Les puissants font le fond des puits


Si les forêts tropicales perdent leur faculté de stocker le CO2, les dirigeants européens conservent toute leur capacité à décevoir.

CO2 : la France vit à crédit

A partir de ce jeudi 5 mars, la France vit à crédit. En quelque sorte. Pour symboliser l'effort qu'il reste à accomplir avant de parvenir à la neutralité carbone, quatre ONG ont mis sur pied un nouvel indicateur : le « jour du dérèglement »

La France s'est engagée à atteindre zéro émissions nettes de CO2 d'ici à 2050 : c'est-à-dire qu'elle ne devra plus émettre davantage de gaz à effet de serre que ce qu'elle n'est capable de capter, au moyen de puits de carbone, comme les forêts.

Dans la Stratégie nationale bas-carbone, la feuille de route que s'est fixée le gouvernement, il est écrit que pour ce faire, le pays doit abaisser ses émissions à 80 millions de tonnes équivalent CO2 par an. Or, en 2020, celles-ci atteindront 450 millions de tonnes environ, selon les calculs effectués par le cabinet Carbone 4 et relayés par 20 Minutes

Rapporté au nombre de jours dans l'année, la France a donc déjà produit l'équivalent de ce qu'elle devra émettre en une année entière pour respecter ses engagements. Faisant de ce jeudi 5 mars le jour du dérèglement, nouvel indicateur mis sur pied par Notre affaire à tous, Greenpeace, la Fondation Nicolas Hulot et Oxfam pour mettre le gouvernement face à l'urgence et à l'ampleur de la tâche. Ces organisations, qui ont assigné l'Etat en justice dans le cadre de l'Affaire du siècle, ont annoncé qu'elles répèteraient l'opération chaque année. A lire dans 20 Minutes.

Réouverture de l'abattoir Sobeval de Dordogne

Moins d'une semaine après sa fermeture en raison de « non-conformités » révélées par l'association L214, l'abattoir Sobeval de Dordogne est autorisé à rouvrir

L'abattoir de veaux pourra reprendre son activité d'abattage « conventionnel », « sous réserve […] d'une supervision renforcée assurée par une vétérinaire nouvellement recrutée par l'entreprise », a indiqué, mercredi 4 mars, la préfecture de Dordogne dans un communiqué

L'autorisation intervient après un test, réalisé mardi 3 mars par les services de l'Etat qui « a permis de vérifier que (…) l’abattage respectait pleinement la réglementation en matière de protection animale ». A la suite d'une nouvelle évaluation, prévue dans deux semaines, Sobeval pourra reprendre ses abattages rituels (casher et halal).

Version "light" de l'enquête vidéo menée par L214 dans l'abattoir Sobeval de Dordogne.

« Ecoeurant »a réagi L214, qui accuse l'Etat d'avoir cédé à la pression « de syndicats agricoles et d'autres intérêts économiques privés ». A l'appel de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA), branche locale de la FNSEA, des éleveurs se sont rendus à Périgueux, mardi 3 mars, pour déverser du fumier et du lisier devant la préfecture de Dordogne. « En 3 jours, il est impossible d'avoir pallié aux défauts de structure et de formation du personnel au sein de cet abattoir », a déploré Brigitte Gothière, cofondatrice de l'association. 

Dans une vidéo, L214 avait révélé plusieurs abattages de veaux réalisés dans des conditions illégales sur le site de Sobeval à Boulazac. A lire dans 20 Minutes.
 

La loi climat, une occasion manquée

Greta Thunberg n'est, de loin, pas la seule a désespérer du texte de la nouvelle loi climat, dévoilée mercredi 4 mars par la Commission européenne, censée donner corps à son « green deal ». 

Le Réseau action climat, qui regroupe plus de 30 organisations environnementales, a déploré que la loi climat, détaillée par Vert, ne soit « pas à la hauteur des promesses du green deal européen ». Les objectifs annoncés pour 2030 (une réduction de 50 à 55% des émissions de CO2 par rapport à 1990) et 2050 (année à laquelle l'Union européenne doit parvenir à la neutralité carbone) paraissent trop lointains et trop peu contraignants. 

Comme le RAC, Greenpeace plaide pour accroître l'effort à 65% de réduction des émissions d'ici 2030. Son porte-parole sur les questions climatiques, Clément Sénéchal, a déploré sur Twitter que le texte présenté par la Commission ait fait l'impasse sur de nombreux sujets : « aucun plan pour mettre un terme aux subventions pour les énergies fossiles […] Rien non plus sur les politiques sectorielles clé : fin de la déforestation importée, fin prochaine des véhicules à moteurs thermiques, régulation du secteur aérien, fin de l'agriculture industrielle et de la surconsommation de produits animaux, etc. »

Frans Timmermans, vice-président de la Commission européenne en charge du "green deal" © Parlement européen

« Nous n’avons pas de garantie que tous les secteurs émetteurs de gaz à effet de serre, comme celui de l’agriculture, soient couverts par cette loi, a indiqué l'eurodéputée écologiste Marie Toussaint à MediapartIl n’y a rien non plus sur les émissions de gaz importées [le CO2 généré lors de la fabrication de produits à l'étranger, vendus ensuite en Europe - Ndlr] ni sur les traités de libre-échange »

« Révolutionnaire » pour Frans Timmermans, vice-président de la Commission en charge du green deal, cette loi climat commence à ressembler à une occasion manquée. Une nouvelle phase de négociation entre les principaux organes de l'UE (le trilogue) à son sujet doit maintenant s'ouvrir.

