Les politiques, pas assez « climat »


Si certains considèrent que parler du climat, c'est trop “politique”, un nombre croissant d'humains commence à se dire que ce sont peut-être les politiques, qui ne sont pas assez “climat”.

La Commission européenne présente sa nouvelle loi climat

Encore un moment, monsieur le bourreau. Mercredi 4 mars, la Commission européenne doit présenter sa loi climat, censée donner corps au « green deal » annoncé en décembre. Face à la crise, l'exécutif européen a sa propre conception de l'urgence. 

La loi reprend l'objectif, déjà brandi par Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 à l'échelle de l'Union Européenne. Autrement dit : l'ensemble du CO2 encore émis à cette date devra être compensé, par exemple, en plantant des arbres. Comme l'explique le Monde, cet objectif est donné pour toute l'UE, et non pas pour chaque pays. 

Très dépendante du charbon, la Pologne a, quant à elle, déjà annoncé qu'elle ne respecterait pas cet objectif. Elle devrait recevoir 2 des 7,5 milliards d'euros dont sera doté le futur fonds de transition équitable, qui vise à aider les pays en retard à effectuer leur conversion vers des énergies moins carbonées.

La loi climat fixe également un objectif intermédiaire de réduction des gaz à effet de serre de 50 ou 55% d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990 (contre -40% actuellement). La Commission devrait trancher sur cet objectif d'ici le mois de septembre. Mais elle est déjà priée de se dépêcher par des ONG, ainsi que douze ministres de l’environnement, auteurs d’une lettre adressée à la Commission dans laquelle ceux-ci réclament que l’objectif soir fixé en juin 2020 au plus tard. 

Comme l'explique encore le Monde, en juin 2021, la Commission devrait présenter, entre autres, sa réforme de la taxation de l'énergie, un nouveau système d'échange de quotas d'émissions de CO2, ou les futurs plafonds d'émissions des véhicules. A l'avenir, les lois votées à Bruxelles devraient faire l'objet d'une évaluation de leur bilan carbone. A partir de 2023, la Commission fera ses recommandations aux Etats pour que ceux-ci atteignent l'objectif intermédiaire de 2030. A lire dans le Monde (abonnés). 

 

Une loi climat qui baisse les bras

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a invité Greta Thunberg à assister, mercredi, à la réunion de l'exécutif au sujet de la nouvelle loi climat. Celle-ci n'a pas attendu la présentation du nouveau texte pour co-signer, avec 33 autres jeunes militant•e•s, une tribune ravageuse pour dénoncer le manque d'ambition de la Commission.

Greta Thunberg, au Parlement européen de Strasbourg, en avril 2019. © Parlement européen

« Une telle loi envoie le signal, fort, qu'une action réelle et suffisante est menée alors que c'est faux, dénoncent d'emblée les signataires, issus de 20 pays européens. La dure réalité est qu'aucune prise de conscience, ni mesure nécessaire ne sont en vue. Nous sommes dans une crise qui n'a jamais été traitée comme une crise »

Les auteurs•rices de la tribune s'alarment de ce que la Commission a « complètement ignoré » la notion de budget carbone, présenté par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) dans ses derniers rapports. Celui-ci quantifie ce que le monde peut encore émettre de CO2 avant de dépasser irrémédiablement les 1,5°C de réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle. 

Or, ce budget se réduit comme peau de chagrin : selon le GIEC, nous pouvons encore produire 340 gigatonnes de CO2 avant de perdre tout espoir de rester sous la barre de 1,5°C. Au rythme actuel, le budget sera dépassé dans huit ans, signe de l'urgence de faire baisser drastiquement et immédiatement les émissions, selon les signataires, qui déplorent que la loi climat ne propose aucun objectif avant 2030.

« “Zéro émissions nettes en 2050” dans l'Union européenne, cela […] revient à abandonner. Nous n'avons pas simplement besoin d'objectifs pour 2030 ou 2050. Nous en avons besoin, par-dessus tout, pour 2020 et tous les mois et années à venir », s'alarment les signataires. A lire dans Carbon Brief (en anglais).

Climat : où en sont les candidats aux municipales ?

