Semeurs de doutes contre semeurs d’espoir


Ceux qui sèment le doute sur la dangerosité de leurs produits, sont aussi ceux qui empêchent les paysans et les citoyens de semer leurs graines.   

Perturbateurs endocriniens : les semeurs de doutes de l'industrie

Le doute profite toujours à l'accusé. Or, semer le doute, c'est la stratégie d'une poignée de scientifiques liés à l'industrie pour empêcher toute régulation européenne des perturbateurs endocriniens.

La Commission européenne planche actuellement sur une éventuelle future réglementation visant à limiter l'exposition des populations aux perturbateurs endocriniens (PE). Il s'agit de molécules qui modifient le fonctionnement normal du système hormonal. On en trouve à l'état naturel, mais aussi et surtout dans les produits industriels : pesticides, cosmétiques, plastiques, etc.

Fin avril 2020, un groupe de scientifiques a apporté sa contribution à la réflexion européenne sous la forme d'un éditorial publié dans la revue Toxicology in vitro. Comme l'a relevé le Monde, les rédacteurs y prétendent que les PE synthétiques ne sont pas plus néfastes que ceux trouvés « dans les régimes alimentaires à base de soja, le thé vert et la moutarde douce ». Par ailleurs, ils affirment sans aucun argument scientifique que l'exposition aux PE synthétiques « n’a cessé de diminuer » ces cinq dernières années. 

Plusieurs auteurs de l'éditorial ont des liens d'intérêt avec Monsanto, révèle le Monde © Karen Eliot

Ils nient également les effets d'une exposition à faibles doses, quand la recherche prouve que ceux-ci peuvent être nocifs même à une dose infinitésimale ; se réfèrent à des études obsolètes ; pratiquent l’autocitation ; mentionnent des articles écrits pour le compte de l’industrie. Les auteurs de l'éditorial suggèrent enfin d’arrêter toute recherche sur les effets des PE sur des animaux de laboratoire et de se contenter de tests in vitro.

Dans son enquête, le Monde révèle que ceux qui se présentent comme d'éminents scientifiques indépendants multiplient en réalité les liens d'intérêt avec les principaux intéressés par un changement de législation, soit l'industrie et les géants de la chimie que sont BASF, Bayer, Monsanto, DuPont.

En 2013, rappelle encore le quotidien, une précédente offensive de certains de ces mêmes chercheurs avait contribué à empêcher la mise sur pied d'une réglementation sur les PE. Une enquête à lire dans le Monde (abonnés). 

Les 150 propositions de la Convention citoyenne accueillies diversement

Il fallait s'y attendre. Les 150 propositions définitivement adoptées par les membres de la Convention citoyenne pour le climat, dimanche, ont suscité leur lot de réactions tranchées

« Il ne manque quasiment rien et les mesures proposées sont assez radicales »a salué Elodie Martinie-Cousty, membre du bureau de la fédération France Nature Environnement. Comme elle, les responsables d'organisations écologistes sont globalement satisfait•e•s du bilan de l'exercice. Mais elles et ils restent dans l'expectative quant à la forme que privilégiera le pouvoir pour reprendre ces propositions. Même son de cloche du côté d'Europe écologie – Les Verts. 

D'autres voix dénoncent toutefois le manque d'ambition des mesures finalement retenues. « Il faudra s'interroger sur le lobbying de certains »a tancé l'avocat spécialiste Arnaud Gossement, qui déplore que l'on ait cherché, selon lui, à éviter les sujets qui fâchent comme la taxe carbone ou la décrue du nucléaire.

"110 KM/H : LE RETOUR DE L'ECOLOGIE PUNITIVE ?" Repéré par le journaliste Samuel Gontier

Il est un sujet qui fâche particulièrement à droite : celui de l'abaissement à 110km/h de la vitesse sur les autoroutes. A ce sujet, BFM TV ne s'est pas privé d'organiser des débats sans nuance sur le « retour de l'écologie punitive ». Un constat partagé par nombre d'élu•e•s des Républicains ou du Rassemblement national : Marine Le Pen juge ces propositions « loufoques » et « sans aucune pertinence sociale et écologique ». Il est à craindre que l'une ou l'autre mesure ne serve de prétexte pour ne pas débattre des quelque 149 autres. 

