Les loups solidaires


Un numéro où l'on verra que certains préfèrent chasser canis lupus, ce rappel sur pattes que la nature a des exigences, pendant que les autres rejoignent la meute des loups solidaires.

Un sommet de l'investissement fossile entre Royaume-Uni et Afrique 

L'hypocrisie atteint des sommets. Lundi 20 janvier, Londres accueillait 16 dirigeants africains lors d'un forum dédié à l'investissement entre l'île britannique et le continent. Or, en matière d'énergie, 90% des 2,5 milliards d'euros de contrats passés vont financer des projets gaziers et pétroliers en Afrique, comme vient de le calculer le Guardian.

La firme anglaise Tullow a par exemple investi 1,4 milliard d'euros dans la production de pétrole au Kenya. Par comparaison, les projets renouvelables (8% des sommes engagées) paraissent bien maigres : le plus gros contrat prévoit la construction de pompes d'irrigation alimentées par l'énergie solaire en Ouganda, pour un total de 190 millions d'euros.

Tous ces contrats fossiles ont été signés avec la bénédiction du gouvernement britannique, qui a d'ailleurs tenu secrète jusqu'à la dernière minute la liste des entreprises participantes.

Boris Johnson en compagnie du ministre des affaires étrangères du Maroc Nasser Bourita, en 2018 © Foreign and Commonwealth Office

« Nous respirons tous le même air, nous vivons sous le même ciel et nous souffrons tous quand les émissions de carbone augmentent et que la planète se réchauffe », avait pourtant prononcé le premier ministre Boris Johnson, en ouverture du sommet. Certaines voix, comme celle de la députée verte Caroline Lucas, dénoncent « une hypocrisie […] à couper le souffle ». Une hypocrisie d'autant plus grande qu'en novembre, le Royaume-Uni doit accueillir la prochaine COP26. A Glasgow (Ecosse), les Etats doivent prendre de nouveaux engagements pour réduire drastiquement leur bilan carbone. A lire dans le Guardian.

Davos se conclut (sans surprise) dans l'indifférence climatique

Demander aux responsables de la crise climatique d'y répondre : c'était le pari osé de Greta Thunberg et d'autres jeunes militants écologistes lors du Forum économique mondial de Davos (Suisse), qui s'est achevé vendredi 24 janvier. Hélas, les activistes n'ont pas été entendus par les dirigeants politiques et chefs de multinationales qui avaient pourtant promis de faire de l'écologie la question centrale du Forum. 

« Beaucoup de gens nous ont demandé des “revendications précises”et des “choses à faire”pour lutter contre la crise climatique en cours, a expliqué Greta Thunberg sur Twitter. Nous avons listé nos revendications et celles-ci ont été complètement ignorées. Mais on ne s'attendait pas à autre chose. »

Jeudi, le secrétaire du Trésor américain, Steven Mnuchin, avait suggéré à l'activiste suédoise d'aller à l'université pour prendre des cours d'économie plutôt que de prôner le désinvestissement. Le nouveau cheval de bataille de Greta Thunberg que Vert avait expliqué.

Un "vendredi pour le climat" à Davos, le 24 janvier  © Compte Twitter de Greta Thunberg

« Pas besoin d'un diplôme d'économie » pour voir qu'entre le CO2 que le monde peut encore émettre avant de dépasser les 1,5°C de réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle, et les subventions et investissements en cours dans les énergies fossiles, « ça ne colle pas », a répliqué Greta Thunberg, qui a achevé son séjour en Suisse par une bonne vieille grève pour le climat. A lire sur le site de France Info.

Six Français sur dix menacés par un sinistre lié au climat

En fin de semaine dernière, par chance, la tempête Gloria est passée à travers l'Aude et les Pyrénées-Orientales sans faire de victimes. Cependant - c'est une conséquence du dérèglement climatique, de tels événements météorologiques extrêmes se multiplient depuis quelques années en France, comme l'a expliqué le ministère de la transition écologique dans une étude publiée la semaine dernière. 

Le nombre d'« événements climatiques dommageables » (au moins 10 morts et plus de 30 million d'euros de dégâts) a déjà plus que triplé en vingt ans : on en recense 3,6 par an entre 1997 et 2017 contre 1 par an auparavant.

©Ministère de la transition écologique

Selon l'étude, 6 Français•e•s sur 10 vivent dores et déjà sous la menace d'un sinistre lié au dérèglement du climat. Principaux risques : les inondations et glissements de terrain, suivies (de loin) par les feux de forêts ou encore, les avalanches. A lire dans les Echos
 

Ni “pour”, ni “contre“, mais “avec“ le loup

Le loup divise comme peu de sujets en France. Ou plutôt, c'est peut-être ce que quelques-uns voudraient faire croire.

Il faut dire que certains chiffres sont éloquents : revenu en France en 1992 depuis l'Italie, le loup compte désormais 500 individus. Et en 2017, les canidés ont fait près de 12 000 victimes parmi les élevages français.

