La quotidienne

Ski faudrait plus faire

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Pendant que certains vont tout schuss vers l’abîme, d’autres veulent dire tschüss aux grises mines.


Ce faux printemps qui met la végétation sens dessus dessous

Le temps des c(e)rises. Alors que la France traverse un épisode de chaleur anormale, ce faux printemps a des conséquences parfois insoupçonnées sur la biodiversité, et notamment sur les végétaux.

La vigne qui bourgeonne en Occitanie, les plants de colza en début de floraison dans le Puy-de-Dôme, des fleurs sur un cerisier dans le Vaucluse… la flore est sens dessus-dessous en raison d’« une douceur persistante remarquable », des mots de Météo-France, qui lui fait croire à la fin de l’hiver.

Cet épisode inédit par sa durée et son intensité n’est pas sans effet sur la biodiversité. Les végétaux (mais aussi les animaux) répondent aux stimuli de leur environnement, dont la température, pour décider de la reprise des activités après la période de dormance. Dupés par les températures anormales, certains, comme l’abricotier précoce ou la menthe, considèrent qu’il est temps d’ouvrir les bourgeons et de sortir d’hivernation.

Les végétaux répondent à la température mais aussi à la durée du froid subi chaque année. Entre l’épisode de froid de début décembre et la douceur anormale de janvier, de nombreux végétaux sont désorientés.

Ces épisodes de douceur peuvent se révéler aussi dangereux que les canicules ou les sécheresses estivales. En cas de gel tardif, les fleurs et les feuilles ne sont plus protégées par les bourgeons, et risquent ainsi de brûler. En avril 2021, un épisode de gel avait causé plus de quatre milliards d’euros de dégâts (Le Parisien). « Une sécheresse et une canicule peuvent faire plusieurs milliards d’euros de dégâts, on est vraiment dans les mêmes échelles. Et pourtant, on en parle beaucoup moins », explique à Vert l’agroclimatologue Serge Zaka.

« Le problème, c’est que les événements de douceur hivernale sont agréables pour l’Homme. Et comme on ne voit pas l’impact sur la biodiversité avant plusieurs mois, on ne se rend pas compte que c’est une bombe à retardement », détaille l’expert.

Cette situation bouleverse les récoltes : les agriculteur·rices avancent les dates de semis et de ramassage ou adaptent les variétés plantées. En pleine nature, ces phénomènes extrêmes peuvent, à long terme, fragiliser et entraîner la mort des écosystèmes.

· Mardi, des centaines de milliers de sardines et de chinchards ont été retrouvés morts sur les plages de la baie de Douarnenez (Finistère), a rapporté Ouest-France. Une enquête a été ouverte pour déterminer la cause des échouages, mais les autorités estiment que ces derniers pourraient être naturels. L’association Sea Shepherd, qui soupçonne des rejets illégaux de bateaux de pêche, a annoncé avoir porté plainte contre X. - Libération

· Jeudi, les Émirats arabes unis ont officialisé la nomination du PDG pétrolier Sultan Al Jaber comme président de la 28ème conférence des Nations unies (COP28) sur le climat. Interrogée par Le Monde, la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a salué « son poids politique fort et [sa] stratégie de décarbonation pour son pays ». Retrouvez notre portrait de cette figure controversée et révélatrice de la stratégie climatique de l’État pétrolier sur vert.eco  

· Jeudi matin, le chasseur qui avait tué Morgan Keane dans son jardin en décembre 2020 (notre article) a été condamné par le tribunal correctionnel de Cahors (Lot) à deux ans de prison avec sursis et au retrait définitif de son permis de chasse. Le directeur de la battue a écopé d’une peine de dix-huit mois avec sursis et d’une interdiction de repasser son permis de chasse dans les cinq ans. Le procès avait révélé de nombreux manquements à la sécurité au cours de la battue. - La Dépêche du Midi

Un zadiste de Lutzerath face à la police venue le déloger. À quelques mètres, la mine de Garzweiler II © Rob Engelaar/ANP

