Lettres à France


Associations, journalistes, députés, lobbies... Chacun a pris sa plus belle plume pour tenter de changer le monde dans son sens. 

Le courrier gênant du Medef au ministère de l’écologie 

La liste des manœuvres entreprises par les organisations professionnelles pour être dispensées d'écologie pendant la crise s'allonge. Le JDD vient de dévoiler un embarrassant courrier écrit par le président du Medef, principal syndicat des patrons français, à la ministre de l'environnement.

Dans cette lettre à Elisabeth Borne datée du 3 avril, Geoffroy Roux de Bézieux réclame rien de moins qu'« un moratoire sur la préparation de nouvelles dispositions énergétiques et environnementales » d'une durée « de l'ordre de six mois ». Et ce, afin de « maintenir l’activité au service de la Nation et préserver l’emploi »

En-tête du courrier de Geoffroy Roux de Bézieux à Elisabeth Borne.

Dans le viseur du patron des patrons : la loi sur l'économie circulaire, mais aussi la loi d'orientation des mobilités (dite « LOM »). Les décrets qui préciseront leur application sont en train d'être rédigés : le Geoffroy Roux de Bézieux demande qu'ils soient remis à plus tard. 

La LOM doit expliciter le cadre dans lequel seront déployées les futures zones à faibles émissions (ZFE) : des aires urbaines interdites aux véhicules les plus polluants que combat le Medef au nom de la sauvegarde de l'industrie automobile, toujours dans ce courrier.

Le président du syndicat réclame également le report de la publication de deux autres textes importants : la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Ces deux documents constituent des feuilles de route à destination du gouvernement en matière, respectivement, d'énergie et de réduction des gaz à effet de serre. Hélas pour le Medef, ils ont été publiés hier.

« Des ajustements de calendrier sont envisageables au cas par cas pour prendre en compte la période de confinement qui a rendu impossible la poursuite de certains travaux de consultation ou de préparationa expliqué à Libération le cabinet d'Elisabeth Borne. Mais il n’y a aucune logique de moratoire, il n’y a pas de remise en question des objectifs ». Dont acte. 

Le président et les tomates hors-sol

Quel meilleur symbole du labeur de la terre que des fruits cultivés hors-sol dans une serre chauffée ? La Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB) a très peu goûté la visite d'Emmanuel Macron dans une exploitation industrielle de tomates en Bretagne.

Censé rendre hommage à « toutes celles et tous ceux qui nous nourrissent », le président de la république s'est rendu, tour à tour, dans un supermarché et dans une production de tomates sous serre. Ce qui a provoqué l'ire de la FNAB, qui s'est fendue d'un communiqué« Le Président de la République a choisi de valoriser le modèle agricole hors sol, artificiel, déconnecté du monde vivant, un modèle qui devrait être remis en question quand on comprend le rôle que l’agriculture a joué et jouera encore dans les crises sanitaires et écologiques, passées et à venir », écrit le syndicat du bio. 

Emmanuel Macron célèbre toutes celles et tous ceux qui « cultivent la terre », dans une exploitation de tomates hors-sol. 

Une visite d'autant plus incompréhensible, selon la Fnab, que le petit commerce en circuits-courts explose à la faveur du confinement. « Depuis plus de trois ans, l’agriculture biologique est victime de l’absence totale de vision écologique de l’Elysée : retards de paiement, suppression des aides au maintien, objectifs de développement mensongers », dénonce le syndicat, qui « réitère sa demande que l’Etat ne laisse pas seul le marché donner le cap de la transition agro-écologique. Il serait inacceptable que les plans de relance ne soient pas conçus comme des accélérateurs de transition écologique et sociale ».

Un moratoire sur les épandages de pesticides 

La pollution de l'air est soupçonnée par un nombre croissant d'études d'aggraver la pandémie de Covid-19. Mais une source de pollution est restée sous les radars jusqu'à maintenant. Dans une tribune, le journaliste Fabrice Nicolino demande un moratoire sur l'épandage de pesticides à proximité des habitations.

En avril, une étude italienne a suggéré que les particules fines participeraient à propager le coronavirus dans l'air. Une autre étude, publiée par l'université américaine de Harvard, soupçonne ces mêmes particules d'aggraver la mortalité liée au Covid-19. 

Si le rôle des épandages d'engrais dans la pollution aux particules fines est bien connu, celui des pesticides l'est moins. Or, comme l'explique Fabrice Nicolino, lorsqu'ils se retrouvent en suspension dans l'air, les produits phytosanitaires utilisés par les agriculteurs jouent le même rôle. Dans un document publié à l'été 2019, l'Institut national de la recherche agronomique (Inrae) rappelle que « les activités agricoles sont responsables de 28 % des émissions françaises de particules de diamètre inférieur à 10 micromètres, comme les composés azotés ou les pesticides ».

© Zeynel Cebeci

En outre, depuis plusieurs semaines, les distances minimales entre zones d'épandage de pesticides et habitations ont été divisées par deux dans 25 départements (dont tous ceux de Bretagne). C'est ce qu'ont dénoncé une vingtaine de député•e•s, principalement issu•e•s de la majorité, dans une lettre adressée au ministère de l'agriculture. 

Les préfets•ètes de ces départements ont autorisé les agriculteurs à « revoir ces distances à trois mètres pour les cultures basses et cinq mètres pour les cultures hautes », contre cinq et dix mètres respectivement, ont écrit les signataires. Comme Vert l'avait détaillé, le gouvernement a introduit plusieurs possibilités de déroger à ces distances, pourtant jugées dérisoires par les associations. 

Dans ce contexte, Fabrice Nicolino et Nous voulons des coquelicots, l'organisation qu'il préside, réclament l’ouverture d’une enquête indépendante avec contrôle parlementaire sur le rôle des pesticides dans l'aggravation de l'épidémie. Et dans l’attente de ses résultats, un moratoire sur leur épandage près des habitations. A lire dans le Monde (abonnés).

Et si l'on profitait du confinement pour réapprendre à faire certaines choses par nous-mêmes ? Qu'à cela ne tienne, le vendredi, chez Vert, c'est le jour du Do it yourself ! Aujourd'hui, la recette d'un gel à raser maison, bon marché et écologique. Cette recette est issue du guide de la Famille (presque) zéro déchet (2016 – Thierry Souccar éditions). 

Cliquez sur la recette pour l'agrandir et la télécharger d'un coup de clic droit. © Vert

Pas de confinement qui tienne, tous les ingrédients sont, en principe, disponibles dans les épiceries et supermarchés bio. Précisons que les huiles essentielles sont en option et qu'elles sont déconseillées aux enfants et aux femmes enceintes.

Portraits d’insectes

La guêpe-coucou comme vous ne l'avez jamais vue. Insecte assassin, chrysomèle du haricot, charançon vert soyeux... Le Guardian nous offre une improbable galerie de potraits d'insectes réalisée au microscope par le photographe Daniel Kariko. Ces images hallucinatoires sont tirées de son ouvrage Aliens among us, paru ce mois-ci.

Images tirées du livre Aliens among us, du photographe Daniel Kariko.