A quelques jours du premier tour des élections municipales françaises, qui se déroulera le 15 mars, c'est l'heure de distribuer les bons et les mauvais points aux aspirant•e•s maires. Dans une riche enquêtele Réseau action climat (RAC) s'est penché sur les programmes des candidat•e•s des dix plus grandes villes françaises

Sur les 40 postulant•e•s étudié•e•s, seul•e•s 13 ont inclus dans leur programme des mesures qualifiées d'« incontournables » par le RAC pour répondre à l'urgence climatique. Neuf n'ont rien proposé de tel. « La grande majorité des candidats reste donc au milieu du gué », note ce réseau constitué de plus de 30 associations écologistes, qui relève également que les programmes, parfois bardés de bonnes intentions, manquent souvent de propositions concrètes.

Les programmes des principaux candidats strasbourgeois passés au crible du Réseau action climat.

Dans chacune de ces villes, le RAC a attribué une note aux candidat•e•s (vert, orange, rouge) sur les mesures proposées dans dix thématiques, parmi lesquelles : le développement du vélo, la rénovation des logements ou la réduction des déchets. Le détail, ville par ville et candidat•e par candidat•e est à retrouver sur le site du Réseau action climat.

Les années volées par la pollution de l'air

Elle ne nous prend pas que le nez. La pollution de l'air réduirait l'espérance de vie des humains de presque trois annéesselon une étude publiée, mardi 3 mars, dans la revue Cardiovascular research. 

Les scientifiques ont étudié l'impact sur la santé de la pollution - d'origine humaine - aux particules fines PM2,5 (d'un diamètre inférieur à 2,5 micromètres) et à l'ozone. Deux polluants émis largement, entre autres, par la combustion d'énergies fossiles et la circulation routière.

Les chercheurs se sont notamment penchés sur le cas des populations les plus fragiles : personnes âgées, diabétiques, etc. Ils ont déterminé que la pollution de l'air provoquait la mort prématurée de 8,8 millions de personnes chaque année (le chiffre est celui de 2015).

En provocant et en aggravant, notamment, les maladies respiratoires et cardiovasculaires, la pollution de l'air due aux activités humaines entraîne une baisse moyenne d'espérance de vie de 2,9 années. Devant le tabagisme (-2,2 années), le sida (-0,7 an), ou les guerres (0,3 an)

Il faut voir le bon côté des choses : en supprimant les émissions « contrôlables » d'origine humaine, l'humanité verrait son espérance de vie s'allonger de 1,7 an, selon les auteurs de l'étude. A lire dans le Guardian (en anglais) ou le Huffington post


 

Le plastique a son atlas

Comme tout continent qui se respecte, le plastique a désormais son atlas. La Fondation Heinrich Böll, La Fabrique écologique et Zero Waste France viennent de sortir leur Atlas du plastique : un rapport complet pour tout comprendre à l'un des problèmes majeurs de ce siècle.

Ça déborde ! Les chiffres ne manquent pas, dans cet opus disponible en libre accès, pour décrire l'ampleur de la crise. Seuls 10% des 9,2 milliards de tonnes de plastique produites depuis 1950 auraient été recyclées.

© Atlas du plastique

On pourrait croire que l'utilisation de plastique - à usage unique notamment, serait en recul depuis quelques années : il n'en est rien. On a produit plus de plastique depuis 2000 que lors des cinquante années précédentes. 

Pollution des sols et des organismes, histoire des polymères, ordres de grandeurs... Ce rapport, très complet, facile d'accès et bien illustré est à lire sur le site de la fondation Heinrich Böll.

Une carte collaborative des mobilisations des 13 et 14 mars

Finis les « j'ai entendu dire que quelqu'un avait dit que, quelque part... ». Les Citoyens pour le climat et Youth for climate ont mis en ligne une carte des rassemblements organisés à travers la France à l'occasion des journées d'actions pour le climat des 13 et 14 mars.

© Citoyens pour le climat

Heure, lieu de rendez-vous, lien de l'événement sur les réseaux sociaux ; chacun•e peut proposer son propre rassemblement, grève ou manifestation sur cette carte collaborative. A retrouver sur le site de Citoyens pour le climat.

Un autre récit sur l'effondrement

Pour parler du climat, personne ne manie aussi bien le registre de la peur que Greta Thunberg. Cependant, pour Clément Viktorovitch, spécialiste de la rhétorique, il serait peut-être temps de mobiliser une autre émotion dans le récit sur la crise climatique : l'espoir. Afin d'envisager l'effondrement non plus comme une fatalité mais comme l'opportunité qui nous est donnée d'inventer un autre monde.

La chronique de Clément Viktorovitch dans Clique, sur Canal +