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«Climate Q&A» : l’intelligence artificielle de ChatGPT au service du climat

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Cli­mat­G­PT. Eki­met­rics, un cab­i­net spé­cial­isé en intel­li­gence arti­fi­cielle, vient de dévelop­per Cli­mate Q&A, le Chat­G­PT du cli­mat. Encore en phase de test, l’outil per­met d’interroger facile­ment les rap­ports sci­en­tifiques les plus impor­tants, dont ceux du Giec.

Quelles sont les prin­ci­pales caus­es du dérè­gle­ment cli­ma­tique ? Pourquoi l’Accord de Paris est-il si impor­tant ? Quels sont les liens entre iné­gal­ités de genre et change­ment cli­ma­tique ? Autant de ques­tions que l’on peut désor­mais pos­er à «Cli­mate Q&A», surnom­mé «GiecG­PT». Cette intel­li­gence arti­fi­cielle — encore en test — sélec­tionne les dix extraits les plus per­ti­nents au sein d’une ving­taine d’éminents rap­ports sci­en­tifiques, dont ceux du Groupe d’experts inter­gou­verne­men­tal sur l’évolution du cli­mat (Giec), de l’IPBES (le «Giec de la bio­di­ver­sité») ou de l’Agence inter­na­tionale de l’énergie.

Le but? «Per­me­t­tre au grand pub­lic et aux jour­nal­istes d’avoir des répons­es sour­cées sur les sujets envi­ron­nemen­taux», explique à Vert l’instigateur du pro­jet, Theo Alves da Cos­ta, chargé de l’unité Développe­ment durable et cli­mat chez Eki­met­rics. L’outil reprend une tech­nolo­gie déjà dévelop­pée par l’entreprise pour débunker le green­wash­ing.

Quand on pose une ques­tion à Cli­mate Q&A, un pre­mier algo­rithme sim­ple va trou­ver les dix pas­sages d’études qui y répon­dent le mieux. Puis, Chat­G­PT trie les infor­ma­tions per­ti­nentes et les refor­mule. Il donne aus­si la source et la page du rap­port auquel il se réfère. Qua­tre data sci­en­tists et un con­sul­tant envi­ron­nement ont fer­rail­lé pen­dant deux mois pour dévelop­per cet out­il. «Le gros du taff, c’est ce qu’on appelle des “abla­tion tests”, qui con­sis­tent à tester l’algorithme pour des ques­tions aux­quelles il n’est pas cen­sé répon­dre. On lui a posé des ques­tions cli­matoscep­tiques, évi­dentes ou non, et on a testé com­ment Chat­G­PT répondait seul. Grâce aux sources du Giec, c’est beau­coup plus pré­cis», explique Théo Alves da Cos­ta.

Cap­ture d’écran de Cli­mate Q&A

«C’est puis­sant, on voit bien l’in­térêt pour éviter les recherch­es fas­ti­dieuses. C’est plus “user friend­ly” que de chercher dans le pdf du rap­port», a observé la coprési­dente du groupe 1 du Giec, Valérie Mas­son-Del­motte lorsque Vert lui a fait tester l’outil. Elle regrette toute­fois que d’autres sources que le Giec soient inter­rogées. Résul­tat : «il y a des choses con­tra­dic­toires» entre plusieurs sources. Pour elle, l’algorithme devrait par­tir des résumés pour les décideurs du dernier rap­port (pub­lié entre août 2021 et mars 2023) afin de «respecter la hiérar­chie des infor­ma­tions présen­tées». Elle souligne aus­si qu’il n’interroge pas les notes de bas de page, dont cer­taines con­ti­en­nent des infor­ma­tions majeures. «Je ne sais pas si le secré­tari­at du Giec pour­rait voir d’un bon œil un out­il comme ça, ça pose la ques­tion de la neu­tral­ité des algo­rithmes», relève-t-elle encore.

L’outil est égale­ment très sen­si­ble à la for­mu­la­tion des ques­tions, et une légère vari­a­tion peut génér­er des répons­es très dif­férentes. «Si on pose la ques­tion : “quelles sont les prin­ci­pales caus­es du change­ment cli­ma­tique ?», on ne com­prend pas que ce sont les activ­ités humaines, parce que la réponse com­mence par men­tion­ner les change­ments naturels, con­state Yam­i­na Saheb, autrice du volet du dernier rap­port du Giec con­sacré à l’atténuation (la baisse des gaz à effet de serre) du change­ment cli­ma­tique. Pour avoir la bonne réponse, il faut deman­der : “le change­ment cli­ma­tique est-il causé par les humains” ?». La sci­en­tifique invite les créa­teurs de Cli­mate Q&A à amélior­er cet aspect avec des auteur·ices du Giec. Ces réserves mis­es à part, elle con­sid­ère que cet out­il est «une excel­lente idée».

Par­mi les risques que présente cet out­il encore en cours de développe­ment : celui de don­ner des répons­es approx­i­ma­tives sur des sujets inflam­ma­bles, comme sur les réserves de sub­sti­tu­tion ou «mégabassines». «Ça reste une intel­li­gence arti­fi­cielle et il faut pren­dre ses répons­es avec beau­coup de recul, notam­ment pen­dant la phase de test», recom­mande Theo Alves da Cos­ta. A l’heure de l’écriture de ces lignes, l’outil n’est disponible qu’en anglais, mais il le sera rapi­de­ment dans toutes les langues. Une option de recherche unique­ment dans les rap­ports du Giec sera pro­posée par défaut. À not­er qu’une recherche sur Cli­mate Q&A émet qua­tre fois plus de CO2 qu’une requête sur Google, «en rai­son de l’API de Chat­G­PT».

👉 Cliquez ici pour essay­er la ver­sion beta de Cli­mate Q&A.