La quotidienne

Marre de rire

Certains veulent jeter les eaux de Fukushima dans l'océan, d'autres font mine d'interdire la location des logements indécents ; les blagues les plus courtes sont les meilleures quand il s'agit d'environnement.


Passoires thermiques : une interdiction en trompe-l’œil

Une réforme classée G. Lundi, les député·e·s de la majorité ont refusé d'interdire formellement la location des logements les plus énergivores, qui grèvent les factures des plus précaires et alourdissent le bilan carbone de la France.

Pour atteindre la neutralité carbone d'ici le milieu du siècle - l'objectif qu'elle s'est fixée - la France doit mettre le paquet pour rénover les logements les moins efficaces énergétiquement. Une urgente mesure écologique et de justice sociale.

Pour l'heure, le pays compte quelque 4,8 millions de « passoires thermiques », des logements classés F ou G au diagnostic de performance énergétique (DPE). En 2017, le gouvernement s'est promis de rénover 500 000 logements par an aux normes élevées de bâtiment basse consommation (BBC – l'équivalent des classes A ou B) : seules 60 000 à 70 000 habitations ont bénéficié d'un tel lifting entre 2012 et 2016.

Pour accélérer le rythme et encourager les propriétaires à faire les travaux des logements mis en location, les député·e·s ont voté, lundi, un amendement à la loi climat, qui interdit les hausses de loyer dans les passoires thermiques. De plus, les logements étiquetés G seront considérés comme « indécents » à partir de 2025, puis les F en 2028.

Le tweet de Guillaume Garot, député PS de la Mayenne

Or pour l'opposition, il s'agit d'une interdiction « en trompe-l’œil », des mots de Vincent Descœur, député LR du Cantal (Le Monde). En effet, le classement en logement indécent donne seulement aux locataires les moyens d'effectuer des recours à l'encontre de leur propriétaire. Il est difficile de croire que la majorité des occupant·e·s précaires de logements auront le temps ou les moyens de saisir la justice contre leur bailleur.

En février, la mission d'information parlementaire sur la rénovation thermique des logements rappelait que pour obtenir un parc immobilier permettant l’atteinte de la neutralité carbone, « il faut, a minima, rénover 27,1 millions de logements » (LCP). Leur rapport recommandait d'interdire (formellement) la location des logements classés D dès 2030.

Quatre ONG ont déposé un nouveau recours devant le Conseil d'État pour faire annuler l'arrêté qui autorise provisoirement le retour des pesticides néonicotinoïdes sur les semences de betteraves sucrières. Générations futures, Pollinis, France nature environnement et Alerte des médecins sur les pesticides estiment que le droit européen n'est pas respecté : ces dérogations ne peuvent être accordées « qu’en cas d’urgence pour un usage contrôlé et limité, et lors de l’existence d’un danger qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens raisonnables. Ces obligations ne sont pas remplies : les néonicotinoïdes seront dans ce cas utilisés en enrobage de semence, et donc de façon préventive » indiquent les ONG dans un communiqué.

• Lundi, les Amis de la Terre et Survie ont annoncé se pourvoir en cassation contre le projet d'oléoduc géant de Total en Ouganda et en Tanzanie. Les ONG accusent la multinationale de ne pas respecter ses obligations légales en matière de prévention des violations des droits humains et des dommages environnementaux sur les lieux du projet. En décembre 2020, la cour d'Appel de Versailles avait décidé de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce, ce que contestent les organisations. - Communiqué

Le Japon s'apprête à déverser l'eau de Fukushima dans l'océan pacifique

Mardi, le gouvernement japonais a décidé de déverser dans l'océan l'eau polluée qui sert toujours à refroidir la centrale de Fukushima.

Il y a dix ans, le 11 mars 2011, à la suite d'un séisme, la côte pacifique du Japon est balayée par un puissant tsunami. Une série de destructions et de défaillances entraîne la fusion de trois réacteurs de la centrale de Fukushima Daiichi (lire notre article à ce sujet). Depuis lors, ceux-ci sont constamment refroidis à l'aide d'immenses quantités d'eau : 141 tonnes par jour. Le 18 mars, 1,25 million de tonnes d’eau dormaient dans plus de 1 000 réservoirs.

