C’est odieux. En 2021, la concentration en dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère dépassera de 50% les niveaux de l’ère pré-industrielle. Un seuil qui nous ramène trois millions d’années en arrière.
Pendant quelques jours, entre février et mars derniers, le taux de CO2 a dépassé 417 parties par million (ppm), rapporte Carbon Brief. Une concentration 1,5 fois plus élevée qu’à l’ère pré-industrielle, stable à 278 ppm jusqu’à la fin du 18e siècle.
Un chiffre effarant mesuré à Hawaï (Etats-Unis), loin de toute pollution, dans l’observatoire de Mauna Loa. Depuis 1958, celui-ci mesure l’évolution du CO2 présent dans l’atmosphère. Il a permis de tracer la courbe de Keeling (du nom de son fondateur), qui fait apparaître un autre phénomène : les variations – de l’ordre de plus ou moins 3 ppm – de la concentration selon les saisons. Pendant l’hiver, les végétaux de l’hémisphère nord relâchent du CO2 en perdant leurs feuilles, jusqu’à un pic en mai. Puis, au printemps et à l’été, ils recommencent à capter du carbone. Le point bas est atteint au mois de septembre.

Pour évaluer les concentrations de CO2 antérieures à 1958, on utilise la technique du carottage glaciaire. Une méthode française, mise au point en 1980, qui s’appuie sur l’analyse de bulles d’air piégées dans la glace.
Ces techniques nous montrent une chose : « Il faut remonter à 3 millions d’années, lors du Pliocène, pour retrouver ces taux », a rappelé le paléoclimatologue Gilles Ramstein sur Mediapart. La température était alors de 2 à 3 degrés supplémentaires, le niveau des océans supérieur de 15 mètres, les calottes glaciaires absentes.
A l’époque, le climat était à l’équilibre et se mettait lentement en place. « En quelques siècles, on change le contenu atmosphérique de façon fulgurante et la calotte ne réagit pas immédiatement », explique le chercheur. Du fait de cette inertie : « Si on reste plusieurs siècles avec ce CO2, l’océan continuera de se réchauffer et les calottes de fondre ».