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Faire mandat honorable

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Pour mieux voter, les député·es devront accepter de se former sur le climat et la biodiversité.


Devant l’Assemblée nationale, des scientifiques accueillent les nouveaux députés pour les former à l’écologie sans plus attendre

Palais bourdon. Jusqu’à mercredi, les député·es sont attendu·es à l’entrée du palais Bourbon par certain·es des plus grand·es scientifiques français·es pour se voir dispenser une formation express aux enjeux du climat et du vivant. Les organisateur·rices espèrent sensibiliser un grand nombre d’élu·es pour qu’elles et ils prennent davantage en compte les enjeux écologiques dans leurs votes.

Danielle Simonnet, fraîchement élue députée (Nupes) de Paris, est attablée avec quatre scientifiques sous un chapiteau planté à quelques encablures de l’Assemblée nationale où elle se rend pour la première fois ce lundi. À l’aide de récapitulatifs du dernier rapport du Giec (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), les chercheur·ses font le point avec la parlementaire sur la crise écologique en cours et à venir.

Une discussion qui s’inscrit dans l’opération #MandatClimatBiodiversité, une initiative portée par l’ex-député écologiste de Maine-et-Loire Matthieu Orphelin et le climatologue Christophe Cassou. Avec l’aide du collectif étudiant Pour un réveil écologique, ils ont convié 35 scientifiques à se relayer pour sensibiliser, pendant deux jours et demi, les nouveaux membres de l’Assemblée nationale aux enjeux du climat et de la biodiversité. En petits groupes, les député·es peuvent recevoir une formation express de 20 à 30 minutes sur ces vastes sujets, ainsi qu’un « kit de survie » avec des ressources à explorer.

Les scientifiques présent·es représentent des disciplines variées, comme la géographe Magali Reghezza (à gauche), le climatologue Christophe Cassou (au centre) ou encore le spécialiste de la biodiversité Denis Couvet (à droite). ©  Anna Sardin / Vert

« Il y a deux raisons principales qui poussent les parlementaires à ne pas agir comme il le faudrait face à l’urgence climatique : le manque de volonté politique, et l’absence de connaissances des enjeux et des solutions, qu’il ne faut surtout pas sous-estimer », analyse Matthieu Orphelin.

En 2020, une étude de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) a révélé que 21 % des parlementaires français·es considéraient le changement climatique comme « une hypothèse sur laquelle les scientifiques ne sont pas tous d’accord ». Pourtant, le consensus scientifique sur le sujet est absolu, comme en témoigne le dernier rapport du Giec (Vert). Aussi, « il est absolument critique que les décideurs puissent monter en connaissance sur le sujet pour que ces enjeux rayonnent dans toutes les politiques publiques », abonde Christophe Cassou.

Pour un réveil écologique espère former au moins 289 député·es dans les jours qui viennent, soit l’équivalent d’une majorité absolue à l’Assemblée. « Au moins pour le symbole », précise Léa Falco, membre du collectif.

Seule à s’être présentée lundi après-midi, la députée Nupes-LFI de Paris Danielle Simonnet (en rouge) bénéficie d’un cours particulier avec les scientifiques. ©  Anna Sardin / Vert

Malgré la mobilisation des jeunes militant·es qui font le pied de grue devant l’Assemblée nationale pour rameuter des élu·es, la récolte est bien maigre pour ce premier jour de formation. Danielle Simonnet est la seule à avoir pris le temps de venir se former auprès des scientifiques.

Les chercheur·ses se relaieront jusqu’à mercredi pour sensibiliser les parlementaires. Mardi matin, les député·es écologistes ont rendu visite aux scientifiques. Cet après-midi, les insoumis·es ont également promis de venir. À terme, le collectif étudiant espère que tous les parlementaires suivront une longue formation obligatoire et organisée par les institutions, détaille Léa Falco. « Au moins, on saurait que s’ils n’agissent pas, c’est parce qu’ils n’en ont simplement pas la volonté. »

· Depuis vendredi, l’eau est rationnée pour les 700 habitant·es du village de Villars-sur-Var (Alpes-Maritimes), qui doivent se rendre à la mairie pour récupérer des bouteilles d’eau potable. Conséquence directe de la sécheresse qui sévit depuis plusieurs semaines, les deux sources qui alimentent la commune ont atteint des niveaux critiques. Afin d’éviter la coupure nette des robinets et maintenir un accès à l’eau pour des usages sanitaires, l’exécutif local explique que la Régie des eaux Alpes Azur Mercantour (REAAM) a dû capter l’eau d’un nouveau ruisseau pour compléter l’approvisionnement. - France info