Les réacteurs 1, 2 et 3 sont entrés en fusion entre le 11 et le 14 mars. 50 employés sont restés sur place pour empêcher la fusion du coeur de ces réacteurs, synonyme de cataclysme © DR

Prévue pour l'automne 2022, la saturation des réservoirs d'eaux polluées est imminente. Depuis des années, le pays était à la recherche de la solution la moins dommageable pour évacuer le trop-plein. Mardi, le premier ministre japonais Yoshihide Suga a annoncé que l'eau serait déversée dans l'océan Pacifique (AFP).

L'opération devrait débuter dans deux ans. Pour l'heure, malgré un premier traitement, l'eau reste à 80% chargée de soixante-deux nucléides, dont du strontium-90 et du césium-137, à des niveaux supérieurs aux normes environnementales, explique le Monde. Tepco, la compagnie propriétaire de la centrale, promet qu'un second traitement permettra de faire baisser ces valeurs. Puis, un processus de dilution devrait diminuer la teneur en tritium. Mais quid de l'impact de cette substance radioactive sur la vie marine ? « Les connaissances relatives au comportement du tritium dans les organismes aquatiques sont limitées et relativement anciennes », indique l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, dans une note.

Une décision qui promet d'être très impopulaire. Relayé par l'AFP, un sondage de la chaîne de télévision NHK publié en mars indiquait que 51% des Japonais·es étaient opposé·e·s à cette solution, contre 18% qui la soutenaient. Greenpeace Japon, fédérations de pêcheurs et de consommateurs ont vertement critiqué le choix du gouvernement.

Mine “écologique” et terres rares bio-sourcées : un canular (trop) efficace

Poison d'avril. Le quotidien Ouest-France, la Chambre de Commerce et la mairie d'Angers, se sont fait berner par un projet de « mine écologique » proposée au budget participatif de la ville.

L'histoire est rapportée par le site de critique médias Arrêt sur Images (ASI). Le 9 mars, le budget participatif d'Angers reçoit une ambitieuse contribution : transformer les carrières voisines de Trélazé en mines de « terres rares écologiques ». A la manœuvre, la start-up angevine TECH-ology. Très inspirée, celle-ci propose une « robolution sociétale avec pour triptyque télétravail, robotique et fraternité ». Problème : elle n’existe pas.

Ouest-France s'enthousiasme (trop) vite pour ce projet, porté par « une agence de designers, plasticiens, codeurs et Djs angevins spécialisée dans la tech et l'écologie ». Le quotidien local interviewe le prétendu entrepreneur, « John Young », à Trélazé. Publié le 31 mars, l’article fait la Une de l'édition locale, rapporte ASI. Placardé dans toute la ville, il figurera également dans la revue de presse de la Chambre de Commerce du Maine-et-Loire

Supprimé depuis, l'article original publié par Ouest-France est accessible grâce à web.archive.org

« John Young » a promis 500 emplois au journaliste. « J'ai compris que c'était son moteur, beaucoup plus que l'écologie », explique celui-ci à ASI. Les six pages présentant le projet parodient allègrement les discours solutionnistes : « La solution viendra d'un smart reboot par les greentech », annonce ainsi TECH-ology.

L'intention de l'auteur : « une critique de la démocratie participative », et « de l'autorité conférée par le jargon, ou par l'anglais », ainsi qu’ « un questionnement sur l'impossibilité de résoudre la crise écologique par le progrès technique », rapporte encore Arrêt sur Image.

Alors que la fantasque proposition est toujours « en cours d'évaluation » du côté de la mairie d'Angers, le quotidien le plus lu de France a finalement démenti l'information en fin de semaine dernière.

Broute x Georges Méliès

Terre mal lunée. Dans l'un de ses derniers épisodes, la série pastiche Broute rend un tendre et vert hommage à Georges Méliès, en réalisant un court métrage écolo à la manière du cinéaste surréaliste français du début du XXème siècle.

© Broute

+ Tristan Saramon a contribué à ce numéro