Compensation écologique : attention l’arnaque !

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Une idée bluffante. Plutôt que d’in­ter­dire cer­tains pro­jets d’amé­nage­ment, les pou­voirs publics deman­dent que leurs impacts soient « com­pen­sés » par la restau­ra­tion et/ou la pro­tec­tion d’é­cosys­tèmes sim­i­laires à ceux détru­its.

La notion de com­pen­sa­tion écologique est apparue pour la pre­mière fois en France dans la loi de pro­tec­tion de la nature de 1976. Le lég­is­la­teur y oblige les por­teurs de pro­jets à se soumet­tre au fameux trip­tyque « éviter-réduire-com­penser » dans l’ob­jec­tif d’avoir une « absence de perte nette voire un gain de bio­di­ver­sité ». Sur le papi­er, la com­pen­sa­tion per­met poten­tielle­ment de génér­er encore plus de bio­di­ver­sité que si le pro­jet n’avait pas lieu ! Dans les faits, ce n’est pas ce qui arrive.

D’une part, parce que l’équiv­a­lence entre les espaces détru­its et ceux restau­rés est une impos­ture sci­en­tifique. L’idée que les écosys­tèmes sont sub­sti­tu­ables les uns aux autres ne résiste pas aux analy­ses des éco­logues. L’ex­em­ple de Notre-Dame-Des-Lan­des, qui aurait dû être le plan grand pro­jet de com­pen­sa­tion de France, est iconique de ce point de vue. Les 1 650 hectares de zones humides impactés par le pro­jet d’aéro­port com­pre­naient onze habi­tats pro­tégés, deux zones naturelles d’intérêt écologique, fau­nis­tique et floris­tique et qua­torze espèces pro­tégées. La pos­si­bil­ité de recon­stituer ailleurs la com­plex­ité de ces écosys­tèmes et de leurs inter­ac­tions a été très rapi­de­ment con­testée.

Le pro­jet de loi cli­mat et résilience prévoit d’in­ter­dire les nou­velles zones com­mer­ciales de plus de 1000m2, sauf si un pro­jet de com­pen­sa­tion existe  © Jean-Louis Zim­mer­man (Auchan d’Av­i­gnon) 

D’autre part, parce que le rap­port de force entre les amé­nageurs et les fonc­tion­naires cen­sés con­trôler les pro­jets, est trop déséquili­bré pour per­me­t­tre des opéra­tions ambitieuses. Pressés par des exi­gences poli­tiques rel­a­tives au développe­ment économique des ter­ri­toires, par le manque de temps et de moyens, les agents de l’État ont peu de marge de manœu­vre face aux dossiers adroite­ment ficelés par des sociétés d’en­ver­gure inter­na­tionale. Au final, 80% des opéra­tions de com­pen­sa­tions ne per­me­t­tent pas d’éviter une perte de diver­sité, a mon­tré une étude réal­isée par des sci­en­tifiques du Muséum nation­al d’histoire naturelle et d’AgroParisTech en 2019. Pour en savoir plus sur ce sujet, con­sul­ter ce dossier sur l’é­conomie verte.