La quotidienne

Les Etats crament

Pour éteindre l'incendie dans un monde qui s'embrase, ce sera dur, mais il nous faut faire nos adieux aux hydrocarbures.


Le monde pourrait compter 216 millions de réfugiés climatiques d'ici 30 ans

C'est chaud. Sous l'effet du réchauffement, 216 millions de personnes pourraient être poussées à l'exil dès 2050, alerte la Banque mondiale.

Problème de disponibilité en eau - notamment potable, montée des mers, production agricole qui décline... le réchauffement menace de s'abattre de plus en plus durement sur les pays pauvres. Dans un rapport paru lundi, la Banque mondiale, vaste organisation internationale spécialisée dans le financement des projets de développement, a tenté d'anticiper les évolutions liées au climat dans 106 pays issus de six régions du globe.

Si les émissions mondiales continuent de croître fortement (selon le scénario RCP8.5, le plus pessimiste du Giec), l’Afrique subsaharienne pourrait enregistrer pas moins de 85,7 millions de migrants climatiques internes d'ici 30 ans, soit 4,2 % de la population totale ; l’Asie de l’Est et Pacifique, 48,4 millions ; l’Asie du Sud, 40,5 millions ; l’Afrique du Nord, 19,3 millions ; l’Amérique latine, 17,1 millions. En moyenne, 3% de la population de ces régions serait contrainte de s'exiler pour subsister.

Déplacées à cause de violentes inondations qui ont submergé leur village, des femmes viennent se ravitailler en eau dans un camp de réfugiés situé dans les environs de Thatta, au Pakistan (en 2010). © Banque asiatique de développement

Le rapport prédit qu'à partir de 2030, des foyers d'émigration climatique apparaîtront à l'intérieur des pays, et s'intensifieront progressivement. Par exemple, dans la sous-région du bas Mékong, « l’élévation du niveau de la mer, accentuée par les ondes de tempête, devrait créer des foyers d’émigration climatique dans certaines plaines côtières densément peuplées, comme le Delta du Mékong (Viêt Nam) ». La montée des eaux y menace la production de riz, l'aquaculture et la pêche.

Loin d'être alarmiste, la Banque mondiale indique que le chiffre de 216 millions constitue « une estimation prudente ». Le rapport ne se base que sur les effets liés à une évolution lente du climat, faute de pouvoir anticiper les accélérations dues au franchissement de points de bascule (Vert). A contrario, insiste l'institution, une réduction drastique des émissions de CO2 conforme au scénario le plus optimiste du Giec permettrait de réduire le nombre de personnes déplacées à 44 millions.

• En ce début de semaine, près de 1 000 pompiers sont toujours mobilisés pour tenter d'éteindre l'incendie-monstre qui ravage l'Andalousie, région du sud de l'Espagne. 7 400 hectares brûlés, 2 600 personnes évacuées : il s'agit de l'un des feux les plus importants des dernières années dans le pays. - The Guardian

En Norvège, la gauche pro-industrie pétrolière remporte les élections législatives et revient au pouvoir. Avec leur bon résultat, les travaillistes pourraient effectuer une coalition avec leurs alliés historiques (Parti du centre et Parti socialiste), en se passant de l'appoint des formations écologistes du Parti de l’environnement et des Verts, qui réalisent de faibles scores. Ces dernières avaient fait campagne pour la fin prochaine de l'exploitation pétrolière dans le pays, qui figure parmi les premiers exportateurs mondiaux. - La Croix (AFP)

L'usine Orca, projet des sociétés Climeworks et Carbfix. © Carbfix

Nous voilà sauvés ! La plus grosse pompe à dioxyde de carbone (CO2) du monde a été mise en activité le 8 septembre en Islande. Avec ses gros tuyaux, Orca aspire le carbone présent dans l'air, le mélange à de l'eau pour en faire de la pierre, et l'enfouit sous terre. Objectif : retirer 4 000 tonnes de CO2 par an de l'atmosphère. Soit l'équivalent des émissions de quelques maigres centaines de voitures pour un coût de construction qui atteint... 10 à 15 millions d'euros, selon Bloomberg. Hélas pour les « technoptimistes », pour que cette technique balbutiante ait un réel impact sur le climat, il faudrait changer de plusieurs ordres de grandeur, et le tout dans un temps record que ne nous laisse plus le climat. Comme Vert l'avait raconté, les solutions de capture et de séquestration sont avant tout portées et financées par les plus grandes entreprises (compagnies aériennes, producteurs de pétrole, sites de e-commerce ou cimentiers), qui les utilisent comme arguments pour ne rien changer à leurs activités.

2000 scientifiques plaident pour un traité de non-prolifération des fossiles

Dans une lettre ouverte adressée aux gouvernements du monde entier, 2 000 universitaires exigent un traité de non-prolifération des combustibles fossiles, sur le modèle de celui qui régit les armes nucléaires.

Chercheur·se·s en physique, mathématiques ou économie, doctorants et prix Nobels, ces milliers de cerveaux partagent un constat : le climat se réchauffe, et c'est essentiellement à cause de la combustion des énergies fossiles. Or, comme l'a expliqué le Giec dans un rapport spécial, pour contenir l'élévation des températures sous 1,5ºC d'ici la fin du siècle, les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites d'au moins 45% au niveau mondial d'ici à 2030. Ce qui permettrait de « limiter certains des effets les plus graves du réchauffement et protéger la vie et les moyens de subsistance des générations actuelles et futures », indiquent les signataires du texte.

A la veille de l'assemblée générale des Nations Unies (ONU) qui s'ouvre ce mardi, les auteur·rice·s réclament un plan mondial juridiquement contraignant qui comporterait trois points : la fin de tout nouveau projet d'exploration ou d'exploitation ; la suppression progressive des stocks et l'arrêt de la production ; un plan de transformation, qui garantirait un accès à 100% aux énergies renouvelables dans le monde entier.

Publiée la semaine dernière dans Nature, une étude indiquait que pour avoir une chance d'en rester à 1,5°C, il faudrait laisser 90% du gaz et 60% du pétrole dans le sol. La production mondiale de ces deux hydrocarbures devrait décroître de 3% par an jusqu’en 2050. Or les projections de l'Agence internationale de l'énergie prévoient une hausse de la production des énergies fossiles de 2% par an.

Incendies 2021 : sont-ils plus nombreux et violents qu'avant ?

On brûle de savoir. Après un été qui a vu s'embraser la Turquie, la Grèce ou la Californie comme rarement auparavant, une question survient : avec le réchauffement, les feux sont-ils devenus plus brutaux ? Avec des images satellites glanées auprès de la Nasa, le Monde tente de répondre à cette question.

P.S. : Vous l'avez peut-être remarqué, le lien de la vidéo d'hier ne fonctionnait pas. Pour visionner la vidéo sur la chasse aux appelants, cliquez ici.

© Le Monde