La quotidienne

Plaquer le pétrole

Chères toutes et chers tous,

🌱 C'est le grand retour du Vert du faux ! Ce jeudi, nous vous proposons de choisir entre deux sujets proposés par les lectrices et lecteurs de Vert. Puis, nous répondrons à celui que vous aurez retenu la semaine prochaine. À vos votes !

🎂 Ce jeudi, la Charte pour un journalisme à la hauteur de l'urgence écologique, initiée par Vert, fête son premier anniversaire. C'est grâce à votre soutien que nous pouvons nous engager dans de tels projets, qui nous permettent de contribuer à transformer le paysage médiatique. Merci et bravo à vous !


Le Mondial de rugby s’est jeté dans la mêlée mais ses sponsors pétroliers l’empêchent de transformer l’essai.


D’un été incendiaire à l’autre, le paysage médiatique a accéléré sa mue

La Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique souffle sa première bougie ce jeudi. Le monde médiatique aura-t-il basculé en un an ?

Le constat initial était le suivant : on parle trop peu et mal de climat dans les médias. Résultat, les citoyen·nes sont mal informé·es, et prennent potentiellement de mauvaises décisions. Pour tenter d’y remédier, un collectif d’une trentaine de journaliste - dont ceux de Vert - a élaboré cette charte ; une sorte de boussole en 13 points pour permettre aux journalistes de mieux traiter l’actualité à la lueur de l’urgence écologique.

Son lancement, il y a un an, a provoqué une grande conversation dans le monde des médias. Depuis, la charte a été signée par 1 800 journalistes, ainsi que 200 médias, écoles, associations et syndicats.

Hélas, Pascal Praud n'a pas encore signé la charte © Vert

Chez les autres, une foule de chartes du même genre (plus ou moins ambitieuses) sont nées depuis, de Ouest-France au Monde, en passant par France télévisions et TF1. Beaucoup de groupes de presse ont lancé des plans de formation (plus ou moins ambitieux, là aussi) de leurs journalistes, dont Bayard (Phosphore et Okapi), France Médias Monde (RFI et France 24) ou le Parisien.

L’ensemble des écoles de journalisme reconnues l’ont également signée, dont l’ESJ Lille ou l’Ijba de Bordeaux, qui ont intégré les enjeux écologiques à la formation de leurs futurs journalistes.

Malgré toutes ces avancées, la majorité de la population française est toujours très peu au fait de la gravité de la crise et des solutions qui existent. Pis, à cause de médias pyromanes comme le Figaro ou Cnews, nous assistons à un retour dans le débat public des climatosceptiques les plus bas du front que l’on croyait enterrés pour de bon.

Un an après, les rédacteurs de la Charte continuent de s’engager pour former leurs confrères et consœurs et transformer le paysage médiatique. À toutes et tous les journalistes de bonne volonté, il est encore temps de rejoindre le mouvement et de signer la charte. Même vous, le Figaro !

· Au dernier bilan, daté du 8 septembre, 40 000 personnes réparties dans 189 communes françaises étaient privées d’eau courante à cause de la sécheresse, a annoncé Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, dans un entretien accordé à Libération ce jeudi. La situation est toutefois moins mauvaise que l’année dernière : à la même période, 700 communes n’avaient pas d’eau au robinet. - Libération

· Après l’inondation qui a meurtri la ville libyenne de Derna dans la nuit de dimanche à lundi, le nombre de personnes tuées pourraient atteindre 18 000 à 20 000, soit un·e habitant·e sur cinq, selon le maire de la commune interrogé par la chaîne de télévision Al-Arabiya. Mercredi, le porte-parole du ministère de l’Intérieur du gouvernement en place, Tarek Al-Kharraz, annonçait plus de 3 800 décès déjà enregistrés. - Le Monde

· Nous assistons au «début de la fin» de l’ère des combustibles fossiles, a annoncé l'Agence internationale de l'énergie mercredi. Dans une tribune au Financial Times, son directeur, Fatih Birol, a indiqué que la demande en énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon - les principaux moteurs de la crise climatique), devrait atteindre son pic historique d’ici à 2030 avant de décroître. - Le Courrier international

