La quotidienne

Agri coup dur

Le retour du gel, après celui de la verdure, jette un froid sur nos cultures.


Aggravé par le réchauffement, l'épisode de gel met à genoux vignerons et arboriculteurs

Froid effroi. Les conséquences de l'épisode de gel qui s'est abattu sur la France en milieu de semaine sont désastreuses pour les cultures, et elles sont aggravées par le réchauffement climatique.

Jeudi soir, le ministre de l'agriculture Julien Denormandie a annoncé l'activation du régime de calamité agricole, qui ouvrira la voie à une indemnisation des exploitant·e·s les plus touché·e·s (France Info). Alors qu'une vague de froid s'abattait sur le pays, le mercure est descendu, pendant plusieurs nuits, bien en-dessous de -2 ou -3°C, la température à laquelle peuvent résister les bourgeons et les jeunes feuilles.

Dans les régions viticoles du bordelais, de la Bourgogne, ou dans le sud-est, il a fait jusqu'à -7°C. A cette température, le gel de la sève « brûle » les fleurs qui commençaient à éclore. Or, sans fleur, il n'y aura pas de fruit.

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« C'est un carnage ! Jusqu'à 100% des vignes ont été impactées dans certaines zones. C'est historique. »

- Frédéric Rouanet, président du syndicat des vignerons de l'Aude

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Les images ont fait le tour des JT : dans de nombreux domaines, les viticulteur·rice·s ont utilisé des moyens de fortune (torches, éoliennes, etc.) pour tenter de garder leurs cultures au chaud. Les milliers de chandelles allumées ont provoqué des épisodes de pollution aux particules fines le long de la vallée du Rhône (20 Minutes). Des moyens dérisoires qui n'auront pas permis de sauver des récoltes qui s'annoncent déjà faméliques.

"A – 6°C, pas grand-chose ne peut résister !" les images de la veillée de viticulteur·rice·s en Gironde © France 3

Outre la vigne, les exploitations arboricoles sont lourdement touchées, tout comme celles qui pratiquent certaines grandes cultures, comme le colza. 20 à 30 000 hectares de betteraves à sucre pourraient avoir été perdus, d'après un expert de l'institut technique de la betterave (ITB).

Si le gel au début du printemps est un phénomène habituel, ses conséquences sont aggravées par le réchauffement climatique : « le réveil de la végétation étant de plus en plus précoce, les gelées tardives sont d’autant plus préjudiciables pour les arboriculteurs », explique au Monde le climatologue Clément Viel, spécialiste des prévisions saisonnières à Météo-France. Les records de chaleur battus à la fin du mois de mars dernier (Météo-France) avaient conduit à l'éclosion soudaine des fleurs, fauchées cette semaine par le gel.

• Jeudi, la SNCF a officialisé la première commande française de train à hydrogène. Construits par Alstom, ces douze trains seront livrés d'ici 2023 à quatre régions; Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Occitanie. Ces rames « bimodes » (pouvant aussi être alimentées par les caténaires électriques) circuleront sur des lignes régionales dont l’électrification n’a pas été achevée ou qui doivent être rouvertes, permettant de se passer de locomotives au diesel, explique le Monde.

L'ancienne secrétaire d'Etat à la transition écologique Brune Poirson pourrait rejoindre le groupe hôtelier Accor, dont elle deviendrait directrice du développement durable, selon le JDD. Mardi, elle avait quitté son fauteuil de députée du Vaucluse pour « se tourner vers d'autres horizons » que la politique. - Le JDD (abonnés)

Celle qui botte le cul aux idées reçues

On se raconte des salades. Dans Celle qui nous colle aux bottes, attendrissant dialogue intergénérationnel entre une fille et son père, Marine de Francqueville abat les haies qui séparent citadins-écolo partisans du tout bio et agriculteurs conventionnels rétifs à tout changement.

C'est une histoire touchante que met en scène la première bande-dessinée de cette jeune illustratrice et réalisatrice de courts-métrages. Lors de son mémoire de fin d'études, Marine de Francqueville choisit de s'intéresser à « l'agriculture ». Thème qui la conduit tout droit chez ses parents à Trigny, dans la Marne, où son père a repris la ferme familiale dans les années 1980. Avec ses tracteurs, ses engrais et son roundup – le tristement célèbre herbicide à base de glyphosate de Monsanto - il y cultive des tonnes de céréales. « Grâce au productivisme on peut nourrir le monde », se ravit-il. « Et l'environnement ? Et la santé des gens ? Et la vie ? » rétorquent sa fille et le lecteur.

Un débat entre deux époques superbement illustré, où la volonté honnête de comprendre le point de vue de l'autre fait de cette bédé un objet rare. On appréciera particulièrement l'humour de l'autrice, la recherche de subtilités et l'amour qui se dégage du dialogue de papa et « minouche ». Une bande-dessinée en noir et blanc, qui réussit à mettre des couleurs dans la relation, écorchée, entre paysans et citadins. Parce que rien n'est jamais si simple que nos idées reçues et qu'il existe « cinquante nuances d'engrais ».

Celle qui nous colle aux bottes, Marine de Francqueville, Éditions Rue de l'échiquier, avril 2021, 208p, 21,90€. À paraître le 22 avril. Les premières pages sont feuilletables ici.


Une chronique signée Juliette Quef

Le vendredi, chez Vert, c'est le jour du Do it yourself (faites-le vous-même) ! Aujourd'hui, on vous propose de quoi préparer vos semis et plantations alors qu'arrive le printemps avec cette recette de désherbant naturel garanti sans glyphosate.

Vous pouvez cliquer sur l'image pour l'afficher en plein écran et l'enregistrer d'un coup de clic droit © Vert

Sus au gluten ?

Il nous colle aux pâtes. En quelques années, le nombre de personnes qui déclarent une sensibilité au gluten a explosé et les régimes et produits alternatifs font florès. Pour un nombre croissant d'occidentaux, il est désormais l'aliment à abattre. Or cette protéine qui naît du mélange de la farine de blé avec de l'eau est présente dans nos régimes alimentaires depuis des milliers d'années. Comment expliquer une telle épidémie ?

C'est la question à plusieurs milliards que pose le nourrissant documentaire Gluten, l'ennemi public (2020), réalisé par Patrizia Marani. D'autant que, contrairement à une idée reçue, nos blés contiennent plutôt moins de gluten que dans le passé. Mais celui-ci a changé, il a déménagé sous d'autres latitudes que sa Méditerranée natale, s’est gorgé de pesticides au même rythme que l’agriculture mondiale. Une plongée vertigineuse à travers les sols pleins d'intrants de nos champs, les lignes de production des poisons de l'industrie et nos intestins dépités.

Gluten, l'ennemi public (2020), Patrizia Marani, disponible jusqu'au 12 mai en replay sur le site d'Arte.

© Arte