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Un procès fictif pour donner de vrais droits aux animaux d’élevage et combattre les algues vertes en Bretagne

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Into the wild. L’association Wild legal lance sa troisième pro­mo­tion d’étudiant·es, qui plancheront, cette année, sur la recon­nais­sance de droits pour les ani­maux. Un remède, notam­ment, aux ter­ri­bles con­di­tions d’élevage dans l’industrie et aux algues vertes mortelles qui envahissent les plages bre­tonnes.

« Chaque jour, on abat trois mil­lions d’animaux, dont 95% sor­tent d’élevages inten­sifs », dénonce Brigitte Goth­ière, cofon­da­trice de L214, invitée lors de la con­férence de lance­ment de la nou­velle pro­mo­tion de la Wild legal school, ven­dre­di dernier (la vidéo). L’ac­tiviste déplore la « bipo­lar­ité » qui existe aujourd’hui dans l’él­e­vage entre, d’une part, l’article L214‑1 du code rur­al, qui recon­naît les ani­maux comme des êtres sen­si­bles qui doivent être élevés dans des « con­di­tions com­pat­i­bles avec les impérat­ifs biologiques de [leur] espèce » ; et, d’autre part, la réal­ité de l’élevage indus­triel, régulière­ment exposée dans les vidéos-choc de l’association.

En aval, les nitrates relâchés par les porcs de l’in­dus­trie bre­tonne font pro­lifér­er les algues vertes sur le lit­toral. Des végé­taux marins gorgés d’hydrogène sul­furé (H2S), un gaz tox­ique, qui ont notam­ment provo­qué la mort d’un joggeur en 2016. « L’Etat est con­damné pour fail­lite mais con­tin­ue de fail­lir », souf­fle Yves-Marie Le Lay, prési­dent de la Sauve­g­arde du Tré­gor, une asso­ci­a­tion de défense de l’environnement dans les Côtes‑d’Armor, alors que les plans algues vertes auraient déjà coûté « plus de 100 mil­lions d’euros depuis 2010 ».

Procès simulé sur le crime d’é­co­cide qui s’est tenu juin 2021 © Wild legal

Dès jan­vi­er, 20 étudiant·es juristes et avocat·es analy­seront des doc­u­ments four­nis par L214 et la Sauve­g­arde du Tré­gor. A par­tir de ce cas pra­tique, les étudiant·es devront éla­bor­er des plaidoiries des­tinées à imag­in­er le droit du futur et rem­porter des vic­toires ultérieures devant les tri­bunaux. Ces plaidoiries seront repris­es lors d’un faux procès en juin 2022, au cours duquel les asso­ci­a­tions requérantes deman­deront répa­ra­tion aux entre­pris­es d’élevage, de la part des ani­maux, pour le préju­dice subi en rai­son de leurs con­di­tions de vie désas­treuses. Exploita­tions et agriculteur·rices fer­ont val­oir leurs argu­ments en défense.

L’objectif est de « mon­tr­er les lacunes du droit exis­tant et les avan­tages d’un nou­veau droit », détaille Marine Cal­met, prési­dente de l’association. « La for­ma­tion et la démoc­ra­ti­sa­tion des enjeux juridiques auprès des étu­di­ants et du grand pub­lic sont aus­si essen­tiels », ajoute Simon Rossard, cofon­da­teur de Wild legal. Un faux procès qui vise aus­si à mon­tr­er les mus­cles auprès des autorités et des entre­pris­es et qui présente un « fort effet dis­suasif ».

En 2020, la pre­mière pro­mo­tion avait tra­vail­lé sur la recon­nais­sance d’une per­son­nal­ité juridique à l’Amazonie pour lut­ter con­tre l’orpaillage illé­gal en Guyane. La sec­onde, sur la recon­nais­sance du crime d’écocide à par­tir de l’exemple des boues rouges à Mar­seille. Deux sim­u­la­tions très suiv­ies, notam­ment par les asso­ci­a­tions et les autorités locales. Un recours au pénal devant le tri­bunal d’Aix, déposé par le parc nation­al des Calan­ques, s’est nour­ri des travaux des étudiant•es.