Décryptage

Les Français sont favorables à la sobriété, mais ils ont déjà le sentiment d’en faire assez

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Sobre laser. Une vaste majorité des Français attend des poli­tiques publiques plus ambitieuses pour encour­ager la sobriété et lim­iter la sur­con­som­ma­tion, d’après une vaste enquête.

Deux ans après l’apparition du terme «sobriété» dans le débat pub­lic à l’automne 2022, dans un con­texte de crise énergé­tique ali­men­tée par la guerre en Ukraine, l’Agence de la tran­si­tion écologique (Ademe) a con­sacré un pre­mier baromètre annuel à ce sujet. Pub­liée le 7 mars en parte­nar­i­at avec l’Observatoire société et con­som­ma­tion (Obso­co), cette vaste enquête a été menée auprès de 4 000 per­son­nes âgées de 18 à 75 ans, représen­ta­tives de la pop­u­la­tion mét­ro­pol­i­taine française.

Pre­mier enseigne­ment : la sobriété est plutôt bien vue par les Français·es, qui lui attribuent une con­no­ta­tion pos­i­tive pour 41%, neu­tre pour 35%, et néga­tive pour seule­ment 15%. Elles et ils sont nombreux·ses à adopter des pra­tiques «sobres» au quo­ti­di­en (acheter en sec­onde main, éviter l’avion ou la voiture, réduire sa con­som­ma­tion de viande, faire dur­er ses équipements numériques, etc).

La notion de sobriété reste davan­tage perçue comme pos­i­tive que néga­tive, même dans les ménages les plus pré­caires finan­cière­ment. © Ademe / Obso­co

Ces com­porte­ments sont davan­tage motivés par des con­sid­éra­tions économiques qu’écologiques. Par­mi les per­son­nes qui ne pos­sè­dent pas de voiture, «56% des répon­dants évo­quent un arbi­trage financier quand seule­ment 17% évo­quent des raisons liées à l’environnement», détaille le baromètre. D’après l’Ademe, seul·es 15% des répondant·es appa­rais­sent «explicite­ment engagés dans des pra­tiques de sobriété» et prêt·es à aller plus loin.

Le baromètre révèle égale­ment une cri­tique général­isée de la société de con­som­ma­tion, avec une vaste majorité de sondé·es jugeant que «les gens passent trop de temps à con­som­mer plutôt qu’à prof­iter des plaisirs sim­ples de la vie» (81%) ou que «notre manière de con­som­mer est nuis­i­ble pour l’environnement» (77%). Plus de huit répondant·es sur dix (83%) jugent que les Français·es con­som­ment trop. Sym­bole d’une dis­so­nance cog­ni­tive large­ment partagée, elles et ils sont pour­tant presque autant (82%) à juger que leur pro­pre mode de vie est déjà sobre.

Les Français·es se mon­trent glob­ale­ment enclin·es à ren­forcer leurs efforts, mais restent réticent·es vis-à-vis des pra­tiques les plus con­traig­nantes : usage de l’avion et de la voiture, ou con­som­ma­tion de viande.

Surtout, elles et ils pointent du doigt d’autres acteurs : plus de la moitié con­sid­ère que l’État et les grandes entre­pris­es n’agissent pas assez «pour lim­iter les impacts de leur activ­ité sur les ressources de la planète». Les Français·es se mon­trent très favor­ables à plusieurs mesures de sobriété col­lec­tives, comme l’interdiction de ven­dre des pro­duits pol­lu­ants, le développe­ment des fil­ières locales et la con­cen­tra­tion des échanges com­mer­ci­aux au sein de l’Union européenne. Enfin, 74% jugent que les gou­verne­ments devraient priv­ilégi­er la sobriété et la pro­tec­tion de l’environnement à la crois­sance économique.

Pho­to d’il­lus­tra­tion : Cot­ton­bro stu­dio / Pex­els