À Paris, la Cité des sciences et de l’industrie vient d’inaugurer une exposition permanente dédiée à l’urgence climatique. Ce parcours interactif entend donner des pistes d’action pour un mode de vie décarboné. Reportage.
Un immense globe suspendu qui s’illumine de rouge et de bleu au gré d’une tablette interactive : c’est la première chose que l’on repère en arrivant sur le vaste plateau de la Cité des sciences dédié à l’exposition «Urgence climatique». À partir des scénarios du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), ce globe projette les évolutions de températures, de précipitations ou du niveau des océans au fil des années.
Inaugurée ce mardi, cette nouvelle exposition permanente veut sensibiliser le public à la décarbonation et à l’adaptation de nos sociétés aux dérèglements climatiques. «L’objectif est de montrer que si l’on souhaite que les jeunes de demain puissent s’adapter sans trop de difficulté, c’est aujourd’hui qu’il faut agir», raconte à Vert Jean Jouzel, paléoclimatologue et commissaire scientifique de l’exposition. «On essaye de faire le lien entre notre mode de vie de tous les jours et la façon dont il affecte le climat.»
Une exposition interactive et éco-conçue
Le parcours ludique et interactif, qui s’étale sur 2 000 mètres carrés, se divise en trois séquences : «Décarbonons», pour comprendre les enjeux de réduction des gaz à effet de serre, «Anticipons», pour explorer les scénarios d’avenir et les effets du changement climatique, et «Agissons», pour se mobiliser à l’échelle individuelle, comme collective.
L’exposition, réalisée avec de grandes structures en bois, se veut éco-conçue. L’usage des écrans et du plastique a été limité et l’ensemble des matériaux utilisés pourra être réutilisé au besoin. «On a essayé de faire une expo sobre, en prenant en compte le cycle de vie de tous les matériaux», détaille Adrien Stalter, commissaire de l’exposition. L’équipe a d’ailleurs réalisé un bilan carbone du projet – 330 tonnes d’équivalent-CO2 depuis le début de sa création, en 2020.
En déambulant à travers les différents espaces, on est surpris·es par la diversité des formats utilisés pour raconter l’urgence climatique. Ici, des cônes de laine colorée de tailles diverses dévoilent les émissions de gaz à effet de serre associées à la production de plusieurs aliments : 27 kgs de CO2eq pour un kilogramme de bœuf, 9 kgs pour le poisson, 2 kgs pour le riz, et 0,3 kg pour la pomme de terre (l’aliment le plus vertueux de la liste !).
Là, un jeu de l’oie à taille humaine interroge la capacité des visiteurs à modifier leur manière de se déplacer pour atteindre la neutralité carbone, à partir des différents scénarios de l’Ademe (notre article). Plus loin, une tablette géante qui fait office de table de restaurant invite à s’asseoir et choisir un menu. À la fin du «repas», un bilan carbone des aliments sélectionnés remplace la traditionnelle addition. «On a beaucoup réfléchi à comment mettre en scène les différents contenus pour faire passer le message efficacement», confirme Adrien Stalter.
L’engagement, l’incontournable de l’exposition
Interviews vidéo d’expert·es, datavisualisations, planches de bédés ponctuent le parcours afin de vulgariser les sujets les plus retors, dont l’Accord de Paris sur le climat, ou le Giec. L’enjeu : trouver un juste équilibre pour transmettre la gravité de la situation sans tomber dans le fatalisme et l’éco-anxieté. De nombreuses solutions (l’agro-écologie, les énergies renouvelables, etc) et des porteur·ses de projets sont mis·es en lumière. L’engagement constitue le fil rouge de l’exposition, qui veut insuffler l’envie d’agir.
Si l’exposition fait la part belle aux actions individuelles, elle rappelle aussi que la décarbonation de la société dépendra en grande partie des choix de nos décideur·ses et invite à politiser le sujet. Plusieurs contenus sont dédiés au mouvement pour le climat et au parcours de militant·es écologistes en France et à travers le monde. «J’aimerais qu’à la sortie, les visiteurs repartent en ayant envie de s’engager, peu importe comment», espère Jean Jouzel.
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