Tous les printemps silencieux


Un numéro où l'on verra comment la destruction à bas bruit de la biodiversité réduit au silence les campagnes.

Le Conseil constitutionnel confirme la fin de l'exportation de pesticides interdits

Leur intense lobbying a fait pschitt. Dans une décision historique annoncée vendredi 31 janvier, le Conseil constitutionnel a confirmé la fin de l'exportation de pesticides interdits en Europe fabriqués sur le sol français.

Le Conseil a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité posée par l’Union de l’industrie de la protection des plantes (UIPP), le principal lobby des producteurs français de pesticides. Au nom de la liberté d'entreprendre, ceux-ci réclamaient l'annulation d'un article de la loi sur l'alimentation, votée en octobre 2018, qui interdit « la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées » par la réglementation européenne. Plusieurs fabricants implantés en France y produisent toujours certains pesticides interdits en Europe depuis 10 ou 15 ans, à destination des pays dont les législations sont moins contraignantes, comme Vert l'avait raconté.

Le Conseil a jugé que « la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitu[ait] un objectif de valeur constitutionnelle », et que l'on pouvait l'opposer à la liberté d'entreprendre. 

La décision reconnaît également le caractère international de la protection de l'environnement : « le législateur est fondé à tenir compte des effets que les activités exercées en France peuvent porter à l'environnement à l'étranger »

Une décision saluée par plusieurs ONG, qui espèrent que celle-ci leur fournira les moyens de s'opposer à certains textes de loi ou projets aux conséquences environnementales désastreuses.

L'interdiction confirmée par le Conseil entrera en vigueur en 2022. A lire dans Actu Environnement et dans la Croix (abonnés).

Vers un « pic de douceur »

Une « douceur exceptionnelle », ça a l'air sympa, pas vrai ? Hélas, la vague de tiédeur qui recouvre actuellement le pays n'a rien de désirable

24,2°C à Biarritz, 23,5°C à Béziers, 22,1°C à Montpellier... Dimanche 2 février, plusieurs stations de météo France ont battu des records de température pour un début de mois de février, comme l'a relevé Etienne Kapikian, prévisionniste à Météo France, sur Twitter

En altitude, des sommets sont également atteints. A Chamonix, les températures relevées pour novembre, décembre et janvier, dépassent 2,1°C de moyenne, du jamais vu. Il y a fait 13 degrés le 31 janvier, et pour la première fois, le mercure n'est jamais passé en-dessous des -10°C depuis le début de l'hiver.

Le bulletin météo du 3 février diffusé sur TF1.

Des températures pré-estivales au cœur de l'hiver, dont le « pic de tiédeur » devrait être atteint ce lundi. « Globalement on a des masses d’air plus chaudes qu’avant, donc à situation météorologique égale, on a tendance à battre plus de records de douceur que par le passé », a expliqué à 20 Minutes François Jobard, lui aussi prévisionniste à Météo France. Autrement dit, le réchauffement climatique accentue les phénomènes habituels. 

Il s'agit du deuxième début d'hiver le plus chaud jamais mesuré après 2015-2016. Entre décembre et janvier, la température moyenne a atteint 7,6 °C, soit 2,3 degrés au-dessus de la moyenne sur cette période, toujours selon Météo France. A lire dans 20 Minutes.

 

Homero Gomez, défenseur des papillons et victime probable des cartels

Sa défense des papillons lui aura probablement coûté la vie. Porté disparu pendant plusieurs jours, Homer Gomez Gonzalez a été retrouvé mort au fond d'un puits, mercredi 29 janvier, dans l'Etat Mexicain du Michoacan.

© Page Facebook de Homero Gomez

Populaire sur Facebook, ce défenseur de l'environnement avait créé un sanctuaire pour la protection des papillons monarques, des insectes migrateurs menacés par la déforestation et l'usage d'herbicides, comme le raconte le Monde. Deux dangers accrus ces dernières années par la culture d'avocat, une activité qui fait de plus en plus recette, y compris chez les cartels. 

