Après la pluie, le bon temps de l’écoféminisme

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Ni les femmes, ni la Terre… Ouvrage-grotte dans lequel résonne l’é­cho de voix plurielles, Après la pluie se veut le manuel des écofémin­ismes d’au­jour­d’hui.

Dans les années 70, la philosophe et roman­cière Françoise d’Eaubonne fut par­mi les pre­mières à prôn­er la reprise en main, par les femmes, de leur fécon­dité et de la cul­ture des sols con­tre les logiques extrac­tivistes et pré­da­tri­ces des hommes. Dans son sil­lon, les luttes écofémin­istes com­bat­tent depuis lors un sys­tème « patri­ar­cap­i­tal­iste » qui exploite, avilit, vio­lente, souille. « Nous ne cesserons d’af­firmer encore et encore, clame la mil­i­tante Sel­ma Muzet, les liens qui exis­tent entre la destruc­tion de l’en­vi­ron­nement, l’ex­ploita­tion des ressources naturelles, des ani­maux, des plantes, du moin­dre grain de sable et les vio­lences sex­istes, machistes, patri­ar­cales et colo­niales qui par­courent notre monde ». Mis en musique par Solène Ducre­tot et Alice Jehan, fon­da­tri­ces du col­lec­tif Les engraineuses et du fes­ti­val Après la pluie, l’ou­vrage éponyme donne la parole à une soix­an­taine d’auteur•ice•s, d’artistes et de militant•e•s pour dépein­dre le paysage actuel et les hori­zons de l’é­cofémin­isme.

Mou­ve­ments hétérogènes dont les branch­es matéri­al­iste et spir­ituelle peu­vent sem­bler irré­c­on­cil­i­ables, les écofémin­ismes se retrou­vent tout de même autour de valeurs com­munes : jus­tice, équité, soror­ité, humil­ité, sol­i­dar­ité. Et d’« un refus de subir mais aus­si d’ex­ercer un pou­voir sur d’autres, êtres humains et non-humains », insiste la pro­fesseure de philoso­phie Jeanne Bur­gart Goutal. La fig­ure con­tes­tataire de la sor­cière y est brandie en sym­bole de la puis­sance retrou­vée des femmes et de la capac­ité des vivant.e.s à créer un monde plus respectueux. 

Empreint de magie, ce patch­work inspi­rant présente des recettes pour se met­tre en action. Au fil des pages — superbe­ment illus­trées — on s’en­gage, on des­sine, on rebat les cartes de domaines aus­si var­iés que l’a­gri­cul­ture ou le care. Les lecteur•ice•s y décou­vriront de nou­velles voies pour coex­is­ter. Avec un but : rétablir une har­monie aban­don­née depuis longtemps au prof­it du prof­it lui-même. 

Après la pluie, hori­zons écofémin­istes, de Solène Ducre­tot et Alice Jehan (2020), Tana édi­tions, 222 pages, 22€.