© Stockholm resilience center

Limite limite. Six des neuf «limites planétaires» ont été franchies et deux supplémentaires sont en passe d’être dépassées, conclut une étude internationale publiée dans la revue Science ce mercredi. Définies en 2009 par le Stockholm resilience centre, ces limites planétaires sont des variables identifiées comme des seuils à ne pas dépasser dans plusieurs domaines, afin d’assurer la stabilité des écosystèmes et l'habitabilité de la Terre. Parmi elles, les niveaux tolérables en matière de changement climatique, d’intégrité de la biodiversité, d’utilisation de l’eau douce, de modification des usages des sols, d’équilibre du cycle de l’azote et du phosphore et de pollution chimique ont déjà été surpassés. L'acidification des océans et la concentration de particules fines dans l’atmosphère (autrement dit la pollution de l’air) approchent dorénavant les seuils limites. «La Terre est désormais bien au-delà de l’espace d’exploitation sûr pour l’humanité», pointent les chercheur·ses. Seule la limite concernant l’état de la couche d’ozone reste bien en-dessous du seuil d’alerte.

Coupe du monde de rugby : événement à «impact positif» ou greenwashing ?

Rugby or not to be. Les organisateurs de la Coupe du monde de rugby ont promis d’en faire une compétition «à impact positif sur la société et sur la planète». Malgré des efforts certains, ces engagements sont parfois trop ambitieux pour être réalistes. Et certains sponsors, comme TotalEnergies ou la Société générale, très gênants.

Tout le monde a vu les images des All Blacks descendre d’un TGV, quelques jours avant le match d’ouverture de la Coupe du monde contre les Bleus. Ce n’était pas qu’un coup de com’, mais bien le reflet d’une politique assumée de la part du comité d’organisation. Pour faire du train le mode de transport le plus utilisé, il a déterminé certaines règles : les déplacements réalisables en moins de 5h30 porte-à-porte, doivent se faire en train et en bus (pour les derniers kilomètres). Au moins 70% des trajets des équipes doivent passer par le rail, d’après la SNCF.

L’équipe des All Blacks arrivant à Paris Gare de Lyon mercredi 6 septembre. © Hannah Peters / Getty images via AFP

À titre de comparaison, lors de l’Euro de football 2016, dernière compétition sportive d’ampleur comparable à avoir été organisée en France, seule une équipe (la Roumanie) avait choisi le train, selon la SNCF. Si le transport des équipes peut sembler anecdotique face à celui des spectateur·ices, ce symbole normalise l’usage du rail.
 

Une empreinte carbone loin d’être anodine

Un événement d’une telle ampleur, organisé sur six semaines, avec 20 équipes et deux millions de spectateur·ices (dont 600 000 étranger·es), implique un lourd bilan carbone, estimé entre 350 000 et 650 000 tonnes de CO2, selon un porte-parole de World Rugby contacté par Vert. Une estimation plus ou moins raccord avec celle réalisée par Sami, une start-up d’évaluation d’empreinte carbone, qui les a évaluées à 640 000 tonnes de CO2 dans un vaste rapport. Cela correspond peu ou prou aux émissions annuelles de 64 000 Français·es, soit le nombre d’habitant·es d’une ville comme Valence (Drôme) ou Bourges (Cher).

Le comité d’organisation a promis de compenser les émissions de gaz à effet de serre de l'événement. Un engagement qui n’est pas acquis pour l’instant, car tout dépendra de la capacité de l’organisation à boucler leur budget pour la compensation carbone, «ce qui n’est pas le cas à date», a indiqué à Vert un porte-parole de World rugby.


Vous pouvez lire ce décryptage en intégralité, où il est notamment question des sponsors encombrants du Mondial et des réflexions pour organiser un tel événement de manière durable, en cliquant ici

Un an après le lancement de la Charte, qu’est-ce qu’on regarde pour suivre l’actualité de l’écologie ?

Voici la sélection de Vert des nouveaux programmes rafraîchissants sur l’écologie :

· Le rendez-vous quotidien de FranceInfo, «Planète info ». Chaque soir, 50 minutes pour aborder tous les sujets climat et environnement.

· Le «Journal Météo Climat» pour une mise en contexte climatique de la pluie et du beau temps.

· «Sur la Terre», un projet commun fait d’articles et de podcasts par l’AFP et The Conversation autour de l’antropocène et du journalisme de solutions.

· Le média NOWU de France Télévisions et ses contenus «inspirants» à destination des 15-25 ans.

· À revoir : le docu-événement de BFM-TV de la fin 2022, «2050, ouvrons les yeux».

Le journal météo-climat de France télévisions © France 3

+ Loup Espargilière, Jennifer Gallé et Juliette Mullineaux ont contribué à ce numéro.