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COP26 : un projet de décision finale très insuffisant

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Peut mieux faire. La prési­dence bri­tan­nique a présen­té une pre­mière ébauche du texte qui doit con­clure la COP26. Celui-ci con­tient cer­taines avancées, mais les obser­va­teurs ont surtout noté des absences cri­antes.

C’est « le » texte qui est atten­du et peut don­ner lieu à l’in­ter­pré­ta­tion d’une réus­site ou d’un échec d’une COP. La « déci­sion finale » résume les inten­tions poli­tiques de l’ensemble des par­ties de la Con­ven­tion-cadre des Nations unies sur les change­ments cli­ma­tiques (CCNUCC) à l’is­sue de deux semaines de dis­cus­sions. Elle doit s’ap­puy­er sur un con­sen­sus. Or, il n’est pas facile d’y par­venir à 197 par­ties, d’où des ambi­tions sou­vent mesurées.

Dévoilé mer­cre­di, le pre­mier jet donne un aperçu du bilan atten­du pour dimanche. Pour la pre­mière fois de l’his­toire des COP, le texte men­tionne les éner­gies fos­siles et la fin de leurs sub­ven­tions. Mais seule la sor­tie du char­bon est évo­quée, rien n’est dit sur le pét­role et le gaz. Le texte réaf­firme l’ob­jec­tif de l’Ac­cord de Paris de lim­iter bien en-deçà de 2°C le réchauf­fe­ment cli­ma­tique d’i­ci la fin du siè­cle et de pour­suiv­re l’ob­jec­tif de ne pas dépass­er 1,5°C. La réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre de 45 % d’i­ci 2030 par rap­port à 2010 est inscrite noir sur blanc, ain­si que l’ob­jec­tif d’atteindre la neu­tral­ité car­bone d’i­ci le milieu du siè­cle. Toutes les par­ties sont aus­si invitées à « réac­tu­alis­er à la hausse leurs objec­tifs à 2030 de façon à s’align­er avec l’Ac­cord de Paris d’i­ci la fin de l’an­née 2022 ».

Mais « le texte ne reflète pas encore assez l’ur­gence d’a­gir », analyse Aurore Math­ieu, respon­s­able des poli­tiques inter­na­tionales au Réseau Action Cli­mat, qui regroupe une trentaine d’organisations français­es. Le brouil­lon de la déci­sion « ne répond pas vrai­ment à com­ment on va main­tenir l’ob­jec­tif de 1,5°C de réchauf­fe­ment et notam­ment à la façon dont on va agir à court terme pour main­tenir cette ambi­tion ». Pour elle, il y a aus­si « un déséquili­bre très inquié­tant entre la place accordée à l’am­bi­tion et celle accordée à l’adap­ta­tion et aux pertes et dom­mages » (notre arti­cle à ce sujet). 

Sur ce point, la pilule est dure à avaler pour les pays les plus vul­nérables. « S’il y a main­tenant une référence aux pertes et dom­mages, on retrou­ve la super­fi­cial­ité habituelle de l’ONU. Il n’est aucune­ment men­tion de la créa­tion d’un nou­veau mécan­isme pour faire face à la crise », a déclaré mer­cre­di Tere­sa Ander­son, coor­di­na­trice de Action­Aid Inter­na­tion­al et mem­bre du réseau d’as­so­ci­a­tions Cli­mate Action Net­work.

Côté finance­ments, « le texte est large­ment insuff­isant par rap­port à tout ce qu’on a enten­du depuis 10 jours de la part des pays en développe­ment », déplore Armelle Le Comte, chargée de plaidoy­er à Oxfam France. Certes, les par­ties « regret­tent » que le « fonds vert » dédié à l’adaptation au change­ment cli­ma­tique des pays en développe­ment n’ait pas été abondé de 100 mil­liards de dol­lars chaque année depuis 2020, comme promis (Vert). « Mais il n’y a pas d’en­gage­ment à com­penser chaque année de retard », ajoute Armelle Le Comte, ni à aug­menter ces finance­ments. « Plus générale­ment, il n’y a rien non plus sur le fait qu’une grande par­tie de tous les finance­ments cli­mat annon­cés sont sous la forme de prêts, qui vien­nent alour­dir la dette des pays pau­vres. »

Bilan glob­al de ce brouil­lon ? « Ce pro­jet d’ac­cord n’est pas un plan pour résoudre la crise cli­ma­tique […]. C’est une demande polie pour que les pays en fassent peut-être, éventuelle­ment, plus l’an­née prochaine. Ce n’est pas suff­isant et les négo­ci­a­teurs ne devraient même pas penser à quit­ter cette ville avant d’avoir con­clu un accord qui réponde aux besoins du moment », juge Jen­nifer Mor­gan, direc­trice exéc­u­tive Green­peace Inter­na­tion­al. La ver­sion défini­tive est atten­due dimanche.