Chères toutes et chers tous,
Un numéro où l'on verra qu'improviser la transition énergétique, c'est risquer le ridicule comme en Belgique.

En Belgique, la sortie du nucléaire tourne à l’absurde
Lignes à haute tension. Le plat pays a mal anticipé l'arrêt de ses sept réacteurs nucléaires et va devoir recourir au gaz pour compenser.
C'était pas faute d'être au courant ! En Belgique, la sortie progressive du nucléaire – au plus tard en 2025 – est inscrite dans la loi depuis 2003. Quand la décision a été prise, l’atome fournissait 60 % de l’électricité du pays. Presque 20 ans plus tard, les sept réacteurs d’une puissance cumulée de six gigawatts représentent encore 40% du mix électrique et les énergies renouvelables ne sont que partiellement prêtes à prendre le relais. Année après année, les gouvernements successifs ont tardé à développer les capacités suffisantes. Mais ils n'ont pas non plus prévu la prolongation du parc nucléaire, construit entre 1975 et 1985. Du reste, après plusieurs incidents, les installations avaient fini par s'attirer les foudres des pays voisins, comme l'expliquait Libération dès 2016.
En décembre, alors que la nouvelle coalition gouvernementale, au pouvoir depuis octobre 2020, s'écharpait sur l'opportunité de conserver une base de nucléaire pour garantir la sécurité d'approvisionnement du pays, les patrons d'Engie (exploitant des centrales), ont remis les pendules à l'heure. « Comme nous l’avons rappelé de manière constante ces dernières années, la prolongation des deux tranches de Doel 4 et Tihange 3 ne peut s’imaginer que dans le cadre d’un projet de LTO [exploitation à long terme, ndlr] conduisant à une extension de durée de vie de 10 à 20 ans », expliquent les dirigeant.e.s dans une lettre adressée au premier ministre belge, Alexander De Croo. « Un tel projet nécessite un délai d’exécution que nous estimons à 5 ans ». En bref : circulez, c'est trop tard.

Le 23 décembre dernier, la coalition gouvernementale s'est donnée encore trois mois pour confirmer la fermeture des sept réacteurs en 2025, le temps d’examiner les alternatives. En réalité, la seule option rapide désormais est la construction d'au moins deux centrales au gaz, subventionnées par l’État. Une décision un tantinet anachronique alors que le gaz émet 490 grammes de CO2 par kilowattheure produit, contre 12 grammes pour le nucléaire ou l’éolien.

· Lundi, à l’aube, des militant·es écologistes de Greenpeace et des Amis de la Terre se sont rassemblé·es devant la Cour administrative d'appel de Paris pour apporter leur soutien aux salarié·es de la raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne).


Et pourtant, ça tourne ! Si en France, une certaine frange de la classe politique a encore du mal à se laisser convaincre, les exemples étrangers qui montrent l'intérêt de réduire la vitesse automobile en ville se multiplient. En octobre déjà, une étude britannique décortiquée par Vert avait déterminé que l'abaissement de la vitesse en ville de 50 à 30km/h entraînait une réduction de 26% des émissions de CO2. Cette fois, c'est Berlin, en Allemagne, qui en fait la preuve par l'exemple. La ville a mené une expérimentation de deux ans sur cinq boulevards fréquentés. Notamment grâce à la réduction des arrêts et redémarrages (stop and go), une baisse des émissions de dioxyde d'azote (NO2) de presque 10% sur trois d'entre eux a été observée. Une diminution a aussi été constatée sur un quatrième axe, mais les chercheur·euses n'ont pas pu l'imputer à la réduction de la vitesse. Résultat, à l'issue de l'expérience, la vitesse limite n'a pas été rehaussée à 50km/h !

En Autriche, un unique « ticket climat » pour tous les transports en commun
Un ticket pour les utiliser tous. Depuis le 1er janvier, les voyageurs autrichiens peuvent emprunter tous les transports en commun publics et privés du pays, moyennant un abonnement unique et bon marché.
Ouvertes depuis le mois d'octobre, les souscriptions à ce nouveau sésame ont déjà séduit plus de 130 000 voyageurs autrichiens, dépassant les espérances du gouvernement. Il faut dire que l'offre du Klimaticket est particulièrement attrayante puisque l'abonnement annuel est fixé à 1 095 euros par an (soit 3 euros par jour). Une ristourne de 270 euros s'applique en outre pour les voyageur·ses de moins de 25 ans, de plus de 65 ans et/ou handicapées.

La mesure s'inscrit dans le cadre du plan de mobilité adopté par la coalition écolo-conservatrice. Il vise à réduire de 16% l'utilisation de la voiture individuelle d'ici à 2040. L'objectif est qu'elle ne représente plus que 54% des kilomètres parcourus, contre 70% aujourd'hui. Parallèlement, les transports publics devraient voir leur part augmenter de 27 à 40% tandis que la marche et le vélo passeront de 3 à 6% .
La mise en œuvre du « ticket climat » n'a toutefois pas été de tout repos. Deux ans d'intenses négociations ont été nécessaires pour venir à bout des dissensus entre opérateurs de transports, mais aussi entre les différents Länder du pays. Les régions rurales ont notamment rechigné à subventionner ce mécanisme national alors que les transports publics sont moins développés dans leurs territoires. Au final, le gouvernement fédéral a déboursé 150 millions d'euros pour amorcer la machine tandis que les Länder ont apporté collectivement 100 millions d'euros, avec des contributions différenciées selon leur densité de population.

La France pourrait-elle totalement se passer des engrais chimiques ?
Engrais malgré. Précieux alliés de la révolution agricole d'après-guerre, les engrais de synthèses révèlent aujourd'hui leurs nombreux effets pervers. Mais il ne suffit pas de vouloir s'en débarrasser pour y arriver, car c'est de notre approvisionnement en nourriture qu'il s'agit. Toutefois de nombreuses pistes existent, comme le montre Le Monde dans cette vidéo.

+ Loup Espargilière et Juliette Quef ont contribué à ce numéro