Le vert du faux

Le ferry est-il plus écolo que l’avion ?

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Ça fait des vagues. Le trans­port mar­itime, à bord d’un fer­ry, est l’une des rares alter­na­tives à l’avion pour reli­er deux ter­ri­toires séparés par la mer ou l’océan. Mal­gré ses nom­breux prob­lèmes envi­ron­nemen­taux, le fer­ry serait à priv­ilégi­er.

Le ferry, combien de gaz à effet de serre ?

Pour aller en Corse depuis le con­ti­nent, il existe deux pos­si­bil­ités : les airs ou la mer. Les passager·es priv­ilégient générale­ment l’avion au bateau, sauf aux mois de juil­let et d’août. Moins rapi­de et moins pra­tique, le fer­ry est aus­si moins pol­lu­ant en ter­mes d’émissions de CO2 — même si ses impacts ne sont pas nég­lige­ables. D’après l’Agence européenne de l’environnement, le trans­port en fer­ry émet env­i­ron 60 grammes de CO2 par kilo­mètre et pas­sager, soit près de trois fois moins qu’en avion. Mais ces chiffres ne sont pas par­faite­ment représen­tat­ifs, alerte auprès de Vert l’ONG Trans­port & envi­ron­ment, qui juge ce cal­cul des émis­sions approx­i­matif.

Pour cal­culer l’empreinte car­bone d’un voy­age en fer­ry, le site Bon Pote a mis au point un sim­u­la­teur détail­lé, à la méthodolo­gie trans­par­ente et qui prend en compte dif­férents fac­teurs (l’usage de ser­vices à bord, l’embarquement ou non d’une voiture, etc). Une per­son­ne qui fera la tra­ver­sée entre Mar­seille et Ajac­cio seule, avec une cab­ine, mais sans voiture et sans utilis­er les équipements à bord (restau­rant, piscine, etc), émet­tra 249 kilo­grammes de CO2-équiv­a­lent pour l’aller-retour (630km), soit 0,39 kg de CO2eq par kilo­mètre par­cou­ru — un peu plus de six fois l’estimation européenne. Si l’on enlève la cab­ine et qu’on se con­tente d’un sim­ple siège, le bilan tombe à 50 kgs de CO2eq. D’après l’Agence de la tran­si­tion écologique, un aller-retour Mar­seille-Ajac­cio en avion émet de son côté 146 kilo­grammes de CO2eq, soit trois fois plus.

Une pollution de l’air importante

Out­re les émis­sions de CO2, le trans­port mar­itime génère une forte pol­lu­tion atmo­sphérique. Les gaz d’échappement des navires relâchent du dioxyde de soufre, des oxy­des d’azote et des par­tic­ules fines et ultra-fines — tous tox­iques à dif­férentes échelles. Durant une enquête menée en 2015 à Mar­seille, le réseau France nature envi­ron­nement et l’association alle­mande Nabu ont relevé une pol­lu­tion aux par­tic­ules ultra-fines 20 fois plus impor­tante dans les quartiers rési­den­tiels voisins du port que dans le reste de la ville. En 2018, les deux organ­i­sa­tions ont recen­sé une pol­lu­tion 37,5 fois plus impor­tante lors des départs et des arrivées de fer­ries à Bas­tia que le reste du temps.

Toujours plus vertueux que l’avion

«Il est essen­tiel de rap­pel­er que le pire mode de trans­port pour aller d’un point A à un point B, d’un point de vue cli­ma­tique, reste l’avion», souligne un porte-parole de l’ONG européenne Trans­port & envi­ron­ment, spé­cial­isée dans les mobil­ités durables. Si les fer­ries ne sont pas la panacée, leur «verdisse­ment» sem­ble plus prob­a­ble que celui de l’aviation (notre arti­cle), veut croire l’ONG. «À l’avenir, les fer­ries utilis­eront des modes beau­coup plus pro­pres pour nav­iguer. Les dis­tances par­cou­rues étant rel­a­tive­ment cour­tes ou moyennes et les routes emprun­tées restant les mêmes, il leur sera facile d’adopter la propul­sion élec­trique ou à hydrogène en rechargeant leurs navires une fois à quai», explique-t-elle.

Enfin, le fer­ry présente l’intérêt d’être un moyen de trans­port lent, qui per­met de pren­dre con­science des kilo­mètres par­cou­rus. Une dimen­sion peu à peu per­due de vue avec l’avion, qui a rap­proché des ter­ri­toires de part et d’autre du globe et ren­du de tels déplace­ments anodins et rou­tiniers. Pren­dre le temps de voy­ager, c’est aus­si davan­tage se ren­dre compte de l’impact de nos déplace­ments.