La quotidienne

Sainte Éthique

Chères toutes et chers tous,

 
🍁 Jusqu’à vendredi, Vert passe en édition spéciale sur le vivant alors que se tient à Montréal la 15ème Conférence des Nations unies (COP15) sur la biodiversité. Les éditions quotidiennes seront un peu plus riches qu'à l'accoutumée - le vivant le vaut bien !


Des marques de fringues veulent le beau rôle mais nous inondent de pétrole.


Des fossiles pleins les armoires

Un cadavre dans le placard. Un rapport, publié ce mercredi par la fondation Changing Markets (CMF) et l’ONG française No Plastic in my Sea, pointe une nouvelle fois le fait que notre garde-robe est remplie de pétrole et de micro-plastiques. T-shirt, boxer, pantalon, veste, collant ou maillot de foot… Dans lequel de nos vêtements enfilés à la hâte ce matin n’y a-t-il aucune fibre synthétique ?

Alors que le gouvernement français réfléchit à la mise en place d’un éco-score pour les vêtements (Radio France), le rapport « Synthétiques anonymes 2.0 » fait le constat que les fibres produites à partir de combustibles fossiles représentent les deux tiers des textiles. Et le problème s’aggrave sans cesse puisque depuis le début des années 2000, la production du secteur de la mode aurait doublé. Polyester, nylon, acrylique, polyuréthane, élasthanne et autre caoutchouc synthétique produits et vendus à petit prix sont à la base du modèle économique de la « fast fashion ». Au même titre que la consommation énergétique ou les transports, le prêt-à-porter perpétue ainsi la dépendance à l’extraction de combustibles fossiles en pleine urgence climatique.

©  Miguel Hochleitner / Wikimedia

Un an et demi après avoir établi un premier état des lieux, dans lequel elle estimait que la production des fibres synthétiques « demande actuellement plus de pétrole que la consommation annuelle de l’Espagne », CMF a interrogé 55 marques, dont 31 ont répondu. D’après les déclarations récoltées, complétées par une recherche documentaire, l’ONG établit sa liste noire des grands noms de la mode : Adidas, BonPrix, Inditex (Zara, Bershka, Pull&Bear, Massimo Dutti), et Puma figurent parmi les dix marques qui utilisent le plus de fibres synthétiques par rapport au total des fibres utilisées. 

Pour Muriel Papin, déléguée générale de No Plastic in my sea, « ces fibres restent majoritaires chez des marques largement vendues en France et en Europe et posent trois problèmes majeurs. Elles sont fabriquées à partir de pétrole, elles relarguent des micro-plastiques au lavage et elles sont difficilement recyclables ».

La situation est grave, mais pas désespérée, puisque les marques elles-mêmes estiment que les mesures volontaires ne suffisent pas et que le secteur a besoin d'une réglementation qui fixerait notamment des objectifs de réemploi et de recyclage. Avis aux législateurs et législatrices.

· La semaine dernière, le gouvernement britannique a autorisé l’ouverture d’une nouvelle mine souterraine de charbon à Whitehaven, dans le nord-ouest de l’Angleterre. Les autorités affirment que le projet sera « neutre en carbone », et prévoient l'achat de titres de compensation. Une annonce contestée, car les ONG environnementales estiment que le gouvernement contredit ses engagements climatiques. - The Guardian (en anglais)

· La Norvège est le premier pays du monde à passer le cap des 20% de voitures roulant à l'électrique - soit un véhicule sur cinq, a déclaré lundi l’association norvégienne des véhicules électriques. Des prix réduits pour les parkings à l’autorisation d'utiliser certaines lignes de bus, le pays nordique récolte les fruits d’une politique d’incitation initiée il y a une dizaine d’années. - La Tribune

· Mardi, un laboratoire nord-américain a annoncé une avancée majeure dans le domaine de la fusion nucléaire, en produisant davantage d’énergie que celle utilisée pour provoquer la réaction. Sans émissions de CO2, sans risque d'accident et avec peu de déchets radioactifs, la fusion serait, selon ses défenseurs·ses, l'énergie du futur. L’expérience est encore loin d'être rentable et ne devrait pas atteindre l’échelle industrielle avant plusieurs décennies. - Libération

Cliquez pour afficher le dessin en grand. © Sanaga pour Vert

Choqué est Béchu. Notre ministre de l’écologie n’a pas du tout goûté les destructions commises par des militant·es écologistes sur le site du cimentier Lafarge près de Marseille le week-end dernier. Son histoire a inspiré ce conte de Noël à Sanaga.

80%

Au moins 497 des 15 723 personnes accréditées à la COP15 biodiversité représentent des peuples ou organisations autochtones. Hélas, aucun·e d’entre elles et eux n’a de pouvoir de négociation, note le réseau canadien de radio CBC. Selon l’ONU, les terres autochtones représentent 22% de la surface du globe, mais elles abritent 80% de la biodiversité mondiale, faisant de leurs habitant·es les « héros méconnus de la conservation ».

À la COP15, l'épineuse question du partage des richesses génétiques

Sans gène. Le partage juste des bénéfices issus de l’utilisation des ressources génétiques est au cœur des négociations de la 15ème conférence des Nations unies (COP15) sur la biodiversité.

Des cosmétiques aux médicaments, en passant par l’alimentation, l’industrie utilise massivement l’information génétique issue d’êtres vivants, dont elle isole des séquences ADN pour imaginer de nouvelles applications Problème : les brevets sont majoritairement déposés (donc détenus) dans les pays occidentaux, alors que les ressources proviennent surtout des pays en développement, principaux gardiens de la biodiversité.

Depuis 2010, les États et entreprises qui utilisent ces ressources sont tenu·es d’en partager les bénéfices avec leurs détenteurs. Mais dans les faits, il existe de nombreux contournements ; au Brésil et au Paraguay, les Guaranis se battent contre Coca-Cola depuis 2016 pour obtenir une contrepartie financière à l’utilisation massive d’une molécule de synthèse fabriquée à partir de l’ADN de la stévia. Ces cas de « biopiraterie » sont néanmoins de plus en plus rares et complexes à appréhender, puisque les ressources génétiques sont désormais accessibles gratuitement sur internet dans d’immenses bases de données.

« Les pays du Sud se disent que ça va trop vite, qu’ils n’ont plus aucun contrôle sur ce qu’ils estimaient être leurs ressources », raconte à Vert Catherine Aubertin, économiste de l’environnement à l’Institut de recherche pour le développement (IRD). Un meilleur partage des bénéfices issus des ressources génétiques donnerait aux pays du Sud davantage de moyens pour préserver la biodiversité.

Les étonnantes photos du « Nature Photographer of the year »

Place de cliché. Plus de 20 000 images étaient en lice pour ce prix organisé par une fondation néerlandaise. C’est le regard d’un Russe sur deux ours polaires qui rafle la mise cette année mais la concurrence était rude. Vert vous propose de voyager autour du globe dans les yeux des photographes naturalistes. Retrouvez notre sélection.

La Maison des ours ©  Dmitry Kokh / NPOTY 2022

+ Loup Espargilière, Alban Leduc et Justine Prados ont contribué à ce numéro.