· Mardi, les délégué·es des 196 états membres de la Convention pour la diversité biologique (CDB) des Nations unies se retrouvent à Nairobi (Kenya) pour négocier un accord en amont de la quinzième conférence (COP15) sur la biodiversité. Initialement prévue en Chine en 2020, maintes fois reportée en raison du Covid-19, celle-ci se tiendra finalement au Canada en décembre. Les pays doivent aboutir à un accord ambitieux qui permettra de protéger au moins 30 % des terres et des océans d’ici à 2030 et de réduire les pollutions qui dégradent de nombreux habitats naturels. - Sud Ouest (AFP)

Traité de tous les noms. Cinq jeunes européen·es portent plainte aujourd’hui devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) contre douze des États signataires du Traité sur la charte de l’énergie (TCE) - dont la France. Ratifié par la France en 1999, le TCE est un accord inter-gouvernemental dont l’objectif initial est de sécuriser les approvisionnements en énergie de ses parties prenantes. Il prévoit la possibilité, pour les investisseurs, de demander aux États signataires un dédommagement dans le cas où un changement de politique énergétique affecterait la rentabilité de leurs placements. Ce texte est contesté depuis que de nombreux pays ont fait les frais de condamnations, dont le montant total dépasse plusieurs dizaines de milliards d’euros, prononcées par les tribunaux d’arbitrage. La Russie est sortie du traité en 2009, l’Italie en 2015 et la France l’envisage depuis 2020. Selon les informations du Monde, les jeunes plaignant·es demandent aux signataires de quitter le traité ou de le réformer en profondeur, de sorte à répondre à l’urgence climatique et à pouvoir, par conséquent, choisir de sortir des énergies fossiles sans que cela n’entraîne de condamnation financière.

L’écrasante majorité des Français est prête à tout changer pour lutter contre la crise climatique

Less is more. Alors qu’elles et ils viennent d’envoyer à l’Assemblée nationale une large majorité de députés libéraux, de droite et d’extrême droite, deux-tiers des Français·es considèrent que notre modèle économique n’est pas compatible avec la lutte contre le changement climatique et 73 % pensent que la sobriété est une solution, révèle une étude de Parlons climat publiée ce mardi.

Vêtements à gogo, gadgets à foison, jouissance illimitée : nos concitoyen·nes rêvent-elles et ils de surconsommation ? Rien n’est moins vrai, selon une étude de Parlons climat, un programme initié par le laboratoire d’idées Destin commun, et réalisée par l’institut Kantar Public en mars 2022 sur un échantillon de 4 000 personnes. Si le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français·es, surtout en ces temps d’inflation des prix, 58 % considèrent qu’il faudra une transformation « radicale » de nos modes de vie pour sauvegarder l’environnement. Contrairement à une idée reçue, 73 % des personnes sondées jugent souhaitable la sobriété - définie comme une « diminution de la consommation » - pour lutter contre le changement climatique.

L’aspiration à changer de système économique n’est pas l’apanage des plus jeunes ; ces questionnements sont communs à toutes les classes d’âge, soulève encore l’étude. Par exemple, les 18-34 ans sont 36 % à faire du climat l’une de leurs trois priorités, tout comme un tiers des 65 ans et plus. Les aîné·es sont aussi celles et ceux qui croient le moins en la technologie comme solution à la crise climatique : elles et ils ne sont que 20 % contre 29 % chez les 18-34 ans.

Des chiffres jugés « étonnants » par Lucas Francou Damesin, l’un des auteur·ices de l’étude qui souligne que « la sobriété, et par extension la société écologique, est vue comme très souhaitable ». Une apparente incohérence au moment où les élections législatives de ce dimanche ont porté à la députation une majorité de représentant·es de partis libéraux d’un point de vue économique. L’explication se trouve aussi peut-être dans les pages du travail de Parlons climat qui montre que la moitié seulement des Français·es « aimerait que les responsables politiques prennent des mesures fortes en matière de lutte contre le changement climatique » et 45 % disent que « les membres du gouvernement sont les acteurs auxquels ils font le moins confiance pour fournir des informations fiables sur les sujets importants ».

Show your stripes

En bande organisée. Des drapeaux bleu-blanc-rouge-écarlate s’affichent sur les réseaux sociaux en ce solstice d’été : c’est le #ShowYourStripes (« montrez vos bandes »), opération lancée par l’Organisation météorologique mondiale pour illustrer la rapidité du changement climatique. Chaque ligne affiche l’écart de la température moyenne de l’année par rapport à celle de la période 1981-2010 - en bleu pour les années plus froides, en rouge pour les années plus chaudes. Mises au point par le climatologue britannique Ed Hawkins en 2016 (voir notre article), ces « warming stripes » se déclinent à l’échelle mondiale, nationale ou locale et le nombre de bandes – autant d’années – varie en fonction des données disponibles.

Les bandes du réchauffement pour la France entre 1899 et 2021. Cliquez pour accéder au site et découvrir les bandes dans d'autres régions du monde. ©  University of Reading

+ Loup Espargilière, Anne-Sophie Novel, Juliette Quef et Anna Sardin ont contribué à ce numéro.