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Des syndicats agricoles ont-ils obtenu la suppression d’un post de l’Inrae sur l’alimentation végétale ?

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La pomme de la dis­corde. Mer­cre­di, un post de l’Inrae (l’Institut nation­al de recherche pour l’a­gri­cul­ture, l’al­i­men­ta­tion et l’en­vi­ron­nement) sur l’alimentation végé­tale dans les restau­rants a été sup­primé de X (ex-Twit­ter) après avoir fait polémique.

L’Institut nation­al de recherche pour l’a­gri­cul­ture, l’al­i­men­ta­tion et l’en­vi­ron­nement (Inrae) ne pen­sait sûre­ment pas déclencher une telle con­tro­verse, lorsqu’il a pub­lié un arti­cle sur la thèse de l’un de ses doctorant·es, Arnaud Lamy. Celui-ci a étudié la place de la viande et du végé­tal dans la cui­sine des chef·fes.

«Pour la Saint-Valentin, vous avez prévu un dîn­er en amoureux ?», écrit l’Inrae, le 14 févri­er, dans un tweet, avant de présen­ter la thèse d’Arnaud Lamy. «Les cartes de restau­rant sont un vrai sujet d’étude, puisqu’elles mon­trent com­ment les chefs cuisiniers appréhen­dent la cui­sine saine et durable où la viande laisse place au végé­tal», peut-on lire dans le post.

Le tweet en ques­tion, partagé par le chercheur Romain Espinosa sur X après sa sup­pres­sion par l’In­rae.

Un tweet «absol­u­ment scan­daleux», a aus­sitôt dénon­cé l’ex-député Renais­sance et agricul­teur Jean-Bap­tiste More­au. «L’In­rae est dev­enue une ONG où des mil­i­tants ont rem­placé les sci­en­tifiques», a‑t-il hous­pillé. En par­al­lèle, un com­mu­niqué com­mun de la Fédéra­tion nationale des syn­di­cats d’exploitants agri­coles, syn­di­cat agri­cole majori­taire en France (FNSEA) et des Jeunes agricul­teurs a fustigé «une réelle provo­ca­tion» et un «posi­tion­nement anti-viande qui est de nature à oppos­er et à stig­ma­tis­er les éleveurs».

«Il n’est pas de la com­pé­tence d’un étab­lisse­ment pub­lic à car­ac­tère sci­en­tifique et tech­nologique de pro­duire ce type de con­tenu», ont pour­suivi les deux syn­di­cats. C’est pour­tant au cœur même de l’ADN de l’institut de recherche, dont la mis­sion est d’«accompagner l’émergence de sys­tèmes agri­coles et ali­men­taires durables» et d’«apporter des solu­tions pour la vie, les humains et la terre».

Pour rap­pel, végé­talis­er son ali­men­ta­tion est l’une des solu­tions mis­es en avant par le Groupe d’experts inter­gou­verne­men­tal sur l’évolution du cli­mat (Giec) dans son dernier rap­port (notre poster) pour réduire l’impact des activ­ités humaines sur le cli­mat.

Quelques heures plus tard ce mer­cre­di, le post a dis­paru du réseau social X — même si l’article appa­raît tou­jours sur le site de l’Inrae. Des pres­sions ont-elles poussé l’institut a retir­er son post ? Con­tac­té par Vert, l’institut de recherche a refusé de réa­gir : «c’est un non-sujet, nous ne répon­dons pas aux polémiques».

Plusieurs chercheur·ses ont toute­fois évo­qué à demi-mot des ten­ta­tives d’intimidation sur X. «Je suis très inquiète des pres­sions s’ex­erçant sur les insti­tu­tions académiques pour restrein­dre la com­mu­ni­ca­tion de résul­tats de la recherche, notam­ment lorsqu’ils abor­dent des enjeux de souten­abil­ité», a notam­ment alerté la cli­ma­to­logue et anci­enne co-prési­dente du Giec Valérie Mas­son-Del­motte dans une série de tweets pub­liés jeu­di.

Pho­to d’il­lus­tra­tion : Arnaud Rousseau (à droite), le prési­dent de la FNSEA et Arnaud Gail­lot, le prési­dent du syn­di­cat Jeunes agricul­teurs, le lun­di 22 jan­vi­er après leur entre­vue en soirée avec Gabriel Attal à Matignon. © Dim­i­tar Dilkoff/AFP