La quotidienne

Une loi climat « 100 filtres »

Triche ou Twitch ? Quand le débat s'exfiltre face à une loi 100 filtres.


80 heures de « débat sans filtre » sur la loi climat

A l'heure de l'examen du projet de loi « climat et résilience » à l'Assemblée nationale, elles et ils s'estiment muselé•e•s par la majorité ; dix député•e•s du collectif Écologie Démocratie et Solidarité (EDS) ont lancé leur contre-débat sur le réseau social Twitch.

Sur un coin de l'écran, la séance parlementaire retransmise en direct. Sur un autre, des questions qui arrivent en cascade. Au centre, un•e ou plusieurs député•e•s qui s'improvisent commentateur•rice•s, lancent des jingles et jonglent avec les réactions des internautes. Depuis lundi, 16 heures, et jusqu'au 16 avril prochain, Delphine Batho, Matthieu Orphelin ou encore Cédric Villani investissent Twitch pour un débat parlementaire d'un autre genre : « une Assemblée hors les murs », selon les mots de leur collègue Paula Forteza.

Capture d'écran de la page Twitch "Débat sans filtre"

Les élu•e•s promettent « un débat “augmenté” où le niveau réel d’ambition des dispositions votées au fur et à mesure sera évalué, les interventions du gouvernement et des parlementaires “fact-checkées”, les amendements déclarés irrecevables ou “muets” faute de temps de parole défendus et expliqués... ». Lors de l'examen du texte en commission spéciale, plusieurs parlementaires de l'opposition s'étaient plaint•e•s du mauvais traitement réservé à leurs amendements par la majorité LREM.

De nombreux•ses expert•e•s et personnalités sont également convié•e•s à les assister dans cette tâche inédite : le chroniqueur Usul (que Vert avait reçu) s'est ainsi invité par surprise hier soir, entre la climatologue Valérie Masson-Delmotte et le réalisateur engagé Cyril Dion.

« Après les “filtres” du gouvernement, après les amendements déclarés “irrecevables” par la majorité, la Conférence des Présidents a décidé de verrouiller les débats », regrettent ces député•e•s. Alors que plus de 7 000 amendements ont été déposés sur le texte, la majorité a opté pour un examen en « temps législatif programmé » de 45 heures. Seules 50 minutes de temps de parole sont réservées à l'ensemble des député•e•s non-inscrits, dont celles et ceux du collectif EDS. Faute de pouvoir défendre leurs amendements en séance, elles et ils prévoient de les présenter sur Twitch.

 Steenwerck (Nord), la préfecture a autorisé un projet controversé d'élevage prévoyant l'installation par la société belge Leievoeders de 117 600 poulets dans deux bâtiments de 28 000 mètres carrés. Soit une densité de 21 animaux au mètre carré. Contesté localement, le projet a fait l'objet d'un avis défavorable de la commissaire chargée de l'enquête publique. Les retombées économiques seront faibles puisque l'alimentation et les œufs viendront de Belgique et les animaux, une fois engraissés, seront abattus outre-quiévrain. Ne resteront aux riverain•e•s que les nuisances, comme le raconte l'AFP

• Lundi, pour la première fois, le Népal a été contraint de fermer ses écoles en raison de la pollution atmosphériqueLe gouvernement a également appelé la population à rester chez elle et à s'abstenir de travaux de construction ou d'incinération d'ordures. La capitale, Katmandou, est actuellement classée parmi les villes les plus polluées au monde, atteignant en fin de semaine dernière des valeurs de plus de 300 à l'indice de qualité de l'air, le plus haut niveau d'alerte – AFP

Agir contre la catastrophe climatique sera (beaucoup) moins coûteux que de ne rien faire

C'est l'or de se réveiller. Interrogé•e•s dans le cadre d'un vaste sondage, des centaines d'économistes de tous les pays estiment qu'une action « immédiate et radicale » contre le changement climatique est la meilleure solution pour sauver l'économie mondiale.

On n'y pense pas assez, mais en plus de menacer la vie sur terre, le changement climatique pèse aussi... sur l'économie ! Plus précisément, si le rythme actuel du réchauffement climatique se poursuit, les dommages économiques pourraient atteindre 1 700 milliards de dollars par an d'ici 2025 et environ 30 000 milliards de dollars par an d'ici 2075, selon la médiane des projections des économistes interrogés par l'Institute for Policy Integrity de l'université de New York. Près de 2 169 économistes ayant publié au moins un article lié au changement climatique dans une « revue économique de haut niveau » ont été sollicité•e•s.

Sur les 738 répondant•e•s, 76% estiment que la croissance mondiale est menacée et 89% estiment que les conséquences économiques de l'inaction climatique viendront exacerber les inégalités de revenus entre les pays riches et les pays pauvres. Surtout, 74% d'entre elles et eux considèrent qu'une action « immédiate et radicale » est nécessaire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, alors qu'ils n'étaient que 50% à le penser lors de l'édition précédente en 2015.

Selon l'Agence internationale des énergies renouvelables (IRENA), les coûts supplémentaires liés à la transition énergétique devraient atteindre 1 700 milliards de dollars par an en 2050. Néanmoins, les économies réalisées grâce à la réduction de la pollution de l'air, à l'amélioration de la santé et à la baisse des dommages causés à l'environnement compenseraient plus que largement ces coûts.

La permanence d'une députée recouverte par les propositions de la Convention citoyenne pour le climat

Copier-coller ! En marge de l'examen du projet de loi « climat et résilience », des militant•e•s écologistes ont rappelé à leur députée le contenu des mesures proposées initialement par la Convention citoyenne pour le climat (CCC).

Elue (LREM) de Haute-Garonne, Sandrine Mörch participe à l'examen du projet de loi qui doit traduire l'ambition des 150 citoyen•ne•s de la CCC. Celui-ci reprend 46 des 149 propositions formulées en juin 2020. Hélas, malgré la promesse faite par Emmanuel Macron d'une traduction « sans filtre » de leurs mesures, seules dix d'entre elles ont été véritablement reprises telles quelles, d'après une analyse de France Info

©  ANV-COP21

Pour rappeler leur députée à l'ambition initiale des 150 et l'encourager à enrichir le texte, des militant•e•s d'ANV-COP21 lui ont préparé un mémo difficile à oublier. Dimanche 28 mars, elles et ils ont recouvert sa permanence de 146 affichettes, détaillant chacune une mesure de la Convention citoyenne. Pour les adeptes de désobéissance civile bon enfant, il reste 576 députés à encourager alors que le débat se poursuit à l'Assemblée jusqu'au 16 avril. 

"Sans filtre" : le tube qui fait tousser !

Lors de la marche pour une vraie loi climat, dimanche 28 mars, le nouveau morceau de l'artiste I AM FEZ, réalisé pour l'occasion, a résonné dans le cortège parisien. Gageons que cet audacieux featuring avec Emmanuel Macron sera le tube de l'été.

© Tristan Saramon / Vert