Lutzerath au court bouillon. Mercredi, la police a démarré l’évacuation de la zone à défendre (Zad) qui s’est installée à Lutzerath, près de Cologne (Allemagne). Vidé de ses habitant·es il y a plusieurs mois, ce village doit être rasé pour étendre la colossale mine de charbon à ciel ouvert de Garzweiler II, exploitée par RWE. Certain·es des centaines d’opposant·es à ce projet néfaste pour le climat se sont hissé·es sur des poteaux et câbles électrique, sur les toits des cabanes ou des maisons du village, pour empêcher la police de les déloger. Au vu de la vive opposition sur place, l’opération devrait durer au moins plusieurs semaines.

Le ski peut-il être écologique ?

Ski faudrait faire. De plus en plus gourmand en ressources à cause du réchauffement climatique, alors qu’il est pratiqué par une poignée de Français·es, le ski peut-il se révéler compatible avec des modes de vie plus sobres ?

Avec le changement climatique, la température moyenne à la surface du globe augmente et la limite pluie-neige - l’altitude à partir de laquelle la pluie se transforme en neige - remonte. Pour sauver le ski alpin, dont elles tirent l’essentiel de leurs revenus, les stations se dotent de canons à neige et recouvrent les pistes de poudre artificielle. Ceux-ci nécessitent 3 000 mètres cubes d’eau pour un hectare de piste, selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), et parfois la construction de retenues collinaires.
 

Le ski, une activité vraiment polluante ?

« Au départ, le ski est une activité de déplacement en milieu enneigé qui vient des pays scandinaves, explique à Vert Loic Giaccone, chercheur associé au laboratoire de Georgetown (États-Unis) sur le changement climatique et les inégalités économiques. Avec des remontées qui perturbent la faune et la flore, l’anthropisation des stations avec la construction de logements, les usages en ressources, en énergie, les déchets, etc., l’industrie du ski a un fort impact sur la montagne ».

Des canons à neige sur les pistes de la station de Villard-Corrençon, en Isère. © Parisdreux / Wikimedia

« Le ski, tel qu’il est pensé actuellement, ne peut pas être écologique », corrobore Valérie Daumier de l’association Résilience montagne. Elle propose de travailler sur quatre leviers pour rendre les stations durables : favoriser le train et le bus pour les voyageur·ses, décarboner le chauffage des habitations, diminuer le damage et geler les constructions. Certaines stations font déjà des efforts et douze d’entre elles ont été récompensées par le label « Flocon vert » de l’association Mountain riders.
 

Vers un tourisme durable ?

Dans un guide publié ce mardi, l’Ademe propose des solutions pour limiter son impact à la montagne. 57% des émissions de gaz à effet de serre d’un séjour au ski proviennent des transports contre 2% seulement pour le ski lui-même, ses canons à neiges et remontées mécaniques. Troquer la voiture, et a fortiori l’avion, contre des modes de transports doux comme le train, et voyager moins loin, louer plutôt qu’acheter du matériel, peut ainsi améliorer l’empreinte environnementale de son séjour. « Appréhender le ski de manière écologique, conclut Loïc Giaccone, ce serait sortir de la dimension touristique, repenser des modes de vie locaux et faire vivre les activités ancestrales en montagne ». Un bouleversement en forme d’avalanche.

Les votes sont ouverts jusqu’à demain matin et les résultats seront donnés dans l’édition de vendredi. N'hésitez pas à nous envoyer vos questions les plus brûlantes en répondant à ce formulaire, tout simplement. À vos claviers !

Le top 10 du greenwashing par Limit

On veut du green, green, green. Carburant « neutre en carbone » de Shell, coupe du monde « écologique » de la Fifa au Qatar, projet « The line » - aussi connu sous le nom de Neom - de ville « zéro carbone » en plein désert d’Arabie Saoudite… Le média vidéo Limit du Belge Vinz Kanté liste ses dix meilleurs exemples de greenwashing sur un rythme cadencé et avec plein d’humour.

© Limit

+ Loup Espargilière et Juliette Quef ont contribué à ce numéro.