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Le nouveau plan de lutte contre les nitrates refuse toujours de toucher à l’agriculture industrielle

Algues qui mieux mieux. Le gouvernement a présenté son nouveau programme d'action sur les nitrates d'origine agricole, dont les faiblesses sont soulignées par une foule d'acteurs.
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Algues qui mieux mieux. Le gou­verne­ment a présen­té son nou­veau pro­gramme d’ac­tion sur les nitrates d’o­rig­ine agri­cole, dont les faib­less­es sont soulignées par une foule d’ac­teurs.

Les nitrates d’o­rig­ine agri­cole ont encore de beaux jours devant eux. Le sep­tième plan de lutte présen­té ven­dre­di dernier au Comité nation­al de l’eau — une instance con­sul­ta­tive, n’ap­porte aucune avancée con­crète pour lut­ter con­tre cette sub­stance dan­gereuse pour la san­té humaine. 

Les nitrates ont pour orig­ine les engrais de l’industrie agri­cole et les déjec­tions des ani­maux d’élevage, et leur pro­liféra­tion dans les milieux naturels cause de nom­breuses pol­lu­tions, comme les marées d’algues vertes en Bre­tagne. Des méfaits recon­nus depuis longtemps, qui ont con­duit l’UE à adopter en 1991 une direc­tive visant à réduire et à prévenir la pol­lu­tion de l’eau par les nitrates d’o­rig­ine agri­cole, trans­posée en France.

Pol­lu­tion aux algues vertes en baie de Saint-Brieuc © Denis Broth­ier

Depuis, tous les qua­tre ans, un nou­veau pro­gramme d’ac­tions nation­al (PAN) doit être défi­ni, pour agir en par­ti­c­uli­er sur les « zones vul­nérables » iden­ti­fiées. Ce pro­gramme est décliné dans chaque région. Mais depuis 1991, rien ou si peu n’a changé. « L’ef­fi­cac­ité des précé­dents pro­grammes d’action n’est ni éval­uée ni démon­trée. Les pro­grès sont lim­ités, sans pou­voir les attribuer à ces pro­grammes », décrit l’Au­torité envi­ron­nemen­tale (AE) dans un avis pub­lié le 19 novem­bre. Cette instance indépen­dante rel­e­vant du min­istère de la Tran­si­tion écologique est chargée d’é­val­uer les impacts des pro­jets sur l’en­vi­ron­nement.

Le nou­veau plan  « en reste à des évo­lu­tions mineures, peu sus­cep­ti­bles de per­me­t­tre l’atteinte du bon état des eaux », juge encore l’AE. Pour elle, cer­taines mesures sont même « con­sti­tu­tives d’un risque de “recul envi­ron­nemen­tal” ». Pire, « les adap­ta­tions prévues du PAN visent moins à accroître son effi­cac­ité sur la réduc­tion de la pol­lu­tion par les nitrates qu’à en lim­iter les con­traintes pour les agricul­teurs au motif d’en favoris­er l’appropriation ». Le secteur agri­cole est pour­tant à l’o­rig­ine de 88 % des nitrates con­tenus dans les eaux.

Mal­gré tout, le Comité nation­al de l’eau a émis un avis favor­able au pro­gramme, assor­ti de nom­breuses réserves sous formes de « recom­man­da­tions ». « Le sen­ti­ment que ce plan manque net­te­ment d’am­bi­tion dom­i­nait l’assem­blée », a expliqué au Monde Antoine Gatet, vice-prési­dent de l’as­so­ci­a­tion France Nature Envi­ron­nement, qui s’est abstenu. Agricul­teur en Ille-et-Vilaine et représen­tant de la Fédéra­tion nationale de l’a­gri­cul­ture biologique au comité, Stéphane Rozé estime aus­si auprès du quo­ti­di­en qu’il est « incroy­able que le PAN ne cite à aucun moment l’a­gri­cul­ture biologique, alors qu’elle est la seule réponse à la dégra­da­tion de l’eau ».