Maths l’opposition. Pour tenter de discréditer les opposant·es au projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres, la préfecture du Tarn et le gouvernement ont annoncé des chiffres trompeurs, voire tout simplement faux.
Samedi, dans le communiqué qui a suivi le rassemblement organisé par de nombreuses organisations écologistes, la préfecture du Tarn a réalisé cet étrange comptage : «La manifestation a réuni 2 400 personnes dans le cortège déclaré, moins qu’en avril 2023. 2 500 individus violents se sont détachés du cortège déclaré pour commettre des exactions»
1. La phrase comporte un évident problème de logique : il y aurait eu 2 400 personnes au total dans le cortège déclaré, dont se seraient extraites 2 500 personnes pour aller commettre des méfaits ?
2. Si l’on remet cette phrase à l’endroit, cela signifierait que la manifestation comportait au total 4 900 personnes. La préfecture a donc choisi de ne pas inclure les «individus violents» dans son comptage. Le total dépasse en réalité le nombre de personnes rassemblées en avril dernier, même en s’en tenant aux chiffres de la police (la préfecture avait alors compté 4 500 personnes). Ce n’est donc pas «moins qu’en avril 2023». C’est plus.
3. La préfecture dit avoir compté 2 500 individus «violents», «presque tous cagoulés, vêtus de noir, casqués, portant des boucliers, des bâches noires et des parapluies» ? Ce n’est pas ce que rapportent les journalistes présents sur place — dont ceux de France 3, qui ont compté environ 400 personnes correspondant à cette description.
4. Le communiqué fait état de la saisie de «plusieurs armes par destination – barres de fer, pioches, masques à gaz, boules de pétanque, couteaux». Une saisie partiellement dévoilée par la préfecture dans une photo moquée sur X (ex-Twitter), où l’on voit notamment quelques masques FFP2 et un maigre couteau à dent.
5. Accusation plus grave encore. En marge du cortège principal, des manifestants ont effectivement dégradé une cimenterie, dont ils ont notamment incendié trois camions-toupies. La préfecture les accuse d’avoir empêché les pompiers d’accéder au site. Selon un journaliste du Monde présent sur place, «aucun contact n’a cependant eu lieu avec les forces de l’ordre ou avec les pompiers, les manifestants ayant quitté les lieux bien avant que les véhicules de secours ou de gendarmes ne s’approchent du site».
6. S’il y a bien eu des incidents, il est dramatique de voir à quel point la préfecture, représentante de l’Etat, use de moyens grotesques pour tenter de décrédibiliser un rassemblement, dont plusieurs journalistes ont souligné le caractère globalement festif et familial.
Contactée par Vert, la préfecture du Tarn n’a, pour l’heure, pas répondu à nos questions.
Photo d’illustration : Anne-Claire Poirier/Vert
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