personnalisées au logement (APL). Une initiative baptisée «Aide personnalisée à la mobilité».

Le député RN Pierre Meurin a décrié l’empreinte environnementale des voitures électriques, ces dernières étant «produites largement par la Chine et les batteries sont fabriquées avec du cobalt produit à 80% en République Démocratique du Congo», a-t-il asséné, avant d’ajouter que «ce cobalt est extrait dans des mines artisanales dangereuses et je voudrais avoir une pensée aujourd’hui pour les 40 000 enfants mineurs qui travaillent dans ces mines dont les effondrements provoquent toutes les semaines des accidents mortels. Mais comme ces accidents sont loin de chez nous, évidemment, on s’en lave les mains ». Il a toutefois réaffirmé la foi de son parti dans le «progrès qui conduit à reprendre le chemin de la croissance tout en croyant dans le génie de l’innovation de notre société».

Pour Christophe Béchu, le «véritable ennemi» n’est pas la voiture individuelle, «qui, dans beaucoup d’endroits, est la seule solution aujourd’hui pour se déplacer», mais «plutôt l’autosolisme», le fait de circuler seul dans une automobile. Covoiturage, ô désespoir.

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