Si l’équipe de campagne de Valérie Pécresse ne compte aucune femme, il en est une à la tête de son comité de soutien du Maine-et-Loire qui fait déjà parler d’elle. Anne-Laure Blin, 38 ans, est députée de ce département depuis septembre 2020. Parlementaire ultra-conservatrice, on lui doit l’amendement qui a maintenu la clause de conscience réservant le droit aux médecins de refuser de pratiquer un avortement. Durant les débats sur la loi climat présentée à l’Assemblée nationale avant l’été, elle avait aussi martelé son opposition à ce qu’elle qualifiait d’« écologie punitive. Une écologie dogmatique qui annihile le bon sens et qui ne prend pas en compte les avis de nos agriculteurs, de nos éleveurs, de nos chefs d’entreprises. » Plus récemment, elle fut la seule députée Les Républicains (LR) à s’opposer à la loi contre la maltraitance animale, adoptée en décembre dernier.
L’ancienne collaboratrice de l’ex-député LR Jean-Charles Taugourdeau fait fructifier l’héritage de son prédécesseur. En décembre 2019, celui-ci avait déclaré dans l’hémicycle : « Tous ceux qui travaillent n’en peuvent plus de la multitude des normes édictées au nom du développement durable et du prétendu réchauffement climatique ».
Dans une vidéo de LCP exhumée ce dimanche, vue plus de 140 000 fois en quarante-huit heures, Anne-Laure Blin fustige la « doxa populaire qui dit qu’il faut acter le réchauffement climatique ». Elle demande à avoir « des éléments qui prouvent le réchauffement climatique », constatant que « la science n’est pas unanime sur cette question ». Or, c’est faux et les éléments de preuves sont légion.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) regroupe plusieurs centaines de chercheur·ses du monde entier qui ont passé en revue l’ensemble des publications sur le sujet. Dans la partie scientifique de son 6ème rapport, parue en août, il estime désormais « indiscutable » l’influence humaine sur l’élévation des températures (Vert). Sa vice-présidente, la climatologue Valérie Masson-Delmotte, a d’ailleurs invité la représentante à « visiter un laboratoire de recherches en sciences du climat » et lui a proposé de répondre à ses questions sur le rapport du Giec.
C’est l’assistant parlementaire du député écologiste Matthieu Orphelin, David Glotin, qui a déterré cette séquence de mars 2021, ce dimanche. Interrogé par Vert, Matthieu Orphelin se dit « extrêmement choqué » par les propos « climatonégationnistes » de sa voisine de circonscription du Maine-et-Loire. « Quand on est député, on n’a pas le droit d’injurier la science ». Dans la même veine, le candidat EELV à l’élection présidentielle Yannick Jadot s’est exclamé sur Twitter : « Dire cela en 2022, c’est criminel ! ».
Malgré le tollé sur les réseaux, Anne-Laure Blin maintient sa position. Dans un communiqué envoyé à la presse ce lundi, elle persiste, accusant la « doxa qui voudrait réduire l’Homme à son empreinte écologique et à ses actions néfastes pour l’environnement » et revendique le « droit au débat sans devoir toujours obéir au diktat de la pensée unique ». Jouant au-delà de la caricature le clivage entre écologistes et habitant·es des campagnes, elle dit « défendre nos producteurs de fruits et légumes français » ainsi que « le monde rural, sa culture et ses traditions (notamment les chasseurs, éleveurs, circassiens) ». Matthieu Orphelin dément l’« acharnement sur les réseaux sociaux de la part de certains écologistes jusqu’au-boutistes » mis en avant par la députée. Il estime que « nier le changement climatique, c’est tout sauf défendre le monde rural. Les agriculteurs sont les premiers touchés. J’ai une circonscription dont une partie est en territoire rural. Jamais on entend des énormités comme celles prononcées par Anne-laure Blin. »
Le parti Les Républicains s’est illustré par son absence de proposition sur l’urgence climatique. Au cours des neuf heures de débats télévisés organisés lors de la primaire de la droite, seulement 16 minutes avaient été consacrées au climat et dix secondes à la biodiversité, selon un décompte réalisé par le Pacte du Pouvoir de vivre. Une étude de l’Ademe datant de 2020 avait aussi montré que « 43% des parlementaires de droite considèrent que les scientifiques exagèrent les risques du réchauffement climatique ».
Si le climat n’est pas le cœur des priorités de la droite, « j’attends une réaction de la part de Valérie Pécresse. Le minimum pour la candidate, c’est de refaire un tweet en disant que le changement climatique est important », conclut Matthieu Orphelin. On peut aussi douter que la candidate maintienne à la tête de l’un de ses comités de soutien une climatonégationniste.
Contactée par Vert, Anne-Laure Blin nous a renvoyé vers son communiqué de presse.