L'intense lobbying des fossiles avant la loi climat européenne

Lors des mois et des semaines qui ont précédé la présentation de la nouvelle loi climat européenne, les producteurs d'hydrocarbures ont fait feu de tous gaz pour adoucir le texte présenté par la Commission européenne

Dans une riche enquête, menée de concert avec le Guardian et la Tageszeitung, Libération met en lumière les coulisses de l'intense lobbying mené à Bruxelles par les entreprises pétrolières et gazières. 

Dîners et forums en compagnie de ministres et de membres de la haute administration bruxelloise mais interdits aux journalistes et ONG, multiplication des réunions à quelques semaines de la présentation de la loi climat... L'industrie fossile a décidé de ne pas s'en remettre au hasard.

En plus des millions d'euros qu'elle dépense chaque année en activités classiques de lobbying, l'industrie fossile investit également les think tanks et les cabinets d’expertise, moyen plus discret de tenter d’influencer les législateurs, comme l'explique Libération.

Anecdote savoureuse : l'industrie finance aussi les médias européens pour véhiculer, notamment, l’idée selon laquelle les technologies de capture du carbone seraient une solution valable. Laissant croire que la technique nous affranchira de la nécessité de réduire drastiquement nos émissions de CO2.

Un intense travail de sape qui a permis quelques succès, puisque la Commission considère désormais le gaz fossile comme « une énergie de la transition ». A lire dans Libération

Les forêts tropicales perdent leur capacité à stocker le CO2

Jusqu'ici, on n'a pas trouvé beaucoup mieux que les forêts pour stocker le CO2 émis par les activités humaines. Or, comme le révèle une étude, les forêts tropicales comme l'Amazonie sont en train de perdre leur capacité à absorber le carbone. Pire, elles pourraient devenir des sources d'émissions de CO2 d'ici quelques années.

Image satellite de la déforestation de l'Amazonie dans l'Etat brésilien du Para© Sentinel Hub

Elles stockaient jusqu'à 15% des émissions humaines il y a encore vingt ans ; Sous l'effet de l'augmentation de la température, des sécheresses et de la déforestation, les forêts vierges tropicales captent aujourd'hui trois fois moins de CO2 que dans les années 1990. C'est ce qu'ont observé les auteurs•rices de cette vaste étude, parue mercredi 4 mars dans Nature. 

Appelée le « poumon de la terre », l'Amazonie pourrait devenir une source de CO2 d'ici les années 2030, alertent les scientifiques.

La perte de cette faculté des forêts tropicales se produit « des décennies plus tôt que ce que les modèles les plus pessimistes avaient prédit », s'alarme l'un des auteurs auprès du Guardian. Les conséquences d'un tel phénomène sont potentiellement catastrophiques et pourraient entraîner le dépassement d'un point de bascule : la baisse de la captation de CO2 par les forêts tropicales entraînerait un réchauffement de la planète, qui entraînerait à son tour une baisse de la captation de CO2, etc. A lire dans le Guardian (en anglais).

Ne plus rien acheter de neuf

Et si, plutôt que de lorgner le catalogue Ikea pour ce nouveau canapé dont vous avez besoin, vous choisissiez cette fois-ci de vous tourner vers les milliers de ses semblables déjà en circulation ? Prêt•e•s à relever le défi « Rien de neuf » ? 

Le principe de l'opération, menée par l'association Zero Waste France : préserver les ressources de la planète en laissant, par exemple, une chance aux millions d'objets de seconde main disponibles à travers le pays. Magasins d'occasion, ateliers de réparation, conseils de couture, location, échange... Celles et ceux qui voudraient essayer de réduire leur empreinte carbone trouveront sur le site du défi une foule d'adresses et de conseils pour se libérer du neuf.

Le chauffage (aussi), c'est mieux à plusieurs 

Exit les « grille-pains », ces radiateurs électriques idiots qui font grimper la facture plus sûrement que le mercure. Bye bye, les chaudières individuelles qui gaspillent de l'énergie. Place au chauffage alimenté par les réseaux de chaleur, solution plus efficiente, moins énergivore et émettrice de CO2, que raconte en détail le Monde dans le dernier épisode de sa série Plan B.