L'ingénieur agronome de 50 ans faisait figure d'opposant à leurs pratiques. Il avait notamment créé des patrouilles dans le but de protéger les forêts de coupes illégales. Homero Gomez était menacé de mort. Son décès suspect a été qualifié d' « homicide » par Greenpeace au Mexique. Le pays figure parmi les plus meurtriers pour les défenseurs de l'environnement : au moins 12 d'entre eux y sont morts en 2019. A lire dans le Monde.

Des espèces en trop : le monde vu par les agrochimistes

En Europe, les fabricants de pesticides décident comment sera évalué l'impact de leurs produits. Et selon eux, la disparition d'une espèce est acceptable

L'Europe est en train de se fixer un nouveau cadre réglementaire pour protéger l'environnement. Or, comme l'explique le journaliste du Monde Stéphane Foucart, dans une chronique indispensable, la vision du monde des agrochimistes est en train de l'emporter. 

La nouvelle philosophie qui pénètre progressivement la réglementation européenne est basée, non plus sur la protection de la nature elle-même, mais sur la préservation des services qu'elle nous rend. Selon cette façon de penser, on pourrait décider d'éradiquer une espèce si une autre occupe la même fonction dans un système.

Dans un document rédigé par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), les espèces sont déjà définies comme des « unités de fourniture de services écosystémiques ». Certaines d'entre elles sont en situation de « redondance fonctionnelle » avec d’autres.

Voilà qui sied parfaitement aux producteurs de pesticides, qui financent études et chercheurs allant dans ce sens. Ces derniers, explique encore Stéphane Foucart, sont pourtant « fortement impliqués dans le processus piloté par la Commission et visant à promulguer le nouveau cadre réglementaire ». 

Voilà qui explique peut-être la chute fulgurante de la biodiversité dans les campagnes européennes. Une étude publiée en octobre 2019 dans la revue Nature s'était penchée sur le cas de 150 prairies allemandes. Les chercheurs avaient mesuré qu'entre 2008 et 2017 la biomasse des arthropodes (insectes et araignées) y avait chuté de 67%. A lire dans le Monde.

Le printemps silencieux, de Rachel Carson

Des campagnes sourdes, vidées de leurs insectes et oiseaux par les pesticides : c'était la vision prophétique de la biologiste Rachel Carson, contenue dans son essai Printemps silencieux, publié en 1962. 

A l'époque, cette pionnière de la lutte écologiste se battait pour l'interdiction du DDT, pesticide utilisé massivement aux Etats-Unis (et ailleurs). De nombreux travaux avaient établi sa toxicité pour les humains et les animaux.

Rachel Carson et son livre, Printemps silencieux © DR

L'ouvrage a bientôt 60 ans mais tout y est déjà : les études trompeuses sponsorisées par les lobbies, les agences de régulation aux mains des agrochimistes... Le Printemps silencieux a connu un immense succès aux Etats-Unis et a entraîné l'interdiction du DDT.

En France, une personne sur deux admet qu'elle pourrait réaliser son trajet à vélo, en partie ou en totalité, si les infrastructures le permettaient. C'est ce que révèle le Baromètre des mobilités du quotidien, une étude réalisée par la fondation Nicolas Hulot et la plateforme Wimoov.  Autres obstacles au passage à la bicyclette : des trajets trop longs (58%), le transport d’autres personnes ou des objets (32%), ou l’incapacité physique (20%), comme l'a noté le Figaro. Le journal Libération avait repéré qu'en 2015, 60% de celles et ceux qui avaient moins d'un kilomètre à parcourir pour se rendre au travail, choisissaient de prendre la voiture. A lire sur le site de la Fondation Nicolas Hulot.

« Les voitures, ça pue ! Les voitures, ça tue ! »

Circulation, bruit, pollution... En 1972 déjà, des manifestants à bicyclette envahissaient les boulevards parisiens pour lutter contre le règne de la voiture dans les centres-villes. Brut a déterré de savoureuses images d'archives d'un de ces grands raouts cyclistes, ancêtres des vélorutions dont la dernière sortie s'est déroulée samedi 1er février à Paris.

© Brut