Dans l'actu

La mise à l’arrêt de quatre réacteurs nucléaires de plus accentue la crise de l’énergie

  • Par

Chô­mage cen­trales. EDF a mis à l’arrêt qua­tre les plus gros réac­teurs français dans les cen­trales de Civaux (Vienne) et de Chooz (Ardennes) pour des prob­lèmes de cor­ro­sion sur des pièces vitales. A l’entame de l’hiver, près d’un tiers des réac­teurs du pays sont désor­mais indisponibles.

En octo­bre dernier, EDF a indiqué avoir repéré des défauts au sein du réac­teur 1 de la cen­trale de Civaux. Celui-ci est rapi­de­ment arrêté ain­si que son voisin, Civaux 2, après que l’énergéticien a con­staté des dégâts sim­i­laires. Le 15 décem­bre, EDF a détail­lé la nature du prob­lème : des fis­sures et de la cor­ro­sion sur les soudures de tuyau­ter­ies qui relient le cir­cuit prin­ci­pal du réac­teur au sys­tème d’injection de sécu­rité. Un défaut qui serait poten­tielle­ment générique. Par pré­cau­tion, le pro­duc­teur d’électricité a décidé de met­tre à l’arrêt dès cette semaine les deux réac­teurs de la cen­trale de Chooz, du même type que ceux de Civaux, pour procéder à des con­trôles préven­tifs. 

Les défauts repérés sur les soudures pour­raient avoir de très lourds impacts en cas d’accident. En temps nor­mal, le cœur d’un réac­teur est refroi­di par un cir­cuit d’eau, dit « pri­maire ». En cas de brèche et de fuite d’eau, ce dernier ne peut plus assur­er sa fonc­tion. C’est alors que le cir­cuit d’injection de sec­ours est mis en marche : de l’eau borée est injec­tée afin d’étouffer la réac­tion en chaîne et refroidir le réac­teur (ASN). Si son étanchéité n’est pas assurée, c’est tout le proces­sus de sécuri­sa­tion du réac­teur qui devient vul­nérable.

Le cir­cuit d’injection de sec­ours endom­magé sur le réac­teur de Civaux 1. © ASN

L’arrêt de ces qua­tre réac­teurs, les plus puis­sants du parc nucléaire français (1450 MW — mégawatts élec­triques), frag­ilise un marché déjà ten­du et risque de faire grimper le coût de l’électricité. Depuis l’annonce d’EDF, les prix de gros atteignent des records. « Le prix de référence, pour une livrai­son dans 12 mois, atteint désor­mais 293 euros du mégawattheure (€/MWh) — soit une aug­men­ta­tion de 30% en une journée », ont noté Les Échos

En début de semaine, le prési­dent de la Com­mis­sion de régu­la­tion de l’énergie (une autorité admin­is­tra­tive indépen­dante), Jean-Pierre Caren­co, a expliqué la flam­bée des prix par le retard français dans le développe­ment des renou­ve­lables. « Si on avait suivi la feuille de route des éner­gies renou­ve­lables telle qu’elle était prévue il y a deux ans, on n’au­rait pas de crise. Je pense qu’on n’au­rait pas de crise si on avait 3 gigawatts de plus », a‑t-il fustigé lors du col­loque annuel de l’Union française de l’électricité (La Tri­bune).

D’ici la fin de la semaine, 15 des 56 réac­teurs français seront à l’arrêt selon le Réseau de trans­port d’électricité (RTE), une indisponi­bil­ité qua­si-his­torique (Ouest-France). Or, en hiv­er, la con­som­ma­tion d’électricité est bien plus impor­tante que le reste de l’année. Dans un rap­port pub­lié en novem­bre, le ges­tion­naire du réseau élec­trique RTE a indiqué que l’hiver 2020–2021 serait placé en « vig­i­lance par­ti­c­ulière » sur le plan de l’alimentation élec­trique. Mais selon RTE, les risques de ten­sion restent rel­a­tive­ment faibles et n’apparaîtraient qu’en cas de tem­péra­tures « inférieures aux nor­males de sai­son de l’ordre de 4 à 6°C ».