Solaire de rien. Cette semaine, la journaliste de Vert revient sur un chiffre choc brandi par l’extrême droite : les énergies renouvelables coûteraient 300 milliards d’euros à la France. Pour que l’État récupère le pactole, la solution serait simple, arrêter d’investir dans l’éolien ou le solaire. Spoiler, ça n’est pas une bonne idée. Cliquez ici pour (ré)écouter cette chronique diffusée sur France inter, mercredi 4 juin.
Mathieu Vidard : Anne-Claire, aujourd’hui vous nous parlez du coût des énergies renouvelables, qui serait ruineux selon certains…
Oui Mathieu, je ne sais pas si vous êtes au courant mais la France n’a plus trop de sous en ce moment ! Il paraîtrait que nous avons vécu au-dessus de nos moyens et, maintenant, il faut trouver 40 milliards d’euros à économiser d’ici à l’année prochaine.
Si je vous en (re)parle, c’est parce que ça fait plusieurs semaines que des élus à droite et à l’extrême droite affirment avoir trouvé LA source de dépenses inutile et couteuse dont on devrait se passer dès maintenant.
Cette source, ce sont les énergies renouvelables, avec un chiffre choc à la clé, 300 milliards d’euros. En gros, leur message est le suivant : si on continue comme ça, on va ruiner la France en subventions aux éoliennes et au solaire. Inversement, si on arrête maintenant, on récupère 300 milliards.
Et c’est vrai ça ?
Non, ce n’est pas la peine de faire durer le suspense plus longtemps : ce chiffre, il est complètement faux… ou plutôt, il est inspiré de chiffres bien officiels, mais qui ont été volontairement mal interprétés. C’est le principe d’une fake news, en fait.
Alors, qu’est-ce qui ne va pas dans ces 300 milliards ?
Déjà, ce ne sont pas 300 milliards «par an», comme le laissent entendre certains. Ce ne sont pas non plus 300 milliards sur une période donnée. En fait, c’est un amalgame entre 200 milliards d’euros d’ici à 2040 d’un côté, et 100 milliards d’ici à 2060 de l’autre.
Je m’explique : les 200 milliards d’ici à 2040, c’est de l’argent que les gestionnaires de réseaux ont prévu d’investir dans leurs lignes électriques. Il y en aura un peu pour raccorder les fermes solaires et éoliennes mais, 80% de cette somme, c’est tout simplement l’entretien : le renouvellement des lignes électriques qui vieillissent, le raccordement des nouveaux consommateurs… bref, des dépenses qui doivent avoir lieu, énergies renouvelables ou pas.
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Ensuite, il reste les 100 milliards d’euros d’ici à 2060. Ça, c’est le coût maximum que pourraient coûter les subventions aux énergies renouvelables. C’est un scénario qui existe. Mais il y aussi un autre scénario, tout aussi officiel, qui dit que les énergies renouvelables pourraient rapporter de l’argent au cours de cette même période.
Comment est-ce possible ?
L’explication réside dans la façon dont on subventionne les énergies renouvelables en France. L’État garantit aux producteurs un certain prix de vente de leur énergie et si les coûts de l’électricité sont plus bas sur les marchés, il leur paie la différence. En revanche, s’ils sont plus haut, alors ce sont les producteurs qui reversent leurs recettes à l’État. Ça s’est déjà produit par le passé, et ce n’est pas du tout impossible que ça se reproduise à l’avenir.
Donc les énergies renouvelables ne vont pas coûter 300 milliards d’euros, et pourraient même nous rapporter de l’argent. C’est ça ?
Oui ! Et la dernière chose qu’oublie de dire l’extrême droite, c’est que ces énergies renouvelables remplacent les énergies fossiles qui, elles, coûtent vraiment très cher. Elles coûtent cher d’un point de vue climatique, bien-sûr, mais aussi financier. L’année dernière, ça nous a coûté 64 milliards d’euros d’importer du gaz et du pétrole de pays pas toujours amis, si vous voyez ce que je veux dire.
La conclusion, c’est que si on veut s’épargner un désastre climatique ET financier, ce n’est certainement pas sur l’extrême droite qu’il faut compter !