Le débat, très affectif au sujet de cette bête qui alimenta certaines légendes comme celle de la bête du Gévaudan, semble impossible à poser de manière sereine. Ces dernières années, celles et ceux qui ont le malheur de tolérer sa présence ont subi dégradations, violences et menaces de mort.

Le documentariste Jean-Michel Bertrand, dont le film Marche avec les loups est sorti début janvier, a indiqué avoir reçu des lettres d'insultes et de menaces ; soutien indirect du film, la région Auvergne-Rhône-Alpes a retiré son logo de l'affiche du film. Son président, Laurent Wauquiez, est officiellement du côté des éleveurs, comme le raconte le Point

Selon le philosophe Baptiste Morisot, interrogé par le Monde, les agissements violents et le lobbying anti-loup sont le fait d'une minorité, qui applique également une pression sur les bergers les plus cléments et diplomates, ceux « qui ne sont ni pour ni contre le loup, mais voudraient faire avec. […] la vérité est que beaucoup d’éleveurs et de bergers veulent et peuvent protéger les troupeaux. »

Peut-être, interroge encore le Monde, le loup est-il « le parfait révélateur de nos difficultés à gérer notre rapport à l’environnement et à la nature », des mots de Farid Benhammou, géographe de l’université de Poitiers cité par le quotidien. Le loup est un rappel fait aux humains que la nature a ses exigences. A lire dans le Monde.

La sucess-story du loup dans le parc de Yellowstone

Totalement éradiqué au milieu des années 1920 pour les mêmes raisons qu'en France, le loup a été réintroduit il y a 25 ans dans le parc de Yellowstone aux Etats-Unis. Et c'est un franc succès.

Comme le raconte le Guardian, après sa disparition, tout l'écosystème du parc, inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, s'en était retrouvé sens dessus dessous. Les populations de coyotes ont explosé. Comme celles d'élans, qui ont alors fait décliner saules et peupliers. Avec ces derniers, les oiseaux se sont étiolés, les castors se sont retrouvés à cours de bois, etc.

Une meute de loups dans le parc de Yellowstone ©Doug Smith - Wikipedia

En 1995, des loups ont été rapportés à Yellowstone depuis le Canada. En vingt ans seulement, les populations de saules, peuliers, oiseaux et castors se sont remis d'aplomb. « Il y a probablement une myriade d'autres effets que nous n'avons pas encore découverts », explique Doug Smith, biologiste sénior aux commandes du projet depuis le début, interrogé par le Guardian. Et pour ceux qui aiment raisonner en termes sonnants et trébuchants : la réintroduction du canidé aura coûté moins cher au total que ce que le tourisme autour du loup rapporte chaque année. A lire dans le Guardian.

Le loup, de Jean-Marc Rochette

Un berger, un loup, une traque. Dans Le loup, bande dessinée de Jean-Marc Rochette parue en mai 2019 chez Casterman, on suit un duel à distance sur plusieurs années entre ces deux ennemis légendaires.

Une œuvre puissante au dessin vivant et ciselé qui questionne notre rapport à la nature et au sauvage, suivie d'une riche postface du philosophe Baptiste Morisot.

Mettre les couches au compost

Nos rejetons ne marchent pas encore qu'ils saccagent déjà la planète. Chaque année, plus de 3 milliards de couches sont jetées en France. Pour remédier à cette gabegie, une start-up propose de les mettre au compost

Dans le cadre d'une expérimentation baptisée « les couches fertiles », l'entreprise « les alchimistes » récupère les langes usagées d'une crèche parisienne pour les envoyer en Seine-Saint-Denis. Elles y passent au tamis de machines qui séparent urine, matières fécales et plastique, du cellulose, le coton qui tapisse les couches. Ce qui reste est mélangé à des déchets alimentaires et à du broyat de bois. Le tout macère ensuite comme du compost (presque) lambda.

Pour des raisons sanitaires, le compost de couches-culottes ne peut pas encore être vendu ou utilisé. L'enjeu pour l'entreprise sera de répondre aux doutes quant à l'impact potentiel sur la santé d'un tel produit et de lever les barrières règlementaires. Autre solution, qui a fait ses preuves par le passé : les couches lavables pourraient régler le problème de manière plus certaine. A lire sur le site de France Inter.

La résistance s'organise contre le « populisme vert »

« Face au populisme vert, tout discours rationnel sur l'écologie est interprété comme un renoncement », a expliqué pour se défendre Brune Poirson, la secrétaire d'Etat à la transition écologique, dont le gouvernement est accusé d'en faire si peu pour l'environnement. « Ça nous rappelle les heures les plus sombres de Nature & découvertes. La menace est terrible, des hippies surentraînés, ultra-disciplinés, le petit doigt sur la couture du sarouel », confirme Guillaume Meurice. L'humoriste de France Inter est parti, à ses risques et périls, à la rencontre de celles et ceux prêt•e•s à rejoindre la résistance qui s'organise.

© France Inter