Les eaux et la colère qui montent

Les adieux au chlorpyrifos

On ne trouvera pas grand monde pour leur rendre un dernier hommage. Ces deux pesticides causent retards de développement chez les enfants, troubles autistiques, déficit de l'attention ou hyperactivité. Ils sont aussi à l'origine de millions de points de QI perdus en Europe mais - enfin ! le chlopyrifos et chlorpyrifos-méthyl viennent d'être interdits en Europe.

Vendredi 6 décembre, les Etats membres de l'Union européenne ont voté contre le renouvellement de l'autorisation qui arrive à échéance fin janvier 2020. En août 2019, au sujet de ces deux pesticides, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait conclu à de « potentiels » effets néfastes sur les gènes et le cerveau en développement des fœtus, comme l'a rapporté le Monde. Avis sur lequel s'est basé la Commission européenne pour proposer leur interdiction. 

Dans un communiqué, sept ONG (dont la française Générations futures) ont « applaudi » cette décision « historique ».

Pikachu contre le charbon japonais

Le Japon ne fait pas grand chose pour le climat. C'est même tout l'inverse, puisque le pays est le premier sponsor du charbon à travers le monde. Aux grands maux, les grands remèdes : à l'occasion de la COP25 à Madrid, une bande de Pikachus géants est venue faire pression sur le Japon pour qu'il cesse de financer cette énergie fossile, première responsable des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.

Compte Twitter de 350.org

A l'intérieur des Pikachus, des représentants d'ONG environnementales asiatiques sont venus, jeudi 5 décembre, s'adresser symboliquement au premier ministre Shinzo Abe, dont le manque de volontarisme est désormais proverbial. Le secrétaire d'Etat de l'ONU, Antonio Guterres, lui a refusé un discours à l'occasion du sommet des Nations Unies de septembre 2019 en raison du peu de cas qu'il fait de la préservation de l'environnement, comme le raconte le Monde

Depuis la catastrophe de Fukushima, le recours au charbon a fortement augmenté dans l'archipel, pour atteindre près d'un tiers du mixte électrique en 2018. Le Japon est désormais le troisième importateur mondial de charbon et surtout, il finance des centrales à charbon partout autour de lui : en Inde, en Indonésie ou encore dans les Philippines.

Au moment où les Pikachus, issus de ces pays-là, donnaient de la voix dans le mégaphone, l'ONG 350.org donnait du poids à leurs arguments. Le même jour, l'association publiait un rapport sur les banques qui financent le charbon à travers le monde. Et il se trouve que les trois plus gros financeurs du combustible fossile sont, de très loin, japonais. On peut également constater que les banques françaises figurent en bonne place dans ce classement :

COP 25 : maintenir la pression sur les dirigeants

Il n'y a heureusement pas que des Pokémon pour mettre la pression sur les décideurs politiques. Vendredi 6 décembre, des milliers de manifestants se sont donné rendez-vous dans les rues de Madrid pour réclamer des mesures rapides pour le climat.

Parmi les protestataires, la jeune icône Greta Thunberg s'est exprimée : « Les dirigeants actuels nous trahissent et nous ne laisserons plus cela se produire » a-t-elle déclaré à la fin du parcours, comme l'a relaté l'AFP« Nous disons “c'est assez”. Le changement est en marche, qu'ils le veuillent ou non car nous n'avons pas d'autre choix ». Jeunes des « vendredis pour le climat », représentants de peuples indigènes dont les Mapuches du Chili... Le cortège a rassemblé entre 15 000 (selon la police) et 500 000 personnes, selon Greenpeace Espagne. 

Les manifestants ont bénéficié du soutien de l'acteur espagnol Javier Bardem, ainsi que du Dalai Lama, qui a écrit dans un tweet : « Prendre soin de notre planète, c'est s'occuper de notre propre maison. Nous ne pouvons plus exploiter les ressources de la terre – les arbres, l'eau, l'air et les minéraux – sans soucis des générations futures. Je soutiens les manifestations de jeunes contre l'inaction des gouvernements face à la crise climatique. »
 

Zéro Macron à la COP, 100 Macron au Trocadéro

Eux non plus ne lâchent pas leurs dirigeants d'une semelle. Des militants d'ANV COP21 se sont rendus sur la place parisienne du Trocadéro pour exhiber 100 portraits du président Macron, à 100 jours des élections municipales.

