Décryptage

France télévisions supprime son média écolo Nowu pour faire de la place aux Jeux olympiques

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La direction du groupe audiovisuel justifie ce geste par des audiences trop faibles, mais plusieurs sources révèlent que cette fermeture est notamment motivée par la volonté d’augmenter la couverture des Jeux olympiques.

Monté il y a deux ans et alimenté par une équipe d’une vingtaine de personnes, Nowu (prononcé «Now you») s’appliquait à raconter l’écologie autrement aux jeunes, avec des formats innovants publiés sur son site web et les réseaux sociaux.

L’équipe suivait son bonhomme de chemin – des recrutements étaient en cours -, jusqu’à ce que France télévisions annonce, à la mi-novembre, que le média allait brutalement s’arrêter dès le 31 décembre.

Capture d’écran du compte Instagram de Nowu

Officiellement, la direction a justifié sa décision par les faibles audiences de Nowu et des arbitrages budgétaires. Motif moins avouable : ce choix pourrait avoir été fait pour libérer des moyens afin de renforcer la couverture des Jeux olympiques (JO) 2024, dont France télévisions a obtenu les droits, comme l’avait révélé La Lettre.

Une source chez France télévisions confirme à Vert que l’annonce de la fin de Nowu a été justifiée «notamment pour prioriser d’autres sujets, en particulier un traitement ambitieux des JO». Une justification qui a ensuite «complètement disparu des communications» du groupe. «Le choix d’arrêter Nowu n’a absolument aucun lien avec les Jeux olympiques et paralympiques de 2024», s’est défendue la direction auprès de Mediapart.

Une vingtaine de travailleur·ses risque donc de se retrouver sur le carreau, dont cinq journalistes, qui ont été embauché·es via des prestataires privés. Un statut bâtard qui ne leur donne pas droit à la carte de presse et permet de couper court à la collaboration, puisque les journalistes ne sont pas salarié·es du groupe. Plusieurs membres de l’équipe de Nowu s’apprêtent à subir un licenciement économique par leur employeur direct.

Une situation commune à d’autres projets de France télévisions, dénoncée par les syndicats. «Le groupe veut développer des projets numériques, ce qui est très bien, mais il le fait au travers de prestataires extérieurs à l’entreprise, alors que les journalistes sont physiquement dans les locaux», déplore Antoine Chuzeville, journaliste et délégué du Syndicat national des journalistes. Il ajoute : «C’est normal de bosser avec des prestataires sur des sujets liés au bâtiment, ou aux installations électriques, mais le journalisme, c’est le cœur de métier de France Télévisions». Pourquoi ce tour de passe-passe ? «Notre direction s’est engagée auprès des pouvoirs politiques à réduire le nombre de postes pour des raisons politiques, dogmatiques, et elle peut en même temps afficher un développement du numérique», explique le délégué syndical.

Nowu, dont le site web et ses contenus seront bientôt supprimés, ne sera a priori remplacé par rien. Dans un groupe qui a fait de la jeunesse et du climat deux priorités, la situation en désespère plus d’un·e.

Contactée par Vert, la direction de France télévisions n’avait pas répondu à nos questions à l’heure de l’écriture de ces lignes.