De l'amiante dans les produits cosmétiques

Fin mai, Johnson & Johnson (J&J) a annoncé le retrait de sa célèbre baby powder des marchés canadien et étasunien après la découverte d'amiante dans ce produit. Aucun contrôle de ce type n'est réalisé en France, où ce produit est toujours vendu.

Anti-transpirant, poudre de maquillage, produits d'hygiène féminine... On trouve du talc à peu près partout dans les produits cosmétiques. Lorsque celui-ci est extrait des mines, il arrive que de l'amiante y soit mélangé. Problème : cette fibre minérale provoque diverses formes de cancer.

J&J clame l'innocence de son talc pour bébés depuis des décennies. Mais les ennuis judiciaires s'accumulent à mesure que ses client•e•s tombent malades. « À ce jour 19 400 procédures judiciaires ont été engagées aux États-Unis principalement par des femmes qui ont utilisé du talc "Johnson’s Baby Powder" pour l’hygiène intime et qui ont aujourd’hui un cancer de l’ovaire ou un mésothéliome »a expliqué à Bastamag Alain Bobbio, membre de l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva). En 2018, 22 d'entres elles ont obtenu gain de cause et J&J a dû leur verser plus de 4 milliards d'euros

Malgré le scandale et à cause de l'immobilisme des autorités sanitaires, la poudre de J&J est toujours en vente en France. Comme le révèle Bastamag, aucun contrôle de l'amiante dans les très nombreux produits contenant du talc n'est pratiqué dans l'hexagone. Une riche enquête à lire sur le site de Bastamag

Les particuliers peuvent enfin acheter des semences paysannes 

Il y de quoi se réjouir. Après des décennies de verrouillage, les particuliers sont enfin autorisés à acheter des semences paysannes

Dans l'agitation du déconfinement, le texte est passé relativement inaperçu. Adoptée quelques jours plus tôt à l'Assemblée nationale, une importante loi écrite par des député•e•s LREM a été publiée au Journal officiel, le 11 juin. Celle-ci met partiellement fin à un système inique qui a cours depuis les années 1930. 

Depuis cette époque, il est impossible de commercialiser des semences qui ne seraient pas inscrites au Catalogue des variétés. Celui-ci constitue un répertoire des graines autorisées, ultra standardisées, dont les droits sont détenus par les géants de l'agrochimie (encore eux) comme Monsanto. 

A (re)voir, l'excellent documentaire La guerre des graines (2014), qui raconte les décennies de lutte contre la standardisation des semences

Or ces semences sont stériles et les agriculteurs et jardiniers amateurs sont obligés d'en racheter à nouveau chaque année. Une absurdité que combat de longue date l'association Kokopelli, qui distribue illégalement des semences « libres de droits » et reproductibles. Les particuliers pourront désormais s'en procurer en tout légalité. 

Ce n'est, hélas, pas le cas des agriculteurs, qui ont toujours l'interdiction de cultiver leurs propres semences. Plus d'informations sur le site de France Inter. Vert vous recommande une nouvelle fois La guerre des graines, excellent documentaire qui résume ce combat quasiment centenaire. 

L'effet de serre expliqué simplement

C'est la grande découverte de cette Convention citoyenne : si on expliquait correctement la crise climatique aux citoyen•ne•s, elles et ils finiraient par réclamer la même chose que les climatologues et écologistes les plus zélé•e•s. 

Et pour ce faire, quoi de mieux que de commencer par la base. Dans cette vidéo réalisée pour Arte, la vulgarisatrice scientifique Florence Porcel explique simplement le fonctionnement de l'effet de serre

© Arte