Compte Twitter d'ANV COP21

En ce dimanche 8 décembre, synonyme de journée mondiale pour le climat, la centaine de militants sont venus dénoncer l'inaction du gouvernement français. Ils ont très peu goûté l'absence à la COP25 du président, à qui ils ont décerné le titre de « champion du blabla ». Sur Twitter, ANV COP21 a énuméré ses revendications à l'endroit d'Emmanuel Macron : que le président « dise la vérité » sur l'ampleur du réchauffement ; Qu'il prenne des mesures ambitieuses et radicales dans tous les secteurs nécessaires ; Que soit garantie la justice sociale, en accompagnant notamment les personnes les plus précaires et les plus vulnérables au dérèglement climatique. A lire dans le Huffington Post
 

Les océans manquent d'air

A Madrid, les océans doivent être au cœur des discussions de celle que l'on a déjà baptisée la « COP bleue ». Acidification, surpêche, réchauffement... ils seraient désormais également menacés par une baisse de leur teneur en oxygène. C'est la conclusion d'une étude menée par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et publiée samedi 7 septembre. 

On y apprend qu'à travers le monde, le taux d'oxygène des océans a baissé d'environ 2% entre 1960 et 2010. Ce taux pourrait encore chuter de 3 à 4% d'ici la fin du siècle si rien n'est fait pour enrayer les émissions de gaz à effet de serre, comme l'a relevé l'AFP

La réduction de la teneur en oxygène des océans (ou désoxygénation) s'explique par deux phénomènes. D'une part, la montée en température des eaux océaniques induite par le réchauffement climatique. Pour l'heure, les océans ont absorbé l'essentiel du réchauffement de la terre. D'autre part, par l'eutrophisation : sous l'effet des activités humaines (agriculture, utilisation des énergies fossiles...) les eaux se chargent en nutriments tels que l'azote, ce qui entraîne une prolifération de végétaux, comme les algues, qui privent à leur tour les océans d'oxygène.

Cette désoxygénation modifie également les équilibres de la vie sous-marine. Elle favorise certaines espèces tels que les méduses ou certains calmars et met en danger certains poissons comme les thons, ou les requins, très gourmands en énergie.

La protection des océans est plus que jamais cruciale alors que ceux-ci produisent plus de 50% de l'oxygène de la planète en même temps qu'ils absorbent plus d'un quart du CO2, comme l'a noté le Monde. La question, centrale à l'occasion de cette COP, sera à l'ordre du jour du traité international sur la haute mer prévu pour 2020
 

Mazout, alors !

Il n'en finit plus de salir les côtes bretonnes : le « Tanio », pétrolier échoué au large du Finistère en mars 1980, recrache encore des hydrocarbures dans la nature. Fin novembre, une trentaine d'oiseaux ont été retrouvés morts, couverts de mazout. Comme le raconte 20 Minutes, le navire, dont l'épave gît à 80 mètres sous la mer, avait fait l'objet des premiers soupçons. Soupçons qui ont été confirmés à la suite de plusieurs investigations, qui ont confirmé, mardi 3 décembre, que la fuite provenait bien du Tanio. Lors du naufrage, 10 000 des 28 600 tonnes de pétrole qu'il contenait avaient été déversées en mer.

Les eaux montent et -surprise ! La France n'y est pas du tout préparée. En plusieurs points du pays, en Gironde ou dans les Bouches-du-Rhône, les côtes s'érodent de plus en vite sous l'effet de l'élévation du niveau des mers. La question qui va se poser avec de plus en plus de force dans les années à venir est : qui payera l'addition des maisons et immeubles effondré•e•s ?

Dans une riche enquête, Reporterre raconte comment l'Etat entretient l'impréparation en refusant, par exemple, d'inclure l'érosion côtière lente dans le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, financé par un prélèvement sur les contrats d'assurance habitation et auto. De leurs côtés respectifs, habitants et élus locaux sont démunis.

Là encore, l'Etat refuse de prendre ses responsabilités. Fermée en 2004, l'ancienne mine d'or de Salsigne, dans l'Aude, continue de générer un lot indescriptible de pollution autour d'elle. Les eaux, les jardins, les forêts subissent le déversement régulier d'une partie des quelque 100 tonnes d'arsenic qui pourraient subsister sur l'ancien site minier. L'Etat ne nie pas la pollution, mais il refuse d'admettre la « surpollution », pour ne pas être tenu responsable et devoir payer pour l'étendue réelle des dégâts ainsi que la réhabilitation des lieux. C'est ce que raconte cette vidéo de la série Plan B du Monde.

Fumer tue, le pétrole pollue

Client Earth

L'ONG Client Earth n'en peut plus du greenwashing. A fortiori quand le pétrolier BP vante les mérites des énergies renouvelables dans ses publicités alors qu'il continue de consacrer la quasi-totalité de ses investissements au pétrole et au gaz. Client Earth, qui a porté plainte contre BP pour publicité mensongère la semaine dernière (à lire dans le Guardian) veut également faire interdire les publicités des entreprises productrices d'énergies fossiles. Ou à défaut, les contraindre à faire figurer la mention « les énergies fossiles provoquent le réchauffement climatique » sur la réclame des géants du pétrole. A lire sur le site de Grist (en anglais).