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Le Conseil d’État met un sérieux coup de frein au projet Montagne d’Or en Guyane

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Mon­tagne dehors ? La pro­lon­ga­tion de la con­ces­sion de ce vaste pro­jet de mine d’or a été annulée par la plus haute juri­dic­tion admin­is­tra­tive.

«C’est une déci­sion qu’on attendait depuis longtemps», savoure Garance Lecocq, coor­di­na­trice de l’association Guyane Nature Envi­ron­nement, jointe par Vert.

Depuis plusieurs années, la com­pag­nie rus­so-cana­di­enne Mon­tagne d’Or (CMO) envis­age d’ouvrir une mine d’or à ciel ouvert d’au moins 2,5 kilo­mètres de long sur 400 mètres de large et plus d’une cen­taine de mètres de pro­fondeur en bor­dure de la Réserve biologique inté­grale de Lucifer Dék­ou-Dék­ou, au nord-ouest de la Guyane.

En 2018, le débat s’ouvre sur la pro­lon­ga­tion d’une des huit con­ces­sions détenues par la com­pag­nie minière depuis des décen­nies, celle où le pro­jet Mon­tagne d’Or doit voir le jour. Un renou­velle­ment indis­pens­able pour lancer les travaux.

La con­ces­sion liée au pro­jet Mon­tagne d’Or se situe au lieu-dit «Bœuf-Mort». © J.B Bour­bon, Géo­con­flu­ences

L’État refuse d’abord cette pro­lon­ga­tion, au vu des risques de pol­lu­tion et des men­aces pour la bio­di­ver­sité mis en lumière par des asso­ci­a­tions et des ONG, menées par le col­lec­tif local Or de ques­tion et France Nature Envi­ron­nement (FNE). Mais la com­pag­nie Mon­tagne d’Or con­teste cette déci­sion et obtient, en 2021, le renou­velle­ment de la con­ces­sion devant le tri­bunal admin­is­tratif de Cayenne. Et ce, en invo­quant le Code minier, qui n’imposait pas la prise en compte de l’environnement dans le renou­velle­ment des con­ces­sions minières.

FNE intente alors une action en jus­tice pour faire recon­naître que le Code minier, est con­traire à la Con­sti­tu­tion française car il ne prévoit pas de procé­dure de par­tic­i­pa­tion du pub­lic suff­isante et omet com­plète­ment l’environnement.

Vue aéri­enne du camp de base “Mon­tagne d’Or”, à 180 kilo­mètres à l’ouest de la cap­i­tale, Cayenne, et à 80 kilo­mètres au sud du chef-lieu du départe­ment, Saint-Lau­rent-du-Maroni, le 12 octo­bre 2017. © Jody AMIET/AFP

Début 2022, le Con­seil con­sti­tu­tion­nel lui donne rai­son, esti­mant «incon­sti­tu­tion­nelles» les dis­po­si­tions du Code minier qui ignorent la Charte de l’environnement. Il ne man­quait plus que la déci­sion du Con­seil d’État pour l’annulation défini­tive du renou­velle­ment de la con­ces­sion. C’est chose faite.

Le 19 octo­bre dernier, le Con­seil d’État a con­clu à la néces­sité d’examiner les impacts envi­ron­nemen­taux de la pro­lon­ga­tion des con­ces­sions (la déci­sion). Les juges ont ain­si annulé la déci­sion précé­dente et ren­voyé l’affaire devant la Cour admin­is­tra­tive d’appel de Bor­deaux. La com­pag­nie minière devra présen­ter de nou­veaux argu­ments pour espér­er voir valid­er le renou­velle­ment de sa con­ces­sion.

«Dans le passé, nous avons été con­fron­tés à des doc­u­ments et des notices d’impacts très allégées et lacu­naires, avec très peu d’exigences sur le niveau de détails des risques de la part des com­pag­nies, affirme Garance Lecocq. On sera très vig­i­lant sur l’évolution de l’affaire et on veillera à ce que tout soit bien pris en compte.»

En atten­dant la nou­velle audi­ence, dont la date n’a pas été annon­cée, le prési­dent de Guyane Nature Envi­ron­nement, Matthieu Barthas main­tient que cela reste «une excel­lente nou­velle pour la bio­di­ver­sité guyanaise» et «espère que cela appellera à une grande vig­i­lance sur les futurs pro­jets miniers».