Les niches fiscales contre la niche climatique


Sur Terre, la surface habitable pourrait rétrécir en même temps qu'augmentent les bénéfices des multinationales. 

D'ici 50 ans, un tiers de la population mondiale pourrait vivre hors de la « niche climatique »

Les vêtements ne sont pas les seuls à rétrécir à haute température. Plus il fera chaud sur le globe, plus l'espace habitable par les humains est voué à s'amenuiser, préviennent les auteurs d'une étude publiée lundi 4 mai dans la revue Proceedings of the national academy of science (PNAS).

Depuis 6000 ans au moins, les êtres humains habitent des régions dans lesquelles la température moyenne annuelle se situe entre 11 et 15°C ; des « niches » environnementales au sein desquelles nous avons pu développer des systèmes agricoles, dépendants des mêmes conditions climatiques que nous.

Dans ses rapports, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) étudie plusieurs scénarios climatiques : parmi ceux-ci, le scénario « business as usual » placerait le monde sur la trajectoire d'un réchauffement de plus de 4°C d'ici la fin du siècle. 

Or, indique les scientifiques, si l'humanité venait à poursuivre ses activités comme si de rien n'était, un tiers de la population mondiale serait vouée à habiter des régions aux températures extrêmes - plus de 29°C de moyenne annuelle - dès les années 2070. Aujourd'hui, seuls 25 millions d'humains vivent dans de telles régions, essentiellement situées autour du Sahara.

Parmi les pays les plus menacés : la majeure partie de l'Inde et le Nigéria pourraient se retrouver hors de la niche climatique d'ici 50 ans. Une telle situation entraînerait des migrations majeures : 3,5 milliards de personnes sur les 10 milliards que compterait la planète en 2070, si rien n'est fait pour endiguer le réchauffement climatique. A lire dans Actu-environnement (abonnés). 

Le bilan environnemental salé d'une sucrerie du Nord

Béghin-Say what ? Un accident survenu dans une sucrerie du Nord est en train de causer une catastrophe écologique majeure dans le fleuve de l'Escaut, à cheval entre la France et la Belgique. 

Le 9 avril, la rupture de la digue d'un bassin de la sucrerie Tereos d'Escaudœuvres (Nord) répand rapidement 100 000 m3 d’eau de lavage de betteraves dans l'Escaut. L'accident fait alors peu de bruit, et les cent millions de litre d'eau boueuse s'écoulent au fil du fleuve jusqu'en Belgique.

Problème : ces eaux comptent une population à la croissance exponentielle de bactéries qui raffolent autant de sucre que d'oxygène, raconte France info. Or, même les poissons ont besoin d'oxygène pour vivre. 

Des images de la pollution de l'Escaut à hauteur de Valenciennes © France 3

Il faut attendre six jours pour que les autorités françaises reconnaissent le problème, alors que de nombreuses morts suspectes de poissons ont déjà été recensées. Le 15 avril, l'Office française de la biodiversité ouvre une enquête pour« pollution des eaux superficielles ». La préfecture du Nord ne s'exprime que le 24 avril : « Bien qu'une diminution d'oxygène avec l'apparition d'une mortalité piscicole ait pu être constatée dans les jours suivant l'accident, un retour progressif à un taux d'oxygène plus normal a été mesuré »explique-t-elle pour justifier le fait de n'avoir pas prévenu la Belgique de la catastrophe qui venait.

Côté belge, en Wallonie, les dégâts sont considérables. Des dizaines de tonnes de poissons sont morts. Et les reproches se font jour : pourquoi les autorités françaises ont tant tardé à avertir leur voisin ? Située plus en aval, la Flandre, elle, a eu le temps de prendre des mesures d'urgence. De l'oxygène a été injecté dans l'Escaut pour permettre la survie des poissons.

Alors que Tereos affirme à France info qu'il est « à ce stade impossible d'établir un lien de causalité avéré entre l'incident [et] la situation en Belgique », l'Escaut compte ses victimes. Selon les avis, il faudrait entre 5 et 15 ans pour que les populations de poissons se remettent de la catastrophe. Avec, peut-être, la perte définitive de certaines espèces protégées. A lire dans France info

Quand Total et le Medef réclament davantage d'écologie

C’est cocasse. Répondant à l'appel du patron de la banque BNP, 90 chefs d'entreprises parmi les plus polluantes de France réclament que l'environnement soit mis « au cœur de la reprise économique » dans une tribune.

Malgré la crise économique née du Covid-19, « nous gardons nos ambitions collectives en matière de transition écologique, et réaffirmons les engagements pris depuis plusieurs années », promettent les signataires. Ceux-ci (seules deux femmes ont paraphé l'appel) jugent qu'une « large part des moyens financiers qui seront prochainement mobilisés pour la relance économique aurait tout intérêt à l’être dans les directions qui avaient été précédemment identifiées pour accompagner la transition écologique, avec un souci encore plus affirmé de la justice sociale ».

Les patrons recommandent, entre autres, d'encourager la rénovation énergétique des bâtiments, de développer les énergies renouvelables, et de décarboner les outils industriels. 

Des propositions qui seraient recevables si la liste des signataires ne constituait pas le bottin mondain des plus gros pollueurs français (mais pas que). On y trouve ainsi le patron d'Air France, entreprise qui vient de se voir accorder 7 milliards d'aides publiques, pour l'instant sans aucune contrepartie écologique ; le pétrolier Total (qui génère l'équivalent de 70% des émissions françaises de CO2) et le parapétrolier Vallourec ; la BNP, premier investisseur européen dans les énergies fossiles, selon le dernier rapport Banking on climate change, la Société générale et le Crédit agricole, pas très loin derrière ; les bétonneurs Lafarge et Vinci ; Bayer, propriétaire de Monsanto ; etc. 

Comble de l'ironie, les présidents du Medef (le syndicat des patrons) et de l'Afep (le lobby des plus grandes entreprises du CAC40) ont tous deux signé le texte. Comme Vert l'avait rapporté, ces deux organisations oeuvrent en coulisses pour défaire des normes environnementales à la faveur de la crise. La tribune est à lire dans le Monde (abonnés).

Les graffeurs de la biodiversité urbaine

Pariétale de Judée, j’écris ton nom. Armés de craies, des botanistes rebelles sévissent à travers l'Angleterre et la France pour redonner leurs lettres de noblesse aux « mauvaises herbes » qui poussent dans nos villes.

En France, d'abord, Boris Presseq s'est fait connaître en traçant à la craie le nom des plantes sauvages de sa ville. Botaniste au muséum de Toulouse, il s'est donné pour mission d'éduquer ses concitoyens au sujet de la biodiversité foisonnante qui s'étale sous leurs yeux. « A partir du moment où on nomme quelque chose, on lui donne une existence », confiait-il à Brut, en nombre dernier. 

Le reportage de Brut sur Boris Presseq, en novembre 2019 © Brut

En Angleterre, la botaniste française Sophie Leguil a prolongé son combat. Dans le cadre du mouvement More than weeds (« plus que des mauvaises herbes ») qu'elle a lancé, elle a repris le flambeau à Londres après avoir obtenu les autorisations nécessaires ; en Angleterre, il est interdit d'écrire quoique ce soit à la craie. 

Depuis des mois, des dizaines de botanistes mâtinent les sols londoniens d'indications au sujet de la flore indigène locale. La ville pourrait accueillir jusqu'à 400 espèces différentes si la municipalité cessait d'utiliser des pesticides, d'après le Guardian

"A la personne qui écrit les noms et descriptions des arbres sur les trottoirs de Walthamstow. Je t'aime. Mon coeur a chanté aujourd'hui."

Plusieurs images immortalisant certaines de leurs actions ont été partagées des dizaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux. Un retentissement qui permettra peut-être de faire connaître un peu mieux la flore urbaine, notamment aux jeunes britanniques. A lire dans le Guardian (en anglais). 

Quatre actions écolo ambitieuses à entreprendre pendant le confinement (et après)

Un•e Français•e produit en moyenne 10,8 tonnes de CO2 par an. Pour respecter les objectifs contenus dans l'Accord, il faudrait en émettre, au bas mot, cinq fois moins. Comment faire pour ne pas voir notre niche climatique se réduire comme peau de chagrin ? Dans cette vidéo de Brut, Julien Vidal, créateur du mouvement Ça commence par moi, propose quatre actions à entreprendre pendant ces derniers jours de confinement, qui auront un réel impact sur votre empreinte carbone

© Brut