Nous sommes à Glasgow. Le mois de novembre rafraîchit l’Ecosse, la COP26 bat déjà son plein et le temps se contracte. Nathan Méténier est un homme pressé. Nous aurons 15 courtes minutes pour évoquer les étapes de sa vie qui l’ont mené à figurer parmi les sept jeunes qui conseillent le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, sur le climat.
Pas la peine de lui demander son âge (22 ans) ou le lieu qui l’a vu naître (les massifs isérois de Saint-Martin-d’Uriage), puisqu’il s’en est déjà ouvert à la presse. Rompu à l’exercice, il nous donne spontanément quelques jalons de son parcours : son passage par Sciences po Grenoble, l’université d’Edimbourg et la London School of economics lui auront permis de s’équiper d’un solide bagage en matière de politiques environnementales.
Son profil Linkedin nous permet de faire l’économie de quelques vaines questions. Après des piges au cabinet du maire grenoblois Eric Piolle, ou parmi l’équipe de la députée socialiste Marie-Noëlle Battistel, il a multiplié les expériences associatives chez les Jeunes ambassadeurs pour le climat, Youth4Nature, le European environmental bureau, Generation climate change ; le dernier fermera la porte.
Aujourd’hui, il travaille pour Youth and environment Europe, un réseau qui fédère une quarantaine d’associations à travers le continent. Celui-ci mène notamment des projets à vocation éducative ou de participation citoyenne et fait du lobbying – du « plaidoyer », corrige Nathan Méténier. Son rôle : « travailler avec des fondations et des donateurs pour s’assurer d’avoir des financements pour les jeunes partout en Europe (dans les Balkans, la Mer noir ou l’Europe de l’Est) et s’assurer que tous les États et les communautés les plus marginalisées – LGBT, roms, racisé·e·s – puissent avoir voix au chapitre. »
Un CV épais pour un parcours intense. Aussi, quand le secrétariat général de l’ONU s’est mis en quête de jeunes pour porter la voix des sept continents, « les réseaux ont suggéré des personnalités » et Nathan Méténier est devenu l’un des premiers « jeunes conseillers pour le climat ».
Elles et ils sont sept, dans cette première couvée qui a obtenu un mandat d’un peu plus de deux ans. On lui épargne les questions au sujet de ses homologues – âgés de 18 à 28 ans, originaires du Soudan, de Moldavie, des États-Unis, des îles Fidji, du Brésil et d’Inde (Le Monde). Depuis août 2020, à l’occasion d’échanges chronométrés – eux aussi – avec le secrétaire général, qui se tiennent tous les trois mois, elles et ils « poussent » certains sujets pour les mettre à l’agenda de l’ONU. Une « opportunité immense pour faire passer des messages de nos communautés et régions », salue-t-il. Parmi ceux-ci, les droits des populations autochtones, la représentation des minorités et la justice sociale, indique Nathan Méténier. Une intersectionnalité entre tous ces combats, qui signe l’action de la jeune garde du mouvement mondial pour le climat.
Cette position lui a ouvert l’accès aux plus hautes instances des Nations Unies, ainsi qu’aux chef·fe·s d’État et de gouvernement. Il a par exemple rencontré le président français au début de la COP26. Événement où il a obtenu le statut d’« observateur silencieux » des négociations, qui a été refusé à la quasi-totalité des associations.
A Glasgow, Nathan Méténier espère que la promesse faite par les pays riches de verser 100 milliards d’euros par an sera enfin tenue : « C’est ça aussi la justice sociale ». Il veut également que les États en développement « prennent leurs responsabilités. Certains sont bloqués dans des schémas, où le développement ne passe que par une économie polluante, parce qu’on leur impose certains systèmes ».
« La grande question, c’est : « est-ce qu’on est entendus ? » », s’interroge le jeune homme. Un indice encourageant : le peu de publicité faite par Antonio Guterres autour de leurs entrevues, signe que celui-ci ne se sert pas des jeunes pour assurer sa communication. Au-delà de son influence réelle ou supposée sur les décisions de l’ONU, Nathan Méténier « pense que le changement vient avec des sociétés civiles fortes. Ce qui est essentiel, c’est de s’assurer que les jeunes ont les compétences et les ressources pour comprendre et être actifs sur ces enjeux. C’est eux qui seront aux manettes dans 10 ou 20 ans ». Les 15 minutes sont écoulées. Le